Vu la requête, enregistrée le 14 septembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Adrian X...
Y..., demeurant ... ; M. ACOSTA Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 20 août 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 2 août 1999 du préfet de Seine-et-Marne ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) annule cet arrêté pour excès de pouvoir ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment son article 8 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Dayan, Conseil d'Etat,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. ACOSTA Y..., de nationalité urugayenne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification de l'arrêté par lequel le préfet de Seine-et-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que la circonstance que M. ACOSTA Y... ne contesterait pas la décision de refus de séjour qui lui a été opposée ne lui interdit pas d'attaquer l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière en se prévalant de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'aux termes de cet article : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. ACOSTA Y..., né en 1970, est venu en France en 1974 avec ses parents de nationalité uruguayenne et y a, alors, été scolarisé ; qu'après le divorce de ses parents il a été amené par son père en Uruguay à l'âge de dix ans et est demeuré dans ce pays jusqu'à sa majorité sous l'autorité de son père ; qu'après sa majorité il est revenu en France pour suivre des études supérieures et vivre auprès de sa mère et de ses deux frères qui étaient demeurés en France et y résident régulièrement ; que son père s'est remarié en Uruguay ; que, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances de fait, alors même que l'intéressé est célibataire et sans enfant, l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne en date du 2 août 1999 ordonnant sa reconduite à la frontière a porté au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il est intervenu ; que M. ACOSTA Y... est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, en date du 20 août 1999, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun en date du 20 août 1999 ensemble l'arrêté en date du 2 août 1999 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Adrian X...
Y..., au préfet de Seine-et-Marne et au ministre de l'intérieur.