Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 28 décembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Dubrosav Y..., demeurant ... de l'Escarène à Nice (06300) ; M. Y... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 décembre 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 décembre 2000 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé le pays de destination de la reconduite ;
2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : "Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale" ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la deuxième fille de M. Y... a été confiée, sur décision de l'autorité judiciaire, au service de l'aide sociale à l'enfance et à la famille du X... général des Alpes-Maritimes ; que le requérant a obtenu un droit de sortie en faveur de sa fille, droit dont il n'est pas contesté qu'il l'exerce régulièrement ; qu'il n'est pas contesté non plus que la mère de l'enfant est incarcérée ; que dans ces conditions, la décision du préfet de renvoyer M. Y... en Yougoslavie, qui a pour conséquence de le séparer, même provisoirement, de sa fille, porte atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant et doit être regardée comme contraire à l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Nice du 6 décembre 2000, ensemble l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 5 décembre 2000, sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Dubrosav Y..., au préfet des Alpes-Maritimes et au ministre de l'intérieur.