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24/10/2001 | FRANCE | N°222178

France | France, Conseil d'État, 1 / 2 ssr, 24 octobre 2001, 222178


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 juin et 18 octobre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT NATIONAL DES INFIRMIERS ANESTHESISTES, dont le siège est ..., représenté par son secrétaire général en exercice ; le SYNDICAT NATIONAL DES INFIRMIERS ANESTHESISTES demande au Conseil d'Etat :
1°) l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 2000-341 du 13 avril 2000 relatif à l'autorisation d'exercer la profession d'infirmier et modifiant le code de la santé publique (deuxième partie : décrets en

Conseil d'Etat) et de l'arrêté du ministre de l'emploi et de la solidar...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 juin et 18 octobre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT NATIONAL DES INFIRMIERS ANESTHESISTES, dont le siège est ..., représenté par son secrétaire général en exercice ; le SYNDICAT NATIONAL DES INFIRMIERS ANESTHESISTES demande au Conseil d'Etat :
1°) l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 2000-341 du 13 avril 2000 relatif à l'autorisation d'exercer la profession d'infirmier et modifiant le code de la santé publique (deuxième partie : décrets en Conseil d'Etat) et de l'arrêté du ministre de l'emploi et de la solidarité et du secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés du 13 avril 2000 relatif à l'autorisation d'exercer la profession d'infirmier ;
2°) la condamnation de l'Etat à lui verser la somme 20 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive n° 92/51/CEE du Conseil des communautés européennes du 18 juin 1992 relative à un deuxième système général de reconnaissance des formations professionnelles, qui complète la directive n° 89/48/CEE du 21 décembre 1988 ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 73-901 du 14 septembre 1973 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Boulouis, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du SYNDICAT NATIONAL DES INFIRMIERS ANESTHESISTES et de la société française d'anesthésie et de réanimation,
- les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;

Sur les interventions de la société française d'anesthésie et de réanimation et du comité d'entente des écoles d'infirmiers anesthésistes diplômés d'Etat :
Considérant que la société française d'anesthésie et de réanimation et le comité d'entente des écoles d'infirmiers anesthésistes diplômés d'Etat ont intérêt à l'annulation des actes attaqués ; qu'ainsi, leurs interventions sont recevables ;
Sur la légalité du décret attaqué :
Considérant qu'alors même que le décret du 14 septembre 1973 créant un conseil supérieur des professions paramédicales ni aucun autre texte n'imposait cette consultation, il ressort des pièces du dossier que ce conseil a examiné le projet de décret attaqué dans sa séance du 19 décembre 1999 ; que si ce conseil n'a pas approuvé le projet de décret à l'unanimité, cette circonstance n'est pas de nature à entacher la procédure suivie d'irrégularité ;
Considérant qu'en vertu de l'article L. 474 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi du 27 juillet 1999, sous réserve des dispositions des articles L. 474-2 et L. 477-1, nul ne peut exercer la profession d'infirmier s'il n'est muni d'un diplôme, certificat ou autre titre mentionné à l'article L. 474-1 ; que l'article L. 477-1, inséré au code de la santé publique par la loi précitée, dispose que : "Les ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, titulaires d'un diplôme, certificat ou autre titre délivré par l'autorité compétente d'un Etat membre ou d'un Etat partie, qui, sans remplir les conditions mentionnées à l'article L. 474-1, permet néanmoins l'exercice de la profession d'infirmier dans cet Etat, peuvent bénéficier d'une autorisation d'exercer la profession d'infirmier délivrée par l'autorité administrative./ Lorsque la formation de l'intéressé porte sur des matières substantiellement différentes de celles qui figurent au programme du diplôme d'Etat d'infirmier ou lorsqu'une ou plusieurs des activités professionnelles dont l'exercice est subordonné à la possession de ce diplôme ne sont pas réglementées dans l'Etat d'origine ou de provenance ou sont réglementées de manière différente, l'autorité administrative peut exiger, après avis d'une commission instituée à cet effet, que l'intéressé choisisse soit de se soumettre à une épreuve d'aptitude, soit d'accomplir un stage d'adaptation dont la durée ne peut excéder un an et qui fait l'objet d'une évaluation. Les conditions d'application du présent article sont précisées par décret" ;

Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 474-1 et L. 477-1 du code de la santé publique que le législateur a entendu permettre aux ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, titulaires d'un titre délivré par l'autorité compétente d'un Etat membre ou d'un Etat partie qui permet l'exercice de la profession d'infirmier dans cet Etat, d'exercer la profession d'infirmier en France après délivrance d'une autorisation administrative ; que les personnes entrant dans le champ desdites dispositions ne sont ainsi pas placées dans la même situation, au regard de l'objectif de cette mesure, que les ressortissants français souhaitant passer les épreuves d'admission à la profession d'infirmier ou permettant d'obtenir le certificat d'aptitude d'infirmier spécialisé en anesthésie-réanimation ; que, par suite, il ne peut être soutenu que le décret attaqué porterait une atteinte illégale au principe d'égalité en ce qu'il ne prévoirait pas une procédure identique pour l'accès à la profession d'infirmier des ressortissants français et pour les demandes d'autorisation des ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, notamment au regard de la composition des commissions intervenant dans chacune des deux procédures ;
Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 477-1 prévoient que l'intéressé soit soumis à une épreuve d'aptitude ou accomplisse un stage d'adaptation lorsque sa formation porte sur des matières substantiellement différentes de celles qui figurent au programme du diplôme d'Etat d'infirmier ou lorsqu'une ou plusieurs des activités professionnelles dont l'exercice est subordonné à la possession de ce diplôme ne sont pas réglementées dans l'Etat d'origine ou de provenance ou sont réglementées de manière différente ; que, dans ces hypothèses, la formation de l'intéressé doit être considérée comme insuffisante pour exercer la profession d'infirmier en France et lui impose de se soumettre à une épreuve d'aptitude ou d'accomplir un stage d'adaptation ; que, par suite, le décret attaqué n'est pas illégal en ce qu'il prévoit que, lorsque la formation d'un candidat a été jugée insuffisante dans certaines matières, l'épreuve consiste en un contrôle des connaissances portant sur celles-ci ; qu'il n'est pas non plus contraire aux dispositions de l'article L. 477-1 en ce qu'il limite les matières sur lesquelles porte le contrôle des connaissances à celles pour lesquelles la formation a été jugée insuffisante ;

