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25/07/2001 | FRANCE | N°231319

France | France, Conseil d'État, 7 / 5 ssr, 25 juillet 2001, 231319


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 14 mars et 28 mars 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET, dont le siège est à la mairie de Lalbenque, rue du Marché aux Truffes à Lalbenque (46230) représenté par son président en exercice ; le SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 26 février 2001 par laquelle le président du tribunal administratif de Toulouse, statuant en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, a ordonné

la suspension de la procédure de délégation du service public d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 14 mars et 28 mars 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET, dont le siège est à la mairie de Lalbenque, rue du Marché aux Truffes à Lalbenque (46230) représenté par son président en exercice ; le SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 26 février 2001 par laquelle le président du tribunal administratif de Toulouse, statuant en application de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, a ordonné la suspension de la procédure de délégation du service public de distribution d'eau potable et en a ordonné la reprise dans des conditions respectant les obligations de publicité et de mise en concurrence ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Lenica, Auditeur,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET et de la SCP Coutard, Mayer, avocat de la société SAUR France, Direction générale du Sud-Ouest.
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : "Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics et des conventions de délégation de service public. ( ...)/ Il peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou l'exécution de toute décision qui s'y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations. Dès qu'il est saisi, il peut enjoindre de différer la signature du contrat jusqu'au terme de la procédure et pour une durée maximum de vingt jours ( ...)" ; qu'aux termes de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales : "Les délégations de service public des personnes morales de droit public relevant du présent code sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat./ ( ...) La collectivité adresse à chacun des candidats un document définissant les caractéristiques quantitatives et qualitatives des prestations ainsi que, s'il y a lieu, les conditions de tarification du service rendu à l'usager./ Les offres ainsi présentées sont librement négociées par l'autorité responsable de la personne publique délégante qui, au terme de ces négociations, choisit le délégataire" ;
Considérant que, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 551-1 du code de justice administrative, la société d'aménagement urbain et rural (SAUR) a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse de suspendre la procédure de passation du contrat d'affermage par lequel le SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET prévoit de déléguer l'exploitation et l'entretien de son réseau de distribution d'eau potable ; que, par une ordonnance du 26 février 2001, le juge des référés, après avoir enjoint au syndicat de différer la signature du contrat, a suspendu la procédure de passation et ordonné au syndicat de la reprendre "en examinant objectivement et sans a priori les mérites de l'offre de la société SAUR en concurrence avec ceux de l'offre de la société Lyonnaise des eaux" ; que le syndicat demande l'annulation de cette ordonnance ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aucune disposition législative ni réglementaire ne prévoit que le document mentionné à l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales doit comporter un règlement de consultation dont les dispositions seraient seules obligatoires, à l'exclusion de toute autre indication figurant dans d'autres pièces du dossier remis aux entreprises candidates ; qu'ainsi, en estimant que des mentions figurant en dehors du règlement de consultation édicté par le syndicat, en particulier dans les documents annexes décrivant les caractéristiques des prestations que devait assurer le délégataire, ne pouvaient pas compléter régulièrement les prescriptions de ce règlement, le juge des référés a commis une erreur de droit ; que la société SAUR est, par suite, fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de statuer sur la demande de référé présentée au tribunal administratif ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande présentée par la société SAUR devant le juge du référé précontractuel :
Considérant que l'avis d'appel public à la concurrence publié par le SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET en vue d'affermer son réseau de distribution d'eau potable indiquait que les candidats devaient fournir leurs références en matière d'exploitation de stations de traitement par ultrafiltration ; qu'ainsi, le moyen présenté par la SAUR et tiré de ce que le syndicat aurait commis un manquement aux obligations de publicité qui pesaient sur lui en ne mentionnant pas que l'objet de la délégation comportait l'exploitation d'une telle station manque en fait ;
Considérant que, si l'avis d'appel public à la concurrence ne mentionnait pas la durée de la convention envisagée, cette information figurait dans le dossier de consultation remis à l'ensemble des candidats ayant répondu à l'avis ; que l'absence de précision sur ce point de l'avis, levée dès la première phase de consultation, n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu de la durée envisagée de 12 ans, habituelle pour ce type de délégation, entaché d'irrégularité la procédure de passation du contrat ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les trois candidats ayant répondu à l'avis d'appel à la concurrence, dont la société SAUR, ont été admis à présenter une offre ; qu'ainsi la circonstance que la liste des candidats admis à présenter une offre a été dressée par la commission d'ouverture des plis n'a pu, dans les circonstances de l'espèce, exercer aucune influence sur la régularité de la procédure suivie ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commission d'ouverture des plis a fondé la préférence qu'elle a exprimée pour la candidature de la Lyonnaise des Eaux sur trois motifs tirés du caractère incomplet de la formule de révision du tarif de base proposé par la société SAUR, du niveau plus élevé des tarifs proposés par cette dernière et de l'absence de présentation distincte dans l'offre de la société SAUR des coûts d'exploitation de la station d'ultrafiltration dont l'entrée en service était prévue en cours de contrat, sans qu'il ressorte de l'analyse du procès-verbal de sa réunion que la commission ait également entendu fonder son avis sur l'absence de présentation par la société SAUR d'offre en variante prenant en compte les coûts de cette station ; qu'en retenant ces trois motifs, dont aucun n'est erroné en droit, la commission n'a entaché la procédure de passation d'aucune irrégularité ;
Considérant qu'il n'appartient pas au juge statuant selon la procédure prévue à l'article L. 551-1 du code de justice administrative d'examiner l'appréciation portée par le président du SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET à l'issue de la consultation sur les mérites respectifs de chacun des candidats ; qu'ainsi le moyen présenté par la société SAUR et tiré de ce que le président du syndicat aurait fait état de la qualité de la prestation fournie par la Lyonnaise des Eaux au cours de l'accomplissement du précédent contrat en vertu duquel l'exploitation du réseau de distribution d'eau potable géré par le syndicat lui était confié est inopérant ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de la société SAUR tendant à la suspension et à la reprise dans le respect des conditions de publicité et de mise en concurrence de la procédure de passation de la délégation de service public envisagée par le SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET doit être rejetée ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des frais exposés par les parties et non compris dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens" ; que ces dispositions font obstacle à ce que le SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la société SAUR la somme de 20 000 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire droit à la demande du SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET tendant à ce que la société SAUR soit condamnée à lui verser la somme de 18 000 F au titre des frais qu'il a exposés ;
Article 1er : L'ordonnance du 26 février 2001 du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse est annulée.
Article 2 : La demande présentée par la société SAUR devant le tribunal administratif de Toulouse et tendant à ce que la procédure de délégation de service public lancée par le SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET soit reprise et ses conclusions tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.
Article 3 : La société SAUR est condamnée à payer au SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET la somme de 18 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT DES EAUX DE L'IFFERNET, à la société SAUR et à la société Lyonnaise des Eaux.


Synthèse
Formation : 7 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 231319
Date de la décision : 25/07/2001
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Référé

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FORMATION DES CONTRATS ET MARCHES - FORMALITES DE PUBLICITE ET DE MISE EN CONCURRENCE - Délégations de service public des collectivités territoriales - Informations relatives aux caractéristiques des prestations et aux conditions de tarification du service devant être communiquées aux candidats (article L - 1411-1 du CGCT) - Obligation de faire figurer ces indications dans le règlement de consultation - à l'exclusion de tout autre pièce du dossier remis aux candidats - Absence.

39-02-005, 39-02-02-01 Aux termes de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales : "Les délégations de service public des personnes morales de droit public relevant du présent code sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat./ (...) La collectivité adresse à chacun des candidats un document définissant les caractéristiques quantitatives et qualitatives des prestations ainsi que, s'il y a lieu, les conditions de tarification du service rendu à l'usager./ Les offres ainsi présentées sont librement négociées par l'autorité responsable de la personne publique délégante qui, au terme de ces négociations, choisit le délégataire". Aucune disposition législative ni réglementaire ne prévoit que le document mentionné à l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales doit comporter un règlement de consultation dont les dispositions seraient seules obligatoires, à l'exclusion de toute autre indication figurant dans d'autres pièces du dossier remis aux entreprises candidates. Des mentions figurant en dehors du règlement de consultation, en particulier dans les documents annexes décrivant les caractéristiques des prestations que doit assurer le délégataire, peuvent régulièrement compléter les prescriptions de ce règlement.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FORMATION DES CONTRATS ET MARCHES - MODE DE PASSATION DES CONTRATS - DELEGATIONS DE SERVICE PUBLIC - Délégations de service public des collectivités territoriales - Formalités de publicité et de mise en concurrence - Informations relatives aux caractéristiques des prestations et aux conditions de tarification du service devant être communiquées aux candidats (article L - 1411-1 du CGCT) - Obligation de faire figurer ces indications dans le règlement de consultation - à l'exclusion de tout autre pièce du dossier remis aux candidats - Absence.


Références :

Code de justice administrative L551-1, L821-2, L761-1
Code général des collectivités territoriales L1411-1


Publications
Proposition de citation : CE, 25 jui. 2001, n° 231319
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Aubin
Rapporteur ?: M. Lenica
Rapporteur public ?: M. Piveteau

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:231319.20010725
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