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12/11/2001 | FRANCE | N°214325

France | France, Conseil d'État, 7 / 5 ssr, 12 novembre 2001, 214325


Vu la requête, enregistrée le 10 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Richard X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 10 septembre 1999 par laquelle le commissaire général de division, directeur central du commissariat de l'armée de terre, a rejeté ses recours hiérarchiques tendant à l'annulation des décisions des 6 et 7 mai 1999 par lesquelles le commandant du centre territorial d'administration et de comptabilité n° 331 de l'armée de terre à Bordeaux a, d'une part, rejeté sa demande tendant a

u paiement du supplément familial de l'indemnité de sujétion pour ser...

Vu la requête, enregistrée le 10 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Richard X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 10 septembre 1999 par laquelle le commissaire général de division, directeur central du commissariat de l'armée de terre, a rejeté ses recours hiérarchiques tendant à l'annulation des décisions des 6 et 7 mai 1999 par lesquelles le commandant du centre territorial d'administration et de comptabilité n° 331 de l'armée de terre à Bordeaux a, d'une part, rejeté sa demande tendant au paiement du supplément familial de l'indemnité de sujétion pour service à l'étranger à raison de son séjour en ex-Yougoslavie du 10 septembre 1998 au 2 avril 1999 et lui a, d'autre part, notifié un état exécutoire en vue du recouvrement de la somme de 8 674,44 F correspondant à un trop-perçu d'indemnité spéciale de sujétion pour service à l'étranger, ensemble ces décisions et cet état exécutoire ;
2°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 modifiée portant statut général des militaires ;
Vu le décret n° 67-290 du 28 mars 1967 modifié fixant les modalités de calcul des émoluments des personnels de l'Etat et des établissements publics de l'Etat à caractère administratif en service à l'étranger ;
Vu le décret n° 68-349 du 19 avril 1968 ;
Vu le décret n° 97-901 du 1er octobre 1997 relatif à la rémunération des militaires à solde mensuelle envoyés en opération extérieure ou en renfort temporaire à l'étranger ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Peylet, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Blanc, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que d'une part, par une décision du 6 mai 1999, le commandant du centre territorial d'administration et de comptabilité n° 331 de l'armée de terre a rejeté la demande que M. Richard X..., officier de carrière du corps des officiers des armes de l'armée de terre, avait adressée au directeur du commissariat de l'armée de terre en circonscription militaire de défense de Bordeaux et qui tendait au paiement, entre les mains de la mère de ses enfants, du supplément pour enfant à charge de l'indemnité de sujétions pour services à l'étranger ; que, d'autre part, par une décision du 7 mai 1999, cette même autorité a, au nom du directeur du commissariat de l'armée de terre en circonscription militaire de défense de Bordeaux, demandé à M. X... de rembourser une somme de 8 674,44 F correspondant à un trop perçu d'indemnité de sujétions pour service à l'étranger ; que, par une décision du 10 septembre 1999, le directeur central du commissariat de l'armée de terre a rejeté le recours hiérarchique que M. X... avait formé à l'encontre des décisions des 6 et 7 mai 1999 précitées ;
Sur le droit de M. X... au paiement du supplément pour enfant à charge de l'indemnité de sujétions pour service à l'étranger :
Considérant que l'article 2 du décret susvisé du 1er octobre 1997 prévoit que les militaires à solde mensuelle envoyés en opération extérieure ou en renfort temporaire à l'étranger perçoivent, lorsqu'ils sont à l'étranger, la solde de base, le supplément familial de solde, les primes et indemnités, auxquelles s'ajoutent une indemnité de sujétions pour service à l'étranger prenant en compte, le cas échéant, un supplément pour enfant à charge, ainsi que les prestations familiales perçues sur leur lieu d'affectation ; qu'il est spécifié à l'article 5 du même décret que ce supplément pour enfant à charge est fixé "en fonction du nombre et de l'âge des enfants à charge, dont la notion s'apprécie selon les critères retenus en France pour l'attribution des prestations familiales par les articles L 513-1 et L 521-2 du code de la sécurité sociale" et qu'il "est attribué sur une base annuelle au prorata du nombre de jours passés à l'étranger" ; qu'il résulte de ces dispositions que la circonstance que les enfants d'un militaire sont à la charge effective d'une autre personne ne peut avoir pour effet de priver ces enfants de tout ou partie de cet avantage pécuniaire ; que, toutefois, le supplément pour enfant à charge ne peut alors être versé du chef du parent militaire qu'entre les mains de la personne qui assure la charge effective de l'enfant ;