Considérant que l'article 1er de la directive n° 92/51/CEE du Conseil des communautés européennes du 18 juin 1992 relative à un deuxième système général de reconnaissance des formations professionnelles, qui complète la directive n° 89/48/CEE du 21 décembre 1988, définit l'épreuve d'aptitude comme : "Un contrôle concernant exclusivement les connaissances professionnelles du demandeur, qui est effectué par les autorités compétentes de l'Etat membre d'accueil et qui a pour but d'apprécier l'aptitude du demandeur à exercer dans cet Etat membre une profession réglementée./ Pour permettre ce contrôle, les autorités compétentes établissent une liste des matières qui ( ...) ne sont pas couvertes par le ou les titres de formation dont le demandeur fait état. Ces matières peuvent couvrir tant des connaissances théoriques que des aptitudes de nature pratique, requises pour l'exercice de la profession./ L'épreuve d'aptitude ( ...) porte sur des matières à choisir parmi celles figurant sur la liste visée au deuxième alinéa et dont la connaissance est une condition essentielle pour pouvoir exercer la profession dans l'Etat membre d'accueil. Les modalités de l'épreuve d'aptitude sont déterminées par les autorités compétentes dudit Etat" ; qu'il ressort des dispositions claires de cette directive qu'elle laisse aux Etats membres le soin de définir les modalités de l'épreuve d'aptitude qu'elle prévoit et, en particulier, de charger l'autorité compétente d'établir, pour chaque demandeur, la liste des matières théoriques et pratiques sur lesquelles cette épreuve doit porter ; que le requérant ne saurait soutenir que le décret attaqué méconnaîtrait les objectifs de la directive en ne définissant pas lui-même lesdites matières ;
Considérant que l'article L. 477-1 du code de la santé publique n'imposait pas au décret attaqué de préciser les critères et les conditions dans lesquelles sont déterminées ces matières ;
Considérant que le décret attaqué fait obligation au préfet de région de statuer après qu'ait été vérifiée la capacité du demandeur au regard des exigences de la spécialité considérée ; qu'il n'a, par suite, pas conféré un pouvoir discrétionnaire au préfet en disposant que l'autorisation qu'il délivre "précise, le cas échéant, qu'elle est accordée pour l'exercice de la spécialité d'infirmier anesthésiste, d'infirmier de bloc opératoire ou d'infirmière puéricultrice" ;
Considérant que la composition de la commission chargée de donner un avis sur la demande d'autorisation n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions dirigées contre le décret du 13 avril 2000 relatif à l'autorisation d'exercer la profession d'infirmier doivent être rejetées ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué devrait être annulé par voie de conséquence de l'annulation du décret du 13 avril 2000 ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'aucune disposition n'imposait la consultation du comité supérieur des professions paramédicales sur le projet d'arrêté ;

Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 477-1 du code de la santé publique n'imposent pas, contrairement à ce qui est soutenu, que l'épreuve d'aptitude ou le stage d'adaptation porte sur l'ensemble des matières au programme des examens conduisant au diplôme d'Etat d'infirmier ; que l'arrêté attaqué n'est pas entaché d'illégalité en ce qu'il confie au jury le soin de déterminer le contenu des épreuves ou la nature du stage d'adaptation ;
Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité doit être écarté pour les mêmes motifs que précédemment ;
Considérant enfin que l'arrêté attaqué ne méconnaît ni les dispositions de l'article L. 477-1 du code de la santé publique ni celles du décret du 13 avril 2000 en ce qu'il permet au demandeur de l'autorisation d'exercer la profession d'infirmier en France de passer à nouveau les épreuves en cas d'échec ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 reprises à l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer au SYNDICAT NATIONAL DES INFIRMIERS ANESTHESISTES la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les interventions de la société française d'anesthésie et de réanimation et du comité d'entente des écoles d'infirmiers anesthésistes diplômés d'Etat sont admises.
Article 2 : La requête du SYNDICAT NATIONAL DES INFIRMIERS ANESTHESISTES est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT NATIONAL DES INFIRMIERS ANESTHESISTES, à la société française d'anesthésie et de réanimation, au comité d'entente des écoles d'infirmiers anesthésistes diplômés d'Etat et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 1 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 222178
Date de la décision : 24/10/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

PROFESSIONS AUTRES PROFESSIONS MEDICALES


Références :

Arrêté du 13 avril 2000
CEE Directive 89-48 du 21 décembre 1988
CEE Directive 92-51 du 18 juin 1992 Conseil art. 1
Code de justice administrative L761-1
Code de la santé publique L474, L474-1, L477-1
Décret du 19 décembre 1999
Décret 2000-341 du 13 avril 2000 décision attaquée confirmation
Décret 73-901 du 14 septembre 1973
Loi du 27 juillet 1999
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 24 oct. 2001, n° 222178
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Boulouis
Rapporteur public ?: Mlle Fombeur

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:222178.20011024
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