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07/11/2001 | FRANCE | N°230324

France | France, Conseil d'État, 07 novembre 2001, 230324


Vu la requête, enregistrée le 15 février 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Hassima Y..., demeurant chez M. X... Ferdi ... ; Mlle Y... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 15 décembre 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 octobre 1999 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière et fixé le pays de destination de la reconduite ;
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) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjo...

Vu la requête, enregistrée le 15 février 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Hassima Y..., demeurant chez M. X... Ferdi ... ; Mlle Y... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 15 décembre 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 octobre 1999 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière et fixé le pays de destination de la reconduite ;
2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention sur l'élimination de toutes les formes de discriminations à l'égard des femmes ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Y..., de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 6 avril 1999, de la décision du préfet de police du même jour, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mlle Y... ait présenté une demande d'asile territorial ;
Considérant que si Mlle Y... fait valoir qu'elle vit maritalement avec un compatriote en situation régulière et que sa soeur est installée en France, il ressort des pièces du dossier que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la brève durée du concubinage et des conditions du séjour en France de Mlle Y... et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, qui ne fait pas obstacle à ce que l'intéressée revienne en France dans des conditions régulières et ne crée à son détriment aucune discrimination, l'arrêté du préfet de police en date du 15 octobre 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Y... n'a pas porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée au buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, par suite, pas méconnu les stipulations des articles 8, 10 alinéa 1 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que la circonstance que Mlle Y... ne trouble pas l'ordre public est sans influence sur la légalité de l'arrêté attaqué ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination de la reconduite :
Considérant que si Mlle Y... fait valoir qu'elle a dû quitter l'Algérie car, en tant que femme titulaire d'une qualification professionnelle, membre d'une famille proche de l'islamisme, elle n'était pas libre d'aller et venir et de trouver un emploi, cette circonstance n'est, en tout état de cause, pas de nature à établir que la décision du préfet de police fixant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite créerait à son détriment une discrimination et méconnaîtrait les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que Mlle Y... ne saurait utilement invoquer les dispositions des articles 2-e, 3 et 15 de la convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes qui créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ;
Considérant que Mlle Y... ne saurait invoquer utilement les dispositions de la Déclaration universelle des droits de l'homme qui ne figure pas au nombre des textes diplomatiques ayant été ratifiés dans les conditions fixées par l'article 55 de la Constitution ;
Considérant que si Mlle Y... fait valoir qu'elle craint des menaces de la part des groupes islamistes en cas de retour dans son pays d'origine où son oncle a fait l'objet d'un attentat du fait de ces groupes, elle ne produit aucun document probant susceptible d'établir la réalité des faits allégués ; que, par suite, la décision fixant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle Y... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin de régularisation de la situation administrative de l'intéressée :
Considérant qu'en dehors du cas prévu par l'article L. 911-1 du code de justice administrative, dont les conditions d'application ne sont pas remplies en l'espèce, il n'appartient pas au juge administratif d'adresser des injonctions à l'administration ; qu'ainsi, les conclusions de Mlle Y... tendant à la régularisation de sa situation administrative doivent être rejetées ;
Article 1er : La requête de Mlle Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Hassima Y..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 230324
Date de la décision : 07/11/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 15 octobre 1999 art. 2
Code de justice administrative L911-1
Constitution du 04 octobre 1958 art. 55
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3, art. 8, art. 10, art. 14
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 07 nov. 2001, n° 230324
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: M. Austry

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:230324.20011107
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