Considérant qu'à la suite du divorce des deux époux, les enfants de M. X... sont à la charge effective de leur mère, chez laquelle a été fixée leur résidence habituelle ; que, par suite, M. X... est fondé à demander l'annulation de la décision du 6 mai 1999 du commandant du centre territorial d'administration et de comptabilité n° 331 de l'armée de terre ainsi que de la décision du 10 septembre 1999 du directeur central du commissariat de l'armée de terre en tant qu'elles ont rejeté sa demande tendant au versement, entre les mains de la mère de ses enfants, du supplément pour enfant à charge de l'indemnité de sujétions pour service à l'étranger auquel il pouvait prétendre au profit de ces derniers ;
Sur la décision ordonnant le reversement d'un trop-perçu d'indemnité de sujétions pour services à l'étranger :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une décision du 2 mars 1999, le commissaire général Pierre Y..., directeur du commissariat de l'armée de terre en circonscription militaire de défense de Bordeaux, a donné délégation au colonel Z..., commandant le centre territorial d'administration et de comptabilité n° 331, et, en cas d'absence ou d'empêchement de celui-ci, au commandant A..., pour le recouvrement des trop-perçus inférieurs à 25 000 F, pour la France, ou à 40 000 F, pour l'outre-mer et l'étranger ; qu'il ne ressort pas des pièces versées au dossier que cette délégation ait été régulièrement publiée ; qu'ainsi, le commandant A..., s'il assurait bien l'intérim du colonel Z... du 3 au 7 mai 1999 en application d'une note de service du 25 avril 1999, n'avait pas compétence pour prendre la décision du 7 mai 1999 précitée ; qu'il en résulte que M. X... est fondé à demander l'annulation de cette décision ;
Considérant toutefois que le vice d'incompétence dont est entachée la décision du 7 mai 1999 du commandant du centre territorial d'administration et de comptabilité n° 331 n'entraîne pas nécessairement l'annulation de la décision expresse en date du 10 septembre 1999 par laquelle le directeur central du commissariat de l'armée de terre a rejeté, en justifiant le trop-perçu et en précisant ses modalités de calcul, le recours hiérarchique dont M. X... l'avait saisi ;

Considérant que, par un arrêté du 9 juin 1997 publié au Journal officiel du 17 juin 1997, modifié par un nouvel arrêté du 25 septembre 1998 publié au Journal Officiel le 3 octobre 1998, le commissaire général B..., chargé de la sous-direction de l'administration générale de la direction centrale du commissariat de l'armée de terre, a reçu du ministre de la défense délégation de signature pour l'ensemble des attributions de la sous-direction considérée ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu'il était incompétent pour signer la décision du 10 septembre 1999 doit être écarté ;
Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret du 1er octobre 1997 : "L'indemnité de sujétions pour service à l'étranger prévue par l'article 2 du présent décret est attribuée du jour inclus d'arrivée dans l'Etat étranger de séjour ou la zone d'opération au jour inclus du départ de cet Etat ou de cette zone" ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'indemnité de sujétions pour services à l'étranger est perçue par le militaire à solde mensuelle envoyé en opération extérieure ou en renfort temporaire uniquement lorsqu'il est à l'étranger ; que ces dispositions, qui n'ont ni pour objet ni pour effet de traiter différemment des personnes placées dans une même situation, ne méconnaissent pas le principe d'égalité ; qu'ainsi M. X... ne peut prétendre au bénéfice de ladite indemnité de sujétions pour services à l'étranger au titre de la période comprise entre le 22 décembre 1998 et le 3 janvier 1999 pendant laquelle il a été en permission en France ; que, par suite, c'est à bon droit que le directeur central du commissariat de l'armée de terre a rejeté le recours hiérarchique de M. X... et a demandé à celui-ci de rembourser la somme qui lui avait été indûment versée au titre de la période pendant laquelle il était en permission en France ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 10 septembre 1999 du ministre de la défense en tant que cette décision a rejeté le recours hiérarchique dirigé contre la décision du 7 mai 1999 du commandant du centre territorial d'administration et de comptabilité n° 331 ;
Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 15 000 F qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les décisions des 6 et 7 mai 1999 du commandant du centre territorial d'administration et de comptabilité n° 331 de l'armée de terre sont annulées.
Article 2 : La décision du 10 septembre 1999 du ministre de la défense est annulée en tant qu'elle a rejeté la demande de M. X... tendant au paiement du supplément pour enfant à charge de l'indemnité de sujétions pour service à l'étranger.
Article 3 : L'Etat est condamné à payer à M. X... la somme de 15 000 F au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Richard X... et au ministre de la défense.


Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

- RJ1 ARMEES - PERSONNELS DES ARMEES - QUESTIONS COMMUNES A L'ENSEMBLE DES PERSONNELS MILITAIRES - SOLDES ET AVANTAGES DIVERS - CAIndemnités de sujétions pour services à l'étranger - Supplément pour enfant à charge - Enfants à la charge effective d'une autre personne que le militaire - Conséquence - a) Privation de l'avantage pécuniaire - Absence - b) Versement entre les mains de la personne qui assure la charge effective des enfants - Existence (1).

08-01-01-06, 36-08-03 L'article 2 du décret du 1er octobre 1997, relatif à la rémunération des militaires à solde mensuelle envoyés en opération extérieure ou en renfort temporaire à l'étranger, prévoit que les militaires à solde mensuelle envoyés en opération extérieure ou en renfort temporaire à l'étranger perçoivent, lorsqu'ils sont à l'étranger, la solde de base, le supplément familial de solde, les primes et indemnités, auxquelles s'ajoutent une indemnité de sujétions pour service à l'étranger prenant en compte, le cas échéant, un supplément pour enfant à charge, ainsi que les prestations familiales perçues sur leur lieu d'affectation. Il est spécifié à l'article 5 du même décret que ce supplément pour enfant à charge est fixé "en fonction du nombre et de l'âge des enfants à charge, dont la notion s'apprécie selon les critères retenus en France pour l'attribution des prestations familiales par les articles L 513-1 et L 521-2 du code de la sécurité sociale" et qu'il "est attribué sur une base annuelle au prorata du nombre de jours passés à l'étranger (...)". a) Il résulte de ces dispositions que la circonstance que les enfants d'un militaire sont à la charge effective d'une autre personne ne peut avoir pour effet de priver ces enfants de tout ou partie de cet avantage pécuniaire. b) Toutefois, le supplément pour enfant à charge ne peut alors être versé du chef du parent militaire qu'entre les mains de la personne qui assure la charge effective de l'enfant.

- RJ1 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - REMUNERATION - INDEMNITES ET AVANTAGES DIVERS - CAMilitaires - Indemnité de sujétions pour services à l'étranger - Supplément pour enfant à charge Enfants à la charge effective d'une autre personne que le militaire - Conséquence - a) Privation de l'avantage pécuniaire - Absence - b) Versement entre les mains de la personne qui assure la charge effective des enfants (1).


Références :

Arrêté du 09 juin 1997
Arrêté du 25 septembre 1998
Code de justice administrative L761-1
Décret 97-901 du 01 octobre 1997 art. 2, art. 5, art. 7
Instruction du 02 mars 1999

1.

Rappr. CE 2001-10-24, M. X..., à publier.


Publications
Proposition de citation: CE, 12 nov. 2001, n° 214325
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: M. Peylet
Rapporteur public ?: Mme Bergeal

Origine de la décision
Formation : 7 / 5 ssr
Date de la décision : 12/11/2001
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 214325
Numéro NOR : CETATEXT000008031471 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2001-11-12;214325 ?
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