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03/12/2001 | FRANCE | N°229539

France | France, Conseil d'État, 1 / 2 ssr, 03 décembre 2001, 229539


Vu 1°), sous le n° 229539, la requête, enregistrée le 24 janvier 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS, dont le siège est ... ; la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les mesures déterminées par les caisses nationales d'assurance maladie en application de l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale concernant les médecins généralistes, les médecins spécialistes et les directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale et pub

liées au Journal officiel de la République française le 2 décembre 20...

Vu 1°), sous le n° 229539, la requête, enregistrée le 24 janvier 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS, dont le siège est ... ; la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les mesures déterminées par les caisses nationales d'assurance maladie en application de l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale concernant les médecins généralistes, les médecins spécialistes et les directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale et publiées au Journal officiel de la République française le 2 décembre 2000 ;
2°) d'annuler la décision implicite d'approbation de ces mesures par les ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé, de l'agriculture, de l'économie et du budget ;
3°) de condamner l'Etat, la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et la caisse centrale de mutualité sociale agricole à lui verser la somme de 40 000 F en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 2°), sous le n° 229837, la requête, enregistrée le 2 février 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le SYNDICAT DES BIOLOGISTES, dont le siège est ..., représenté par son président en exercice ; le SYNDICAT DES BIOLOGISTES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les mesures déterminées par les caisses nationales d'assurance maladie en application de l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale concernant les médecins spécialistes et les directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale et publiées au Journal officiel de la République française le 2 décembre 2000 ;
2°) d'annuler la décision implicite d'approbation de ces mesures par les ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé, de l'agriculture, de l'économie et du budget ;
3°) de condamner la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et la caisse centrale de mutualité sociale agricole à lui verser la somme de 10 000 F en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de la sécurité sociale, notamment ses articles L. 162-15-2 et L. 162-15-3 ;
Vu la loi n° 99-1140 du 29 décembre 1999 de financement de la sécurité sociale pour l'année 2000, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 99-422 DC du 21 décembre 1999 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Landais, Auditeur,
- les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS et du syndicat national des médecins biologistes et de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés et de la caisse centrale de la mutualité sociale agricole,

- les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n° 229539 de la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS et n° 229837 du SYNDICAT DES BIOLOGISTES sont dirigées contre tout ou partie des mesures déterminées en application de l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale, conjointement avec les syndicats professionnels ou unilatéralement, par la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et la caisse centrale de la mutualité sociale agricole, concernant les médecins généralistes, les médecins spécialistes et les directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale, et publiées au Journal officiel de la République française le 2 décembre 2000 ainsi que contre l'acte interministériel d'approbation de ces mesures ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par une seule décision ;
I. Sur la recevabilité des requêtes :
Considérant que dans la mesure où la réglementation relative aux directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale exige qu'ils soient titulaires d'un diplôme de médecin, de vétérinaire ou de pharmacien, la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS, qui a pour objet la représentation des intérêts de la profession de médecin, justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre les mesures concernant la profession de directeur de laboratoire d'analyses de biologie médicale ;
Considérant que le SYNDICAT DES BIOLOGISTES a pour objet la défense des intérêts de la profession des directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale ; que, par suite, ce syndicat ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre les mesures concernant les médecins généralistes ou spécialistes ; que les conclusions de ce syndicat dirigées contre ces mesures doivent être rejetées ;
Considérant que les caisses nationales d'assurance maladie se sont contentées, aux articles 3 et 5 des mesures concernant respectivement les directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale et les médecins spécialistes, d'annoncer leur intention de créer des fonds de modernisation et d'affecter à leur financement les économies réalisées sur les dépenses de l'année 2000 ; que, dès lors, ces articles sont dépourvus de caractère normatif ; que, par suite, les conclusions de la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS dirigées contre ces articles sont irrecevables et doivent être rejetées ;

