La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/09/2001 | FRANCE | N°215873

France | France, Conseil d'État, 5 ss, 05 septembre 2001, 215873


Vu la requête, enregistrée le 30 décembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande l'annulation du jugement en date du 2 octobre 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé, pour excès de pouvoir, son arrêté du 10 novembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de X... Rosa Ines Z..., épouse Y... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu

la convention de New York relative aux droits de l'enfant ;
Vu l'ordonnanc...

Vu la requête, enregistrée le 30 décembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande l'annulation du jugement en date du 2 octobre 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé, pour excès de pouvoir, son arrêté du 10 novembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de X... Rosa Ines Z..., épouse Y... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention de New York relative aux droits de l'enfant ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946, modifié, réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu l'arrêté interministériel du 10 avril 1984 relatif aux conditions d'entrée des étrangers sur le territoire métropolitain et dans les départements d'outre-mer français ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Fabre-Aubrespy, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Z..., ressortissante colombienne, née en 1947 à Segovia (Colombie), s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 6 juillet 1998, de la décision du PREFET DE POLICE en date du 2 juillet 1998, rejetant sa demande d'admission exceptionnelle au séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas visé au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant que Mme Z..., entrée en France en 1988, à l'âge de 41 ans, fait état de ses liens familiaux avec son fils, qui réside régulièrement en France, et son petit-fils, de nationalité française, vivant en France et dont elle s'occupe ; que son père et son mari sont morts et qu'elle soutient sans être contredite qu'elle n'a plus d'attache dans son pays depuis leur décès ; que, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu notamment de la durée et des conditions d'intégration de Mme Z... en France, l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 10 novembre 1998 a porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, cet arrêté a méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 10 novembre 1998 ;
Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à X... Rosa Ines Z..., épouse Y... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5 ss
Numéro d'arrêt : 215873
Date de la décision : 05/09/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03-02-02 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE - LEGALITE INTERNE - DROIT AU RESPECT DE LA VIE FAMILIALE


Références :

Arrêté du 10 novembre 1998
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 05 sep. 2001, n° 215873
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Fabre-Aubrespy
Rapporteur public ?: M. Chauvaux

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:215873.20010905
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award