Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 9 juin 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 31 mai 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Rachel X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle A. Robineau, Auditeur,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de Mlle Rachel Luisa X...,
- les conclusions de M. Seners, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Rachel Luisa X..., qui est de nationalité camerounaise, s'est maintenue sur le territoire national plus d'un mois à compter de la notification, le 7 mars 2000, de la décision par laquelle le PREFET DU VAL-D'OISE a refusé de lui délivrer un titre de séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Rachel X... est née en France, qu'elle y a résidé et y a été scolarisée jusqu'à l'âge de sept ans, avant de suivre son père au Cameroun ; qu'à la date de l'arrêté décidant sa reconduite à la frontière le 31 mai 2000, la requérante séjournait à nouveau sur le territoire national depuis près de trois ans, et y poursuivait assidûment ses études en vue de l'obtention du baccalauréat général, aux épreuves duquel elle était convoquée du 14 au 19 juin 2000 ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le PREFET DU VAL-D'OISE a commis une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur la situation personnelle de l'intéressée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 31 mai 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Rachel X... ;
Sur les conclusions relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 : "L'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner, dans les conditions prévues à l'article 75, la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à une somme au titre des frais que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Il peut, en cas de condamnation, renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre le recouvrement à son profit de la somme allouée par le juge" et qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 76 de la même loi : "Les bureaux d'aide juridictionnelle se prononcent dans les conditions prévues par les textes en vigueur à la date à laquelle les demandes ont été présentées et les admissions produisent les effets attachés à ces textes ( ...)" ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Vier-Barthélemy, avocat de Mlle X..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de condamner l'Etat à payer à la SCP Vier-Barthélemy la somme de 10 000 F ;
Article 1er : La requête du PREFET DU VAL-D'OISE est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à la SCP Vier-Barthélemy la somme de 10 000 F en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-D'OISE, à Mlle Rachel Luisa X... et au ministre de l'intérieur.