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27/07/2001 | FRANCE | N°211759

France | France, Conseil d'État, 9 / 10 ssr, 27 juillet 2001, 211759


Vu le recours, enregistré le 23 août 1999 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 29 juin 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son appel d'un jugement du 23 juillet 1996 par lequel le tribunal administratif de Dijon a accordé à la S.A. Stirn International, dont le siège est Z.I. d'Aillant-sur-Tholon (89110), la décharge des intérêts de retard dont avait été assortie la cotisation supplémentaire de taxe profession

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Vu le recours, enregistré le 23 août 1999 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 29 juin 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son appel d'un jugement du 23 juillet 1996 par lequel le tribunal administratif de Dijon a accordé à la S.A. Stirn International, dont le siège est Z.I. d'Aillant-sur-Tholon (89110), la décharge des intérêts de retard dont avait été assortie la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1990 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la S.A. Stirn International,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité du recours :
Considérant que la fin de non-recevoir tirée par la S.A. Stirn International d'un défaut de qualité du signataire du recours introduit devant le Conseil d'Etat le 23 août 1999 ne peut, en tout état de cause, qu'être écartée, dès lors que les mémoires ultérieurs qu'a présentés le ministre au soutien des conclusions du pourvoi ont été signés par Mme X..., à qui délégation a régulièrement été donnée pour ce faire, en ses qualités de "premier conseiller de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, affectée en qualité d'administratrice civile" à la direction générale des impôts, par décret du 6 juillet 1999 ;
Sur l'arrêt attaqué :
Considérant que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté le recours formé par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE contre le jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a accordé à la S.A. Stirn International la décharge des intérêts de retard dont l'administration avait assorti la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle cette société a été assujettie au titre de l'année 1990 en conséquence d'un rehaussement des bases ressortant de la déclaration qu'elle avait souscrite ainsi que le prescrit l'article 1477 du code général des impôts ; que, pour statuer en ce sens, la cour administrative d'appel, après avoir infirmé le motif retenu par les premiers juges, et tiré de ce que les intérêts litigieux n'avaient pu être légalement liquidés sur le fondement des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, a fait droit au moyen tiré par la société, sous le bénéfice des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de ce qu'elle ne serait entrée dans aucun des cas d'application des intérêts de retard limitativement définis dans l'instruction 13 N-3-88 publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôts du 6 mai 1988 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : "Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. - Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente" ; qu'il résulte de ces dispositions et en particulier, de la référence faite à un "rehaussement d'impositions", que le droit qu'elles reconnaissent au contribuable, de se prévaloir, à l'encontre de l'administration, de l'interprétation donnée par celle-ci d'un texte fiscal, a pour seul objet de lui permettre de contester le bien-fondé d'une imposition à l'établissement de laquelle l'administration a procédé en faisant usage de ses pouvoirs de contrôle et de reprise, et ne peut, en revanche, fonder une contestation du bien-fondé propre des intérêts de retard ou majorations dont a été assortie cette imposition ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, par suite, est fondé à soutenir que la cour administrative d'appel a méconnu le champ d'application des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, et que l'arrêt attaqué doit, par ce motif, qui est d'ordre public, être annulé ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821-2, premier alinéa, du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : "1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 ... 2. Le décompte de l'intérêt de retard est arrêté au dernier jour du mois de la notification de redressement ou, en cas d'échelonnement des impositions supplémentaires, au dernier jour du mois au cours duquel le rôle doit être mis en recouvrement ..." ; que sont mentionnés au 1 de l'article 1728 tous déclarations ou actes "comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts" et qu'est tenue de souscrire ou de présenter une personne physique ou morale ; que les dispositions précitées de l'article 1729, par suite, sont applicables aux cotisations supplémentaires de taxe professionnelle mises à la charge d'un redevable en conséquence d'un rehaussement des bases insuffisantes, inexactes ou incomplètes que faisait apparaître la déclaration par lui souscrite en conformité des prescriptions de l'article 1477 du code général des impôts ; que, lorsque ces cotisations supplémentaires, dont l'établissement n'est soumis par le livre des procédures fiscales à aucune règle de procédure, n'ont pas fait l'objet, de la part de l'administration, d'une information préalable du redevable, assimilable à la "notification de redressement" mentionnée au 2 de l'article 1729, et que l'intéressé n'en est avisé que lors de leur mise en recouvrement, le décompte des intérêts de retard légalement dus doit être arrêté au dernier jour du mois au cours duquel est, par voie de rôle, effectué ce recouvrement ; qu'il suit de là que, comme le soutient le ministre appelant, c'est à tort que, pour décharger la S.A. Stirn International des intérêts de retard ajoutés au rappel de taxe professionnelle dont elle a fait l'objet, et décomptés jusqu'au dernier jour du mois de mars 1993, au cours duquel une lettre l'informant des rehaussements apportés aux bases ressortant de sa déclaration lui a été adressée par le vérificateur, le tribunal administratif s'est fondé sur l'inapplicabilité des règles de décompte prévues au 2 de l'article 1729 "à défaut de l'envoi d'une notification de redressement", s'agissant d'une imposition soustraite par l'article L. 56 du livre des procédures fiscales aux règles de la procédure de redressement contradictoire ;

Considérant, toutefois, qu'en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, il y a lieu d'examiner les autres moyens soulevés par la S.A. Stirn International au soutien de sa demande en décharge des intérêts de retard litigieux ;
Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la S.A. Stirn International ne peut, en tout état de cause, utilement invoquer, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, l'interprétation que, selon elle, comporterait, quant à l'application des intérêts de retard, l'instruction 13 N-3-88 du 6 mai 1988 ; qu'en outre, contrairement à ce qu'elle prétend, en se prévalant des dispositions de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983, ladite instruction n'exclut pas l'application des intérêts de retard en matière de taxe professionnelle ;
Considérant, en deuxième lieu, que la mise à la charge d'un contribuable d'intérêts de retard, qui ne constituent pas une sanction au sens de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, n'est pas au nombre des décisions qui doivent, en vertu dudit article, être motivées et, par suite, en application de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983, ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé ait été mis à même de présenter des observations écrites ;
Considérant, enfin, que les moyens tirés de lacunes qui affecteraient les mentions portées sur l'avis d'imposition adressé à la société consécutivement à l'établissement du rôle sont, en tout état de cause, inopérants au soutien d'une contestation ressortissant au contentieux de l'assiette ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement qu'il critique, le tribunal administratif a accordé à la S.A. Stirn International la décharge des intérêts de retard litigieux ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à la S.A. Stirn International la somme que celle-ci demande en remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 29 juin 1999 et le jugement du tribunal administratif de Dijon du 23 juillet 1996 sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de la S.A. Stirn International tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à la S.A. Stirn International.


Synthèse
Formation : 9 / 10 ssr
Numéro d'arrêt : 211759
Date de la décision : 27/07/2001
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - AMENDES - PENALITES - MAJORATIONS - INTERETS POUR RETARD.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE.


Références :

CGI 1477, 1729, 1728
CGI Livre des procédures fiscales L80 A, L56
Code de justice administrative L821-2, L761-1
Décret du 06 juillet 1999
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 1, art. 8
Instruction du 06 mai 1988
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 1


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2001, n° 211759
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Fabre
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:211759.20010727
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