La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/07/2001 | FRANCE | N°228558

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 06 juillet 2001, 228558


Vu la requête, enregistrée le 27 décembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE-MARNE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 23 novembre 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté préfectoral du 10 novembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Tahra Y... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la déclaration universelle des droits de l'homme ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifié

e ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance p...

Vu la requête, enregistrée le 27 décembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE-MARNE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 23 novembre 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté préfectoral du 10 novembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Tahra Y... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la déclaration universelle des droits de l'homme ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. de la Ménardière, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Y..., de nationalité marocaine, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 5 juillet 1999, de la décision du 19 mai 1999 par laquelle le PREFET DU VAL-DE-MARNE a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a invitée à quitter le territoire ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider de la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ( ...) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus" ;
Considérant que Mlle Y..., qui soutient être entrée en France en 1994, fait valoir que ses liens avec sa famille résidant au Maroc ont été rompus depuis la naissance, en France, de sa fille en avril 1998 et invoque la présence en France de sa s.ur, mariée à un ressortissant français ; qu'il ressort toutefois des pièces que Mlle Y... n'est pas dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine où résident ses parents et neuf de ses frères et s.urs ; que la circonstance qu'elle est mère célibataire ne suffit pas à établir qu'elle serait dans l'impossibilité d'emmener avec elle sa fille au Maroc ; que, par suite, eu égard aux circonstances de l'espèce et à supposer même que sa résidence ininterrompue en France depuis 1994 soit établie, la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des dispositions précitées du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant que si Mlle Y... fait valoir qu'elle séjourne en France depuis 1994, qu'elle y travaille comme employée de maison, qu'elle dispose d'une promesse d'embauche, que sa fille est inscrite à l'école et que sa situation de mère célibataire la placerait en grande difficulté en cas de retour au Maroc, ces circonstances ne suffisent pas à établir que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de reconduite sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant, dès lors, que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun s'est fondé sur ce double motif pour annuler l'arrêté du 10 novembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Y... ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle Y... tant devant le Conseil d'Etat qu'en première instance ;
Considérant que, par arrêté du 1er juillet 1998 régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, Mme X..., secrétaire général de la préfecture du Val-de-Marne, a reçu délégation de signature à effet de signer, notamment, les arrêtés de reconduite à la frontière ; que, par suite, le moyen tiré de ce que Mme X... était incompétente pour signer l'arrêté du 10 novembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Y... doit être écarté ;
Considérant que si Mlle Y... allègue que sa fille serait de nationalité française, elle n'assortit pas ses allégations de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ;
Considérant enfin que Mlle Y... ne saurait invoquer utilement les stipulations de la déclaration universelle des droits de l'homme, qui n'a pas été ratifiée dans les conditions fixées par l'article 55 de la Constitution ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU VAL-DE-MARNE est fondé à demander l'annulation du jugement du 23 novembre 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 10 novembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Y... ;
Article 1er : Le jugement du 23 novembre 2000 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun annulant l'arrêté du 10 novembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Y... est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mlle Y... devant le tribunal administratif de Melun est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-DE-MARNE, à Mlle Tahra Y... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 228558
Date de la décision : 06/07/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 01 juillet 1998
Arrêté du 10 novembre 2000
Constitution du 04 octobre 1958 art. 55
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 12 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 06 jui. 2001, n° 228558
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. de la Ménardière
Rapporteur public ?: Mlle Fombeur

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:228558.20010706
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award