Considérant que les invitations faites au pouvoir réglementaire de modifier la nomenclature générale des actes professionnels ou la nomenclature des actes de biologie médicale dans un sens favorable à la maîtrise des dépenses de santé ainsi que le projet d'élaboration d'un cahier des charges destiné à promouvoir le mécanisme du médecin généraliste référent sont dépourvus de tout caractère normatif ; que, par suite, les conclusions de la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS dirigées contre les articles 1er, 3 et 4 de l'annexe modificative à la convention nationale des médecins généralistes, contre l'article 2 des mesures concernant les directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale et contre les articles 3 et 4 des mesures concernant les médecins spécialistes sont irrecevables et doivent être écartées ;
Considérant que le syndicat national des médecins biologistes a intérêt à l'annulation des mesures concernant les directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale ; que, par suite, son intervention au soutien des conclusions de la requête de la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS est recevable en tant qu'elle est dirigée contre les mesures concernant les directeurs de laboratoires et l'acte d'approbation de ces mesures et dans la mesure où les conclusions de la confédération sont elles-mêmes recevables ;
II. Sur la légalité des mesures concernant les médecins généralistes, les médecins spécialistes et les directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale :

Considérant que l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'article 24 de la loi n° 99-1140 du 29 décembre 1999 de financement de la sécurité sociale pour l'année 2000, prévoit, en son I, que, dans le respect de l'objectif de dépenses déléguées, une annexe à la convention nationale conclue entre les caisses d'assurance maladie et les organisations syndicales représentant la profession de santé fixe chaque année, pour chacune des professions de santé exerçant en ville, l'objectif de dépenses de la profession, les tarifs des honoraires, rémunérations et frais accessoires ainsi que, le cas échéant, les mesures de toute nature propres à garantir le respect de l'objectif fixé ; que ce même article, en son II, prévoit que les parties à chacune des conventions assurent le suivi des dépenses, au moment de la fixation de l'objectif et au moins deux fois dans l'année et, lorsqu'elles constatent que l'évolution de ces dépenses n'est pas compatible avec le respect de l'objectif fixé, déterminent, en vertu du troisième alinéa de ce II, par une annexe modificative, les mesures de toute nature propres à garantir son respect ; que le quatrième alinéa du II de l'article L. 162-15-2 dispose qu'à défaut d'accord entre les parties conventionnelles ou en l'absence de convention, lorsque le montant des dépenses réalisées n'est manifestement pas de nature à permettre le respect de l'objectif fixé, ces mesures sont déterminées par la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et au moins une autre caisse, après consultation des syndicats représentatifs de la profession concernée ; que l'article L. 162-15-3 du même code énonce pour sa part que les caisses nationales d'assurance maladie transmettent trois fois dans l'année au Parlement et aux ministres concernés un rapport d'équilibre, accompagné, le cas échéant, des annexes modificatives et des mesures déterminées par les caisses nationales et prévues à l'article L. 162-15-2 ; que ces rapports d'équilibre, conformément aux dispositions de l'article L. 162-15-3 du code de la sécurité sociale et de l'arrêté du 16 février 2000 pris pour son application, doivent comporter les justifications des mesures déterminées par les caisses d'assurance maladie ; que le III de l'article L. 162-15-3 du code de la sécurité sociale prévoit que les annexes modificatives et les mesures déterminées par les caisses d'assurance maladie doivent être approuvées par les ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé, de l'agriculture, de l'économie et du budget ;
Considérant qu'en application des dispositions du troisième alinéa du II de l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale, la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, la caisse centrale de mutualité sociale agricole et la Fédération française des médecins généralistes MG France ont conclu une annexe modificative à la convention nationale des médecins généralistes ; que, sur le fondement des dispositions du quatrième alinéa du II du même article, les deux caisses susmentionnées ont déterminé des mesures de régulation des dépenses des médecins spécialistes et des directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale ; que ces mesures ont été publiées au Journal officiel de la République française le 2 décembre 2000 ;
En ce qui concerne la compétence des auteurs des mesures :

