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27/07/2001 | FRANCE | N°225204

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 27 juillet 2001, 225204


Vu la requête, enregistrée le 22 septembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 29 juin 2000 en tant que par ce jugement le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 20 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... en tant qu'il fixe le pays à destination duquel il doit être reconduit et qu'il condamne l'Etat à verser à M. X... une somme de 6 000 F en

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Vu la requête, enregistrée le 22 septembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 29 juin 2000 en tant que par ce jugement le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 20 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... en tant qu'il fixe le pays à destination duquel il doit être reconduit et qu'il condamne l'Etat à verser à M. X... une somme de 6 000 F en application de l'article L. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris dirigée contre la décision fixant le pays de destination et tendant à l'application de l'article L. 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Dayan, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité turque, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 28 mars 2000 de l'arrêté du 20 mars 2000 par lequel le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que pour annuler l'arrêté en tant qu'il fixe la Turquie comme pays de destination de la reconduite à la frontière de M. X..., le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la méconnaissance de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 aux termes duquel : "Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacés ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950" ; que, toutefois, si M. X... a fait valoir qu'il est d'origine kurde et de religion alevite, que sa cousine a été exécutée pour des raisons politiques et que son frère a obtenu le statut de réfugié, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, dont la demande d'admission au statut de réfugié a, d'ailleurs, été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la commission de recours des réfugiés, n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité des risques que comporterait pour lui son retour dans son pays d'origine ; qu'il suit de là que c'est à tort que le conseiller délégué s'est fondé sur le motif susmentionné pour annuler par jugement du 29 juin 2000 l'arrêté en date du 20 mars 2000 du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS en ce qu'il ordonnait la reconduite de M. X... à destination de la Turquie ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant que l'arrêté attaqué énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;

Considérant que si M. X... fait valoir qu'il vit en France depuis cinq ans et que sa vie y est organisée, il ressort des pièces du dossier que son épouse et ses enfants sont demeurés en Turquie ; qu'ainsi, compte tenu des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué décidant la reconduite à la frontière n'a pas porté aux droits de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté de reconduite pour l'exécution duquel a été prise la décision contestée méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il fixe la Turquie comme pays de renvoi et qu'il condamne l'Etat à verser à M. X... la somme de 6 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 29 juin 2000 est annulé en tant qu'il fixe la Turquie comme pays de renvoi et condamne l'Etat à verser à M. X... une somme de 6 000 F en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 2 : La demande de M. X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, à M. Ibrahim Halil X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 4 ss
Numéro d'arrêt : 225204
Date de la décision : 27/07/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 20 mars 2000
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 27 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2001, n° 225204
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Dayan
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:225204.20010727
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