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21/11/2001 | FRANCE | N°219678

France | France, Conseil d'État, 3 ss, 21 novembre 2001, 219678


Vu la requête, enregistrée le 3 avril 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE qui demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 25 février 2000 en tant que, par ce jugement, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 15 février 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Mubenga Y... ;
2°) rejette la demande présentée devant ce tribunal par Mme Mubenga Y... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauveg

arde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45...

Vu la requête, enregistrée le 3 avril 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE qui demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 25 février 2000 en tant que, par ce jugement, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 15 février 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Mubenga Y... ;
2°) rejette la demande présentée devant ce tribunal par Mme Mubenga Y... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Hédary, Auditeur,
- les observations de Me Blondel, avocat de Mme Liliane X...
Y...,
- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Mubenga Y..., qui est de nationalité congolaise, s'est maintenue sur le territoire national plus d'un mois à compter de la notification, le 19 mai 1998, de l'arrêté du 11 mai 1998 par lequel le préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a invitée à quitter le territoire ; qu'à la suite des recours gracieux qu'elle a formés, cette décision a été confirmée en dernier lieu par la lettre du 3 décembre 1999 qui a été régulièrement notifiée le 6 décembre 1999 ; que Mme Mubenga Y... se trouvait ainsi, en tout état de cause, lorsqu'a été pris l'arrêté du 15 février 2000, dans le cas où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant que Mme Mubenga Y... fait valoir qu'elle s'est mariée en 1998 avec un compatriote titulaire d'une carte de résident et qu'elle a eu la même année un enfant qu'elle ne pourrait emmener dans son pays si elle devait le regagner ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressée, qui n'est entrée en France qu'en 1995, soit dépourvue d'attaches dans son pays et que si elle soutient ne pouvoir y emmener son enfant, elle n'apporte à cet égard pas de justification ; qu'en outre, son époux pourra demander le bénéfice du regroupement familial ; qu'ainsi, eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, et en particulier la brièveté de la vie commune des deux époux lorsqu'est intervenu l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Mubenga Y..., cet arrêté n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie familiale normale et n'a ainsi pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté du 15 février 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Mubenga Y... ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme Mubenga Y... devant le premier juge ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir opposée en première instance par le PREFET DU VAL D'OISE à la demande de Mme Mubenga Y... ;

Considérant que Mme Mubenga Y..., qui n'est entrée en France qu'en 1995 et ne s'est mariée que le 28 mars 1998 n'entrait pas, lorsque le préfet a refusé le 11 avril 1998 de lui délivrer un titre de séjour et lorsqu'il a confirmé ce refus à plusieurs reprises dans l'année qui a suivi, dans la catégorie des étrangers qui peuvent bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en application du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, dès lors, le PREFET DU VAL-D'OISE n'était pas tenu de saisir, en application de l'article 12 quater de la même ordonnance, la commission du titre de séjour ;
Considérant que si Mme Mubenga Y... soutient qu'elle serait exposée, en cas de retour au Congo, à des peines ou traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elle n'apporte pas de justificatifs de nature à établir la réalité des risques auxquels elle serait personnellement exposée et dont, d'ailleurs, ni l'office français de protection des réfugiés et apatrides ni la commission des recours des réfugiés n'ont reconnu l'existence ; que, dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision distincte fixant le pays dont elle a la nationalité comme destination de la reconduite méconnaîtrait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 15 février 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Mubenga Y... ;
Article 1er : Le jugement du 25 février 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il annule l'arrêté du 15 février 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Mubenga Z....
Article 2 : La demande de Mme Mubenga Z... tendant à l'annulation de l'arrêt du 15 février 2000 est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL D'OISE, à Mme Liliane X...
Z... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 ss
Numéro d'arrêt : 219678
Date de la décision : 21/11/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 11 mai 1998
Arrêté du 15 février 2000
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3, art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 12 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 21 nov. 2001, n° 219678
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mlle Hédary
Rapporteur public ?: M. Séners

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:219678.20011121
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