Considérant, en premier lieu, que la baisse de la cotation de la lettre-clé B, prévue à l'article 1er de la mesure concernant la profession des directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale a pour objet de contribuer au respect de l'objectif de dépenses de cette profession pour l'année 2000 ; qu'ainsi, elle figurait au nombre des actions que les dispositions de l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale autorisaient les caisses d'assurance maladie à prendre sans qu'y fasse obstacle la circonstance que ces caisses aient eu l'intention d'affecter un montant équivalent à celui des économies autorisées par cette mesure à un fonds de modernisation ; que, par suite, le moyen d'incompétence dirigé contre l'article 1er de la mesure concernant les directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions précitées du code de la sécurité sociale que le législateur a confié aux partenaires conventionnels ou, à défaut d'accord, aux caisses agissant unilatéralement le soin d'assurer un suivi infra-annuel des dépenses des professions de santé exerçant en ville et, le cas échéant, de prendre, au cours de l'année, les mesures correctives nécessaires au respect des objectifs de dépenses ; que, par suite, et dès lors que les mesures sont prises dans le but de contenir l'évolution des dépenses de l'année en cours, la circonstance qu'elles n'aient qu'un impact limité sur les dépenses de l'année considérée et aient un impact en année pleine sur l'année suivante n'en affecte pas la légalité ; que, dès lors, les moyens dirigés contre les mesures attaquées, notamment contre l'article 2 concernant les médecins spécialistes et contre l'article 1er concernant les directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale et tirés de l'incompétence dans le temps de leurs auteurs doivent être écartés ;
Considérant, en troisième lieu, que l'article 1er des mesures concernant les médecins spécialistes, qui supprime la référence aux gastro-entérologues dans le libellé de la nomenclature générale des actes professionnels concernant la lettre-clé Z1, a pour effet de rendre applicable à cette spécialité la lettre-clé Z3 ; qu'ainsi, cette mesure consiste en une modification de la cotation de la lettre-clé Z pour les médecins gastro-entérologues sur le fondement du b) du 3° du I de l'article L. 162-15-2 et non en une modification des libellés de la nomenclature, qui est de la compétence de l'autorité ministérielle ; que, par suite, le moyen dirigé contre l'article 1er de la mesure concernant les médecins spécialistes et tiré de l'incompétence de ses auteurs doit être écarté ;

Considérant, enfin, que l'article 2 de l'annexe modificative à la convention nationale des médecins généralistes prévoit une augmentation de la rémunération forfaitaire des médecins référents au 1er janvier 2001 ; que si l'effet financier direct d'une telle mesure porte sur la seule année 2001, l'annonce de la revalorisation conditionnelle de la rémunération des médecins référents a pour effet, dès le mois de décembre 2000 au début duquel elle intervient, d'inciter les médecins à remplir le rôle de médecin référent et, par voie de conséquence, de favoriser, dès ce mois, la mise en .uvre d'un mécanisme tendant à la rationalisation de l'accès aux soins et donc à un meilleur respect de l'objectif de dépenses ; que, par suite, les dispositions de l'article 2 de l'annexe modificative à la convention nationale des médecins généralistes figurent au nombre des mesures que les caisses nationales d'assurance maladie pouvaient prendre, sur le fondement de l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale, pour assurer le respect de l'objectif de dépenses des médecins généralistes pour l'année 2000 ; que le moyen tiré de l'incompétence des caisses doit donc être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'incompétence des auteurs des mesures attaquées doit être écarté en ses différentes branches ;
En ce qui concerne les autres moyens invoqués à l'encontre des mesures :
Quant à la procédure d'élaboration :
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les syndicats représentatifs des professions des médecins spécialistes et des directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale ont été invités à participer à des réunions de concertation qui se sont tenues, respectivement, les 20 et 24 octobre 2000 ; qu'ils ont par ailleurs disposé de dix jours pour faire connaître leurs observations après l'annonce, faite par lettre, des mesures que les caisses nationales d'assurance maladie avaient l'intention de prendre pour corriger l'évolution des dépenses ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les mesures attaquées n'auraient pas été précédées de la consultation prévue à l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les mesures attaquées, qui accompagnaient le rapport d'équilibre daté du 13 novembre 2000, ont été transmises au Parlement ainsi qu'aux ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé, de l'agriculture, de l'économie et du budget le 14 novembre 2000, conformément aux dispositions du II de l'article L. 162-15-3 du code de la sécurité sociale ; que le moyen tiré du défaut de transmission manque en fait ;
Quant au moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'approbation :

Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 162-15-3 précité : "Les annexes modificatives et, le cas échéant, les mesures déterminées par la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et au moins une autre caisse nationale d'assurance maladie au titre de l'article L. 162-15-2 font l'objet d'une approbation unique des ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé, de l'agriculture, de l'économie et du budget. Ces annexes sont réputées approuvées si les ministres n'ont pas fait connaître à la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, dans le délai de quinze jours à compter de leur réception, qu'ils s'opposent à leur approbation du fait de leur non-conformité aux lois et règlements en vigueur ou de leur incompatibilité avec le respect des objectifs de dépenses ou en raison des risques que leur application ferait courir à la santé publique ou à un égal accès aux soins. En cas d'opposition, la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés dispose d'un délai de dix jours pour revoir le contenu des annexes et les présenter à nouveau, dans les conditions fixées au 1er alinéa du I et au II ci-dessus, aux ministres compétents" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu soumettre au même régime d'approbation les annexes modificatives élaborées conjointement par les parties conventionnelles et les mesures prises unilatéralement par les caisses nationales d'assurance maladie ; que, par suite, lesdites mesures pouvaient faire l'objet d'une approbation tacite des ministres concernés ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que ces mesures seraient illégales faute d'avoir fait l'objet d'une approbation expresse doit, en tout état de cause, être écarté ;
Quant au moyen tiré de l'illégalité du rapport d'équilibre :
Considérant que si le rapport d'équilibre ne précise pas l'évaluation chiffrée des effets des mesures proposées sur l'année en cours, cette évaluation peut aisément se déduire de l'évaluation des effets des mesures en année pleine qui sont présentées dans le rapport dont s'agit ; qu'ainsi, les insuffisances de ce rapport au regard des prescriptions de l'arrêté du 16 février 2000 ne sont pas substantielles ; que, par suite, le moyen tiré de l'illégalité du rapport d'équilibre doit être écarté ;
Quant aux moyens tirés de ce que les mesures attaquées seraient fondées sur des données inexactes et contestables :
Considérant que la confédération requérante soutient que l'objectif de dépenses déléguées, les objectifs de dépenses par profession ainsi que l'estimation des dépenses des professions de santé sur les huit premiers mois de l'année seraient contestables et que cette circonstance entacherait d'illégalité les mesures attaquées, prises sur leur fondement ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 227-1 du code de la sécurité sociale : "Dans le respect des lois de financement de la sécurité sociale, l'autorité compétente de l'Etat conclut respectivement avec la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés, la caisse nationale des allocations familiales et l'agence centrale des organismes de sécurité sociale des conventions d'objectifs et de gestion comportant des engagements réciproques des signataires ( ...)./ Un avenant annuel à la convention d'objectifs et de gestion de la branche maladie du régime général détermine, en fonction de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie voté par le Parlement, l'objectif prévisionnel des dépenses de soins de ville et, en son sein, l'objectif de dépenses déléguées et précise les conditions et modalités de mise en oeuvre de ces objectifs" ; que l'article L. 162-15-2 du même code prévoit que les objectifs de dépenses par profession sont fixés dans le respect de l'objectif de dépenses déléguées susmentionné ;
Considérant que si la détermination, pour l'année 2000, de l'objectif de dépenses déléguées ainsi que des objectifs de dépenses par profession a fait l'objet d'un processus complexe qui a nécessité la reconstitution de bases de dépenses pour l'année 1999 et la prise en compte d'écarts entre estimations de dépenses évaluées à la date de leur remboursement et estimations de dépenses évaluées à la date des soins, il ressort des pièces du dossier, notamment des conclusions du rapport annuel d'activité du Conseil pour la transparence des statistiques de l'assurance maladie que la méthode retenue par le service statistique de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés pour élaborer ces objectifs a permis de réduire à leur strict minimum les approximations et marges d'incertitudes ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'objectif de dépenses déléguées et les objectifs de dépenses par profession seraient dénués de fiabilité doit être écarté ;
Considérant, en second lieu, que si l'évaluation des dépenses réalisées par les professions de santé au cours des huit premiers mois de l'année 2000 comporte une marge d'incertitude due au processus d'agrégation des dépenses de l'ensemble des régimes et au décalage existant entre dépenses réalisées et dépenses constatées au moment du remboursement par les caisses d'assurance maladie, il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport annuel d'activité précité que cette incertitude est en l'espèce très limitée et réduite à sa part inévitable ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'estimation des dépenses réalisées par les professions de santé au cours des huit premiers mois de l'année 2000 serait inexacte et de nature à entacher d'illégalité les mesures prises au vu de ces estimations doit être également écarté ;
Quant au moyen tiré de ce que l'évolution des dépenses de certaines professions n'était pas incompatible ou manifestement incompatible avec le respect de l'objectif fixé :

Considérant que l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale autorise les partenaires conventionnels à déterminer toute mesure propre à garantir le respect des objectifs de dépenses de la profession lorsque " l'évolution de ces dépenses n'est pas compatible avec le respect de l'objectif fixé " ; qu'en l'absence d'accord, ces mêmes dispositions autorisent les caisses nationales d'assurance maladie à prendre ces mesures unilatéralement lorsque " le montant des dépenses réalisées n'est manifestement pas de nature à permettre (ce) respect " ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la projection de la tendance d'évolution des dépenses de la profession des médecins généralistes sur les huit premiers mois de l'année laissait présumer un taux de progression atteignant 3,7 p. 100 à la fin de l'année alors que l'objectif avait été fixé à 1,3 p. 100 d'augmentation par rapport aux dépenses de l'année précédente ; que, s'agissant des médecins spécialistes, l'estimation de la progression en fin d'année s'établissait à 2,8 p. 100 pour un objectif fixé à 0,9 p. 100 ; qu'enfin, pour les directeurs de laboratoires, cette estimation s'élevait à 4,5 p.100 pour un objectif de stabilité des dépenses par rapport à l'année 1999 ;
Considérant, en deuxième lieu, et ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que les dépenses des professions de santé sur les huit premiers mois de l'année ont été correctement évaluées ; qu'il ressort des pièces du dossier que cette évaluation a pris en compte l'évolution des dépenses constatées postérieurement à l'intervention du premier rapport d'équilibre, fondé pour sa part sur les dépenses estimées des quatre premiers mois ; que les caisses nationales d'assurance maladie pouvaient légalement, pour respecter leur obligation légale de suivi infra-annuel des dépenses, estimer les dépenses attendues en fin d'année sur la base des dépenses évaluées sur les huit premiers mois ;
Considérant, en troisième lieu, que l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale fait obligation aux caisses d'assurance maladie d'apprécier si l'évolution infra-annuelle des dépenses réalisées est ou non de nature à permettre le respect des objectifs de dépenses fixés pour l'année ; qu'eu égard à cette obligation d'appréciation d'une tendance d'évolution des dépenses, les caisses d'assurance maladie étaient fondées à prendre en compte non pas les dépenses remboursées, qui reflètent le rythme de liquidation de ces dépenses par les caisses, mais les dépenses constatées à la date des soins ;
Considérant, enfin, qu'il ne résulte pas de la circonstance que les partenaires conventionnels aient prévu une revalorisation de la rémunération des médecins référents en 2001 que l'objectif de dépenses de la profession des médecins généralistes pour l'année 2000 était respecté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les caisses nationales d'assurance maladie, qui n'ont commis ni erreur de fait, ni erreur d'appréciation, ont pu légalement estimer, en premier lieu, que l'évolution des dépenses des médecins généralistes n'était pas compatible avec le respect de leur objectif de dépenses, en second lieu, que le montant des dépenses réalisées par les médecins spécialistes et les directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale n'était manifestement pas de nature à permettre le respect de leurs objectifs de dépenses respectifs ;
Quant au moyen tiré de ce que les mesures attaquées seraient contraires au principe d'égalité :
Considérant que la confédération requérante soutient que les mesures attaquées seraient contraires au principe d'égalité en ce qu'elles concerneraient seulement certains types d'actes médicaux, certaines professions de santé ou certaines disciplines de la médecine spécialiste ; que les médecins spécialistes ont fait l'objet de mesures correctives en août et en décembre alors que les infirmiers, les sages-femmes et les orthoptistes, dont le dépassement de l'objectif de dépenses est pourtant supérieur, n'ont pas fait l'objet de nouvelles mesures en décembre ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale que les mesures que cet article autorise les caisses nationales d'assurance maladie à prendre en cas de désaccord entre les partenaires conventionnels ont vocation à s'appliquer aux professionnels de santé concernés par l'augmentation excessive des dépenses, n'entraînent aucun reversement et n'exercent leurs effets que pour l'avenir ; que, par suite, ces mesures, dont l'objet est la régulation des dépenses, n'ont pas le caractère de sanctions collectives visant à réprimer des comportements individuels ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'eu égard à l'objectif de régulation des dépenses de santé posé par la loi, les caisses d'assurance maladie pouvaient légalement ne prendre des mesures qu'à l'égard des actes médicaux, des professions de santé ou des disciplines de la médecine spécialiste dont l'augmentation des dépenses était excessive au regard des objectifs de dépenses ;
Considérant, en troisième lieu, qu'en s'engageant dans des réformes structurelles de leurs pratiques négociées avec les caisses d'assurance maladie, certaines professions de santé, parmi lesquelles celle des infirmiers, ont mis en oeuvre des actions destinées à permettre une meilleure maîtrise de leurs dépenses de la nature de celles prévues au a) du 3° du I de l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale ; que l'intérêt général qui s'attache au développement de la négociation entre les caisses d'assurance maladie et les professions de santé en vue de la maîtrise des dépenses de santé justifiait que les caisses nationales d'assurance maladie réservent aux professions engagées dans des réformes structurelles négociées un traitement différent de celui appliqué aux professions de santé pour lesquelles des réformes de cette nature ne sont pas intervenues ;

Considérant, enfin, que si, en termes relatifs, le dépassement de l'objectif de dépenses des sages-femmes ou des orthoptistes est supérieur à celui constaté pour les médecins spécialistes, il ressort des pièces du dossier que les objectifs de dépenses des deux premières professions, prévus au I de l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale, ont été fixés respectivement à 382 et 265 millions de F, alors que l'objectif de dépenses pour les médecins spécialistes atteint 52,2 milliards de F ; que, dès lors, et eu égard à l'intérêt général qui s'attache à la maîtrise globale des dépenses des professions de santé exerçant en ville, les caisses d'assurance maladie pouvaient traiter différemment des professions de santé dont l'impact sur le volume global de dépenses varie dans de telles proportions ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la violation du principe d'égalité doit être écarté dans ses différentes branches ;
Quant au moyen dirigé contre l'article 1er de la mesure concernant les médecins spécialistes :
Considérant que le moyen tiré de ce que le rapport d'équilibre serait en contradiction avec les mesures proposées quant à la baisse de la cotation de la lettre-clé Z des médecins gastro-entérologues manque en fait ;
Quant aux moyens dirigés contre l'article 5 de l'annexe modificative à la convention nationale des médecins généralistes :
Considérant, en premier lieu, que la circonstance que les médecins spécialistes pratiquent également l'acte coté ZN à la nomenclature générale des actes professionnels n'interdisait pas que les caisses décident une baisse de la cotation de cette lettre-clé pour contenir l'évolution des dépenses des médecins généralistes ; que, dès lors, le moyen dirigé contre cette mesure et tiré de ce qu'elle ne serait pas de nature à garantir le respect de l'objectif de dépenses des médecins généralistes doit être écarté ;
Considérant, en second lieu, que les partenaires conventionnels n'étaient pas liés par l'indication, dans l'annexe annuelle à la convention nationale des médecins généralistes publiée le 20 avril 2000 au Journal officiel, de leur intention de faire porter en priorité d'éventuelles mesures correctives ultérieures sur l'indemnité de déplacement ; qu'ainsi, ils ont pu légalement, au vu des dépenses réalisées sur les premiers mois de l'année, agir de préférence sur la cotation des lettres-clés KE et ZN ; que le moyen tiré de ce que la baisse de cette cotation serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté ;
III. Sur la légalité de la décision ministérielle d'approbation tacite des mesures déterminées par les caisses d'assurance maladie unilatéralement ou conjointement avec la Fédération française des médecins généralistes MG France et publiées au Journal officiel de la République française le 2 décembre 2000 :
Considérant, en premier lieu, que les conclusions tendant à l'annulation des mesures ont été rejetées ; que les conclusions tendant à l'annulation, par voie de conséquence, de la décision qui les approuve, doivent être rejetées ;

Considérant, en second lieu, que si les requérants prétendent que les mesures attaquées comporteraient des risques pour la santé publique ou l'égal accès aux soins, ils n'apportent aucun commencement de justification à l'appui de cette affirmation ; que le moyen tiré de ce que la décision d'approbation serait illégale en ce qu'elle approuverait des mesures comportant de tels risques doit, dès lors, être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation des mesures publiées au Journal officiel du 2 décembre 2000 et de l'acte interministériel d'approbation de ces mesures ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés ou la caisse centrale de la mutualité sociale agricole, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, soient condamnés à payer aux requérants les sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS et le SYNDICAT DES BIOLOGISTES à verser respectivement la somme globale de 20 000 F (3 049 euros) et 10 000 F (1 524,50 euros) aux deux caisses d'assurance maladie susmentionnées ;
Article 1er : L'intervention du syndicat national des médecins biologistes n'est pas admise en tant qu'elle est dirigée contre les mesures concernant les directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale et leur acte d'approbation.
Article 2 : Les requêtes de la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS et du SYNDICAT DES BIOLOGISTES sont rejetées.
Article 3 : La CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS et le SYNDICAT DES BIOLOGISTES verseront respectivement la somme globale de 20 000 F (3 049 euros) et 10 000 F (1 524,50 euros) à la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et à la caisse centrale de la mutualité sociale agricole au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la CONFEDERATION DES SYNDICATS MEDICAUX FRANCAIS, au SYNDICAT DES BIOLOGISTES, au syndicat national des médecins biologistes, à la Fédération française des médecins généralistes, à la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, à la caisse centrale de la mutualité sociale agricole et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 1 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 229539
Date de la décision : 03/12/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

62-02-01,RJ1 SECURITE SOCIALE - RELATIONS AVEC LES PROFESSIONS ET LES ETABLISSEMENTS SANITAIRES - RELATIONS AVEC LES PROFESSIONS DE SANTE - Suivi infra-annuel des dépenses des professions de santé (art. L.162-15-2 du code de la sécurité sociale issu de la loi du 15 décembre 1999) - Pouvoir des caisses nationales d'assurance maladie pour déterminer des mesures coercitives concernant diverses professions de santé - Négociation d'annexes modificatives aux conventions nationales - a) Décisions susceptibles de recours pour excès de pouvoir - Existence, dès lors que les annexes ont été approuvées - b) Mesures pouvant être prises compétemment par les caisses et les syndicats - Existence - 1) Mesures n'ayant qu'un impact limité sur les dépenses de l'année considérée - 2) Mesures n'ayant d'effet financier que l'année suivante mais un effet incitatif dès l'année considérée.

62-02-01 Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, caisse centrale de mutualité sociale agricole et Fédération française des médecins généralistes MG France ayant conclu, en application des dispositions du troisième alinéa du II de l'article L. 162-15-2 du code de la sécurité sociale, une annexe modificative à la convention nationale des médecins généralistes en vue de déterminer les mesures propres à garantir le respect de l'objectif annuel de dépenses. Caisses en cause ayant, sur le fondement du quatrième alinéa du II du même article, déterminé des mesures de régulation des dépenses des médecins spécialistes et des directeurs de laboratoires d'analyses de biologie médicale. a) Une requête dirigée contre un avenant à une convention nationale est recevable dès lors que cet avenant a été approuvé (1). b) Peuvent être légalement prises par les caisses dans le cadre de la compétence qui leur est conférée par le II de l'article L.165-15-2 : 1) des mesures qui n'ont qu'un impact limité sur les dépenses de l'année considérée et ont un impact en année pleine sur l'année suivante, dès lors que ces mesures sont prises dans le but de contenir l'évolution des dépenses de l'année en cours. Tel est le cas d'une baisse de cotation entrant en vigueur au début du mois de décembre de l'année considérée. 2) des mesures qui, si elles sont dépourvues d'effet financiers directs sur l'année considérée, ont un effet incitatif dès l'année considérée. Tel est le cas d'une augmentation de la rémunération forfaitaire des médecins référents au 1er janvier de l'année suivante. Si l'effet financier direct d'une telle mesure porte sur cette seule année, l'annonce de la revalorisation conditionnelle de la rémunération des médecins référents a pour effet, dès le mois de décembre de l'année au cours de laquelle elle intervient, d'inciter les médecins à remplir le rôle de médecin référent et, par voie de conséquence, de favoