Vu la requête, enregistrée le 11 août 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU JURA ; le PREFET DU JURA demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 juillet 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Besançon a annulé pour excès de pouvoir son arrêté du 25 juillet 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Mohamed Ali X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Besançon ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le décret n° 50-722 du 24 juin 1950 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Aladjidi, Auditeur,
- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par M. X... :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 24 juin 1950 susvisé : "En cas de vacance momentanée d'une préfecture, d'absence ou d'empêchement d'un préfet, sans que ce dernier ait délégué l'exercice de ses fonctions dans les conditions prévues à l'article précédent, le secrétaire général de la préfecture assure l'administration du département" ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de signature de la requête d'appel, le PREFET DU JURA était absent ; que, dès lors, le secrétaire général de la préfecture du Jura était compétent pour signer la présente requête ;
Au fond :
Considérant qu'aux termes des dispositions du 2° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité tunisienne, entré en France en mars 1990 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa valable trente jours, s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa ; que l'intéressé entrait dans le cas où, en application du 2° du I de l'article 22 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en prenant l'arrêté litigieux à l'encontre de M. X..., le PREFET DU JURA a entendu mettre fin à la présence irrégulière de ce dernier sur le territoire ; que ledit arrêté n'a ni pour objet, ni pour effet d'interdire le mariage que M. X... projetait de contracter avec une ressortissante française ; que, par suite, le PREFET DU JURA est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Besançon a annulé pour ce motif l'arrêté de reconduite à la frontière pris le 25 juillet 2000 à l'encontre de M. X... ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X... devant le tribunal administratif ;
Considérant que si M. X... soutient que le maire de la commune de Dole a fait obstacle à la célébration de son mariage, cette circonstance, à la supposer établie, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué, qui n'est pas entaché de détournement de pouvoir ;
Considérant que M. X... était à la date de l'arrêté attaqué, célibataire et sans enfant et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il soit dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que s'il fait valoir qu'il a épousé postérieurement à l'intervention de l'arrêté une ressortissante française, cette circonstance, qui est de nature, eu égard aux stipulations de l'article 10 de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988, selon lesquelles un titre de séjour d'une durée de dix ans est délivré de plein droit au conjoint tunisien d'une ressortissante française, à faire obstacle à l'exécution de la mesure de reconduite à la frontière, est sans influence sur la légalité de cette même mesure qui a été prise avant le mariage ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté attaqué, à la date à laquelle il a été pris, n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU JURA est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Besançon en date du 28 juillet 2000 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon en date du 28 juillet 2000 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Besançon est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU JURA, à M. Mohamed Ali X... et au ministre de l'intérieur.