Vu la requête, enregistrée le 29 novembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 3 octobre 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 novembre 1994 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Sunda X... ;
2°) de rejeter les conclusions présentées par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Hedary, Auditeur,
- les conclusions de M. Austry , Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant que Mme Sunda X..., de nationalité zaïroise, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 22 septembre 1994, de la décision du 20 septembre 1994 du préfet de police lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas visé au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que lorsqu'un arrêté de reconduite à la frontière a été dépourvu de mesure d'exécution pendant une durée anormalement longue, caractérisée par un changement de circonstances de fait ou de droit, et que ce retard est exclusivement imputable à l'administration, l'exécution d'office d'une reconduite à la frontière doit être regardée comme fondée non sur l'arrêté initial, même si celui-ci est devenu définitif faute d'avoir été contesté dans les délais, mais sur un nouvel arrêté de reconduite à la frontière dont l'existence est révélée par la mise en oeuvre de l'exécution d'office elle-même et qui doit être regardé comme s'étant substitué à l'arrêté initial ;
Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier que la notification de l'arrêté du 9 novembre 1994 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... a été envoyée à l'intéressé, par voie postale, à la dernière adresse qu'elle même avait déclarée ; que le pli a été retourné aux services préfectoraux avec la mention "non réclamé, retour à l'envoyeur" ; que Mme X... n'établit pas avoir informé l'autorité administrative d'un changement de résidence ni pris les mesures nécessaires pour que son courrier lui parvienne ; que, dans ces conditions, le retard mis à exécuter l'arrêté de reconduite à la frontière du 9 novembre 1994 ne peut être regardé comme exclusivement imputable à l'administration ; qu'ainsi, et alors même que près de six ans se sont écoulés, c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif a jugé que le préfet de police avait, en prenant des mesures propres à assurer l'exécution de son arrêté de reconduite après l'interpellation de Mme X... le 30 septembre 2000, pris une nouvelle décision de reconduite à la frontière susceptible de recours contentieux ; que le jugement attaqué s'est ainsi mépris sur la nature de la décision attaquée et doit, dès lors, être annulé sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête du PREFET DE POLICE ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris qui doivent être regardées comme dirigées non seulement contre l'arrêté du 1er octobre 2000 la plaçant en rétention administrative mais aussi contre l'arrêté du 9 novembre 1994 décidant sa reconduite à la frontière ;
Considérant que l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dispose que ne peut faire l'objet d'une reconduite à la frontière "l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi" ; que si Mme X... soutient qu'elle souffre d'une pathologie qui ne peut être soignée dans son pays et pour laquelle elle suit actuellement un traitement dans un établissement hospitalier, elle n'apporte à l'appui de ce moyen aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que, dès lors, elle n'est en tout état de cause pas fondée à soutenir que l'arrêté du 9 novembre 1994 ordonnant sa reconduite à la frontière serait intervenu en méconnaissance des dispositions précitées ; que la demande d'annulation de la décision la plaçant en rétention administrative n'est assortie d'aucun moyen ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le PREFET DE POLICE, la demande présentée par Mme X... doit être rejetée ;
Article 1er : Le jugement du 3 octobre 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mme Sunda X... et au ministre de l'intérieur.