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05/09/2001 | FRANCE | N°221439

France | France, Conseil d'État, 10 ss, 05 septembre 2001, 221439


Vu la requête, enregistrée le 24 mai 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 17 mars 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 18 décembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Maya X... et condamné l'Etat à lui verser la somme de 2 000 F au titre de l'article 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2°) rejette la demand

e présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Paris ;
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Vu la requête, enregistrée le 24 mai 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 17 mars 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 18 décembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Maya X... et condamné l'Etat à lui verser la somme de 2 000 F au titre de l'article 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2°) rejette la demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. du Marais, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà d'un délai d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X..., de nationalité mauricienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 28 juillet 1998, de l'arrêté du 15 juillet 1998 par lequel le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour confirmé sur recours hiérarchique le 4 novembre 1998 ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que pour décider par son jugement du 17 mars 2000, que l'arrêté du 18 décembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X... avait porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur l'ancienneté de la présence en France de Mlle X... et sur les liens familiaux qu'elle y justifie ;
Considérant toutefois qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, que si Mlle X... fait valoir qu'elle vit en concubinage depuis 1995 avec un ressortissant français, leur vie commune ait été, à la date de la décision attaquée, aussi longue et continue qu'elle le soutient ; qu'il n'est pas contesté que la mère de l'intéressée réside au Liban et que Mlle X... s'est rendue dans ce pays à plusieurs reprises pour lui rendre visite ; qu'il n'est pas non plus contesté que le père de l'intéressée réside à Maurice ; qu'il résulte de tout ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté du 18 décembre 1998 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle X... devant le tribunal administratif de Paris et devant le Conseil d'Etat ;
Sur l'exception d'illégalité de la décision du 15 juillet 1998 refusant à Mlle X... un titre de séjour :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient Mlle X..., la décision du 4 novembre 1998 confirmant sur recours hiérarchique la décision du 15 juillet 1998 lui refusant un titre de séjour a été signée par Mme Liliane Y..., titulaire d'une délégation de signature régulièrement publiée ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus" ; que contrairement à ce que soutient Mlle X... et pour les motifs rappelés ci-dessus, la décision refusant un titre de séjour à Mlle X... n'a pas porté au droit de celle-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ... 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire" ; que si Mlle X... invoque le traitement contre la stérilité qu'elle suit en France, il ressort des pièces du dossier que le PREFET DE POLICE a pu légalement refuser un titre de séjour à Mlle X... sans méconnaître les dispositions précitées ;
Sur les autres moyens :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient Mlle X..., l'arrêté du 18 décembre 1998 a été signé par M. Z..., titulaire d'une délégation de signature régulièrement publiée ;
Considérant que si Mlle X... invoque l'existence d'une promesse d'embauche, sa bonne intégration dans la société française, l'absence de menace qu'elle ferait courir à l'ordre public et le traitement médical contre la stérilité qu'elle suit, il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DE POLICE ait fait une appréciation manifestement erronée des conséquences de l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X... sur la situation personnelle de celle-ci ;
Considérant que si Mlle X... invoque son mariage, le 27 mai 2000, avec le ressortissant français avec lequel elle soutient vivre en concubinage depuis 1995, cette circonstance postérieure à la décision attaquée, est sans influence sur la légalité de celle-ci ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 18 décembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle X... ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 17 mars 2000 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mlle Maya X..., épouse Charvet et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 10 ss
Numéro d'arrêt : 221439
Date de la décision : 05/09/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03-02 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE - LEGALITE INTERNE


Références :

Arrêté du 15 juillet 1998
Arrêté du 18 décembre 1998
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 12 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 05 sep. 2001, n° 221439
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. du Marais
Rapporteur public ?: Mme Maugüé

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:221439.20010905
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