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13/06/2001 | FRANCE | N°233478

France | France, Conseil d'État, 5 ss, 13 juin 2001, 233478


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 et 17 mai 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Jacques X..., demeurant ... en France (95850) ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 20 avril 2001, par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, en application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 29 janvier 2001 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré quatre point

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 et 17 mai 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Jacques X..., demeurant ... en France (95850) ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 20 avril 2001, par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, en application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 29 janvier 2001 par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré quatre points de son permis de conduire et constaté la perte de validité de ce titre ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu le code de justice administrative et notamment son livre V ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Aladjidi, Auditeur,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : "Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision" ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 11-3 du code de la route applicable au moment des faits : "Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions mentionnées à l'article L. 11-1 a été relevée à son encontre, il est informé de la perte de points qu'il est susceptible d'encourir, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. Ces mentions figurent sur le formulaire qui lui est communiqué" ; que ces dispositions sont reprises et précisées à l'article R. 258 du même code, applicable au moment des faits, aux termes duquel : "Lors de la constatation d'une infraction, l'auteur de celle-ci est informé que cette infraction est susceptible d'entraîner la perte d'un certain nombre de points si elle est constatée par le paiement d'une amende forfaitaire ou par une condamnation devenue définitive. Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des pertes et reconstitution de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis par l'agent verbalisateur ou communiqué par les services de police ou de gendarmerie. ( ...) Lorsque le ministre de l'intérieur constate que la réalité d'une infraction entraînant une perte de points est établie dans les conditions prévues par les alinéas 2 et 3 de l'article L. 11-1, il réduit en conséquence le nombre de points affectés au permis de conduire de l'auteur de cette infraction et en informe ce dernier par lettre simple ( ...)" ; que l'information prévue aux articles précités du code de la route constitue une formalité substantielle dont l'accomplissement, qui constitue une garantie essentielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre d'en contester la réalité et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis, conditionne la régularité de la procédure suivie et, partant, la légalité du retrait de points ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés qu'à l'appui de sa demande de suspension de l'exécution de la décision du 29 janvier 2001, par laquelle le ministre de l'intérieur l'a informé qu'il avait fait l'objet de trois retraits de quatre points pour dépassements de la vitesse autorisée et qu'en conséquence son permis de conduire avait perdu sa validité, M. X... a soutenu devant le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qu'il n'avait pas reçu, lors du constat des infractions relevées, l'information prévue aux articles L. 11-3 et R. 258 du code de la route alors applicables ; que pour juger que ce moyen n'était pas propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la légalité de la décision du ministre de l'intérieur, le juge des référés s'est fondé sur la circonstance que ladite décision "a rappelé l'ensemble des infractions commises par l'intéressé dont la réalité a été constatée par des jugements de tribunaux de police devenus définitifs, jugements antérieurs à la décision de retrait" ; qu'en jugeant ainsi que l'obligation d'information préalable imposée à l'administration par les articles L. 11-3 et R. 258 du code de la route alors applicables, pouvait être remplie par le rappel, au moment de la notification de la décision portant retraits de points, des infractions commises justifiant ces retraits, l'ordonnance attaquée est entachée d'une erreur de droit ; qu'il suit de là que, M. X... est fondé à en demander l'annulation ;
Considérant qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de statuer sur la demande de suspension présentée par M. X... ;
Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que l'exécution de la décision du 29 janvier 2001 par laquelle le ministre de l'intérieur a informé le requérant de la perte de validité de son permis de conduire porterait une atteinte grave et immédiate à l'exercice par l'intéressé de sa profession de chauffeur de taxi ; que, dès lors, eu égard aux conséquences qu'aurait l'exécution de cette décision sur l'activité professionnelle de M. X... et alors que sa suspension n'est pas, dans les circonstances de l'espèce, inconciliable avec les exigences de la sécurité routière, la condition d'urgence fixée à l'article L. 521-1 du code de justice administrative est remplie ;
Considérant, d'autre part, que le ministre de l'intérieur, à qui il appartient de prouver par tout moyen qu'il a satisfait à l'obligation d'information prévue par les articles L. 11-3 et R. 258 du code de la route, alors applicables, n'a produit pour les infractions relevées à l'encontre du requérant aucun élément de preuve en ce sens, ni devant le premier juge, ni devant le Conseil d'Etat ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'irrégularité de procédure dont serait entachée la décision retirant à M. X... des points de son permis de conduire et l'informant que ce titre a perdu sa validité, est propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à sa légalité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à demander la suspension de l'exécution de la décision du 29 janvier 2001, par laquelle le ministre de l'intérieur a retiré quatre points de son permis de conduire et constaté la perte de validité de ce titre ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 5 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'ordonnance du 20 avril 2001 du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulée.
Article 2 : L'exécution de la décision du 29 janvier 2001, par laquelle le ministre de l'intérieur a informé M. X... qu'il avait fait l'objet de trois retraits de quatre points pour dépassements de vitesse et que son permis de conduire avait perdu sa validité est suspendue jusqu'à ce qu'il ait été statué au fond sur sa demande d'annulation de cette décision.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 5 000 F à M. X... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Jacques X... et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

POLICE ADMINISTRATIVE - POLICE GENERALE - CIRCULATION ET STATIONNEMENT - PERMIS DE CONDUIRE - RETRAIT.

PROCEDURE - PROCEDURES D'URGENCE.


Références :

Code de justice administrative L521-1, L821-2, L761-1
Code de la route L11-3, R258


Publications
Proposition de citation: CE, 13 jui. 2001, n° 233478
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Aladjidi
Rapporteur public ?: M. Olson

Origine de la décision
Formation : 5 ss
Date de la décision : 13/06/2001
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 233478
Numéro NOR : CETATEXT000008023271 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2001-06-13;233478 ?
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