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30/05/2001 | FRANCE | N°214004

France | France, Conseil d'État, 5 ss, 30 mai 2001, 214004


Vu la requête, enregistrée le 2 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 12 août 1999 en tant que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a, à la demande de M. Dragoslav Z..., 1°° annulé pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 janvier 1999 par lequel le PREFET DE POLICE a décidé qu'il serait reconduit à la frontière, 2°° a condamné l'Etat à lui verser 2 000 F au titre des frais non compris dans les dé

pens ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Z... devant le magistrat d...

Vu la requête, enregistrée le 2 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 12 août 1999 en tant que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a, à la demande de M. Dragoslav Z..., 1°° annulé pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 janvier 1999 par lequel le PREFET DE POLICE a décidé qu'il serait reconduit à la frontière, 2°° a condamné l'Etat à lui verser 2 000 F au titre des frais non compris dans les dépens ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Z... devant le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 42-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Sanson, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Z..., ressortissant yougoslave né en 1974, est entré sur le territoire national le 13 août 1997 ; que s'il fait valoir qu'il rejoignait ses père et mère arrivés en France depuis 1991 et qui bénéficiaient d'un titre de séjour provisoire, il ressort des pièces du dossier que M. Z... est entré en France alors qu'il était déjà majeur, qu'il est célibataire, qu'il a vécu plusieurs années éloigné de ses parents et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que, dans ces circonstances, l'arrêté du 12 janvier 1999 décidant la reconduite à la frontière de M. Z... n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ces conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ; qu'ainsi le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le premier juge a retenu ce motif pour annuler son arrêté du 12 janvier 1999 ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ... 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un mois à compter de la date de la notification du refus ou du retrait" ;
Considérant que M. Z... s'est maintenu en France plus d'un mois après que lui a été notifiée la décision en date du 20 octobre 1998 lui refusant l'admission exceptionnelle au séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans un des cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le PREFET DE POLICE pouvait légalement ordonner sa reconduite à la frontière ;
Considérant, en premier lieu, que pour contester la légalité de l'arrêté du préfet décidant sa reconduite à la frontière, M. Z... invoque par voie d'exception l'illégalité de la décision du 20 octobre 1998 lui refusant l'admission exceptionnelle au séjour ;

Considérant que M. Yves Y..., attaché principal d'administration centrale, chef du 5ème bureau de la direction de la police générale, qui a signé la décision de refus de séjour, bénéficiait d'une délégation de signature du PREFET DE POLICE, en date du 22 juin 1998, régulièrement publiée au Bulletin officiel de la Ville de Paris le 3 juillet 1998, à l'effet notamment de signer les décisions de refus de titre et autorisations de séjour des étrangers ; que le PREFET DE POLICE n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour mentionnée à l'article 12 ter de l'ordonnance du 2 novembre 1945 pour refuser un titre de séjour à M. Z... qui ne relève d'aucune des catégories mentionnées dans l'article 12 bis de l'ordonnance susmentionnée ; que, dans les circonstances de l'espèce et eu égard notamment à la durée et des conditions de séjour de M. Z... en France, la décision de refus de titre de séjour du PREFET DE POLICE en date du 20 octobre 1998 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'elle n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que ladite décision soit entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. Jean-Pierre X..., sous-directeur de l'administration des étrangers, qui a signé l'arrêté de reconduite contesté, bénéficiait d'une délégation de signature du PREFET DE POLICE, en date du 22 juin 1998, régulièrement publiée au Bulletin officiel de la Ville de Paris le 3 juillet 1998, à l'effet notamment de signer les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers ; qu'ainsi le moyen tiré d'une incompétence du signataire de l'arrêté du 12 janvier 1999 manque en fait ;
Considérant, en troisième lieu que, dans les termes dans lesquels il est rédigé, l'arrêté de reconduite du 12 janvier 1999 comprend une décision distincte autorisant la reconduite de M. Z... vers son pays d'origine ; que si l'intéressé invoque des troubles dans son pays et le risque qu'il soit mobilisé en cas de retour, ces éléments ne sont pas de nature dans les circonstances de l'espèce, à faire obstacle à l'exécution de la mesure de reconduite à la frontière dans son pays d'origine ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 12 janvier 1999 décidant la reconduite à la frontière de M. Z... ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6-1 de la loi du 16 juillet 1980 modifiée : "Lorsqu'il règle un litige au fond par une décision qui implique nécessairement une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le Conseil d'Etat, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure et peut assortir sa décision d'une astreinte à compter d'une date qu'il détermine" ;

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions de M. Z... tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 mai 1997, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte sont irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. Z... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement en date du 12 août 1999 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande de M. Z... devant le tribunal administratif de Paris, ensemble les conclusions qu'il a présentées devant le Conseil d'Etat sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Dragoslav Z... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5 ss
Numéro d'arrêt : 214004
Date de la décision : 30/05/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 28 mai 1997
Arrêté du 22 juin 1998
Arrêté du 20 octobre 1998
Arrêté du 12 janvier 1999
Code de justice administrative L761-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Loi du 16 juillet 1980 art. 6-1
Ordonnance 42-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 12 ter, art. 12 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 30 mai. 2001, n° 214004
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sanson
Rapporteur public ?: M. Chauvaux

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:214004.20010530
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