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28/05/2001 | FRANCE | N°206267

France | France, Conseil d'État, 8 / 3 ssr, 28 mai 2001, 206267


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 1er avril et 30 juillet 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE (ESAT) DE GIEL, dont le siège est à Giel-Courteille (61210) et pour la MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD dont le siège est ... au Mans (72030) ; l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE (ESAT) DE GIEL et la MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 30 décembre 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a

rejeté leur demande tendant à l'annulation du jugement du 22 no...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 1er avril et 30 juillet 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE (ESAT) DE GIEL, dont le siège est à Giel-Courteille (61210) et pour la MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD dont le siège est ... au Mans (72030) ; l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE (ESAT) DE GIEL et la MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 30 décembre 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation du jugement du 22 novembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de deux décisions des 26 mars et 9 avril 1993 du préfet de l'Orne refusant la prise en charge par l'Etat du montant des condamnations encourues au profit de M. Damien X..., victime d'un accident au cours d'un stage ainsi qu'à la condamnation de l'Etat à les garantir du montant de ces condamnations ;
2°) de faire droit à leurs conclusions présentées devant la cour administrative d'appel de Nantes ;
3°) de condamner l'Etat au versement d'une somme de 10 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu l'article 34 ajouté au décret du 26 octobre 1849 par l'article 6 du décret n° 60-728 du 25 juillet 1960 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Sauron, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE DE GIEL et de la MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu de l'article 1145 du code rural, alors en vigueur, bénéficient du régime d'assurance obligatoire contre les accidents du travail dans le secteur agricole : "1°) Les élèves des établissements d'enseignement technique et de formation professionnelle agricoles pour les accidents survenus par le fait ou à l'occasion de cet enseignement ou de cette formation ..." ; qu'aux termes de l'article 1149 du même code, dans sa rédaction alors applicable : "Les dispositions des articles L. 451-1 à L. 455-2 du code de la sécurité sociale sont applicables au régime défini au présent chapitre" ; qu'aux termes de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale : "Lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants-droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants" et qu'aux termes de l'article L. 452-3 du même code : "Indépendamment de la majoration de rente qu'elle reçoit ( ...) la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle ( ...). La réparation de ces préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l'employeur" ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. Damien X... a subi de graves brûlures lors d'un accident survenu le 20 septembre 1988 à la coopérative d'utilisation du matériel agricole (C.U.M.A.) auvraisienne où il effectuait un stage dans le cadre de sa scolarité en deuxième année du brevet d'enseignement professionnel agricole au lycée agricole privé sous contrat d'association avec l'Etat, dit ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE DE GIEL ; que, par jugement avant-dire droit du tribunal des affaires de sécurité sociale d'Alençon du 13 mars 1992 confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Caen du 25 février 1993, l'accident dont a été victime M. X... a été imputé à la faute inexcusable de l'employeur, "l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE DE GIEL, ou de son substitut, la C.U.M.A. auvraisienne" ; que, par requête enregistrée le 19 mai 1993, l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE DE GIEL et son assureur, la MUTUELLE DU MANS, ont demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'Etat à les garantir de toutes condamnations prononcées au bénéfice de M. X... et d'annuler les décisions du préfet de l'Orne des 26 mars 1993 et 9 avril 1993 refusant la prise en charge de ces condamnations par l'Etat ; que, par un arrêt du 24 novembre 1997, passé en force de chose jugée, la cour d'appel de Caen a confirmé l'évaluation faite par le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Alençon du préjudice indemnisable de M. X..., et, sur l'appel en garantie de l'Etat présenté par l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE DE GIEL, a fait droit au déclinatoire de compétence du préfet de l'Orne ; que l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE DE GIEL et la société MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD se pourvoient contre l'arrêt en date du 30 décembre 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté leur requête d'appel au motif que leurs conclusions ne relevaient pas de la compétence de la juridiction administrative ;
Considérant qu'aux termes de l'article 34 ajouté au décret du 26 octobre 1849 par l'article 6 du décret du 25 juillet 1960 portant réforme de la procédure des conflits d'attribution, "lorsqu'une juridiction de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif a, par une décision qui n'est plus susceptible de recours, décliné la compétence de l'ordre de juridiction auquel elle appartient au motif que le litige ne ressortit pas à cet ordre, toute juridiction de l'autre ordre, saisie du même litige, si elle estime que ledit litige ressortit à l'ordre de juridiction primitivement saisi, doit, par un jugement motivé qui n'est susceptible d'aucun recours, même en cassation, renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ainsi soulevée et surseoir à toute procédure jusqu'à la décision de ce tribunal" ;

Considérant qu'en rejetant la requête de l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE (ESAT) DE GIEL et de son assureur, au motif que les conclusions des requérants étaient portées devant une juridiction incompétente pour en connaître alors que, comme il a été dit, le juge judiciaire saisi du même litige avait, par une décision devenue définitive, décliné la compétence de son ordre juridictionnel la cour administrative de Nantes a méconnu les dispositions susrappelées de l'article 34 et commis ainsi une erreur de droit ; que ce moyen, seul invoqué par les requérants, justifie en tout état de cause l'annulation de l'arrêt attaqué ; qu'il y a lieu, par suite, de prononcer cette annulation ;
Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant que l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE DE GIEL et la société MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD font appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leurs demandes tendant à ce que l'Etat les garantisse de toutes condamnations prononcées à leur encontre en réparation des préjudices subis par M. X... et à l'annulation des décisions préfectorales refusant d'accorder cette garantie ; que de telles conclusions, qui sont étrangères à l'application du régime d'indemnisation des accidents du travail agricole, ressortissent à la seule compétence du juge administratif ;
Considérant qu'à l'appui de leurs conclusions tendant à la condamnation de l'Etat, l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE DE GIEL et la société MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD n'invoquent aucune disposition légale, ni aucune stipulation du contrat d'association conclu avec l'Etat par cet établissement d'enseignement, qui mettrait à la charge de l'Etat le remboursement des indemnités versées à M. X... en vertu de la qualité d'employeur reconnue à l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE (ESAT) DE GIEL par les juridictions judiciaires, seules compétentes pour connaître du litige relatif à l'application du régime d'indemnisation des accidents du travail agricole ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leurs demandes ;
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE DE GIEL et à la MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD la somme qu'ils demandent au titre des sommes exposées par eux et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 30 décembre 1998 est annulé.
Article 2 : La requête d'appel et le surplus des conclusions de la requête devant le Conseil d'Etat de l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE (ESAT) DE GIEL, de la société MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ETABLISSEMENT SECONDAIRE AGRICOLE ET TECHNIQUE (ESAT) DE GIEL, à la MUTUELLE DU MANS ASSURANCES IARD et au ministre de l'agriculture et de la pêche.


Synthèse
Formation : 8 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 206267
Date de la décision : 28/05/2001
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

ENSEIGNEMENT - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFERENTES CATEGORIES D'ENSEIGNEMENT - ENSEIGNEMENT TECHNIQUE ET PROFESSIONNEL.

ENSEIGNEMENT - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFERENTES CATEGORIES D'ENSEIGNEMENT - ENSEIGNEMENT TECHNIQUE ET PROFESSIONNEL - ACCIDENTS SURVENUS AUX ELEVES.


Références :

Code de justice administrative L821-2, L761-1
Code de la sécurité sociale L452-1, L452-3
Code rural 1145, 1149
Décret du 26 octobre 1849 art. 34
Décret 60-728 du 25 juillet 1960 art. 6


Publications
Proposition de citation : CE, 28 mai. 2001, n° 206267
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sauron
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:206267.20010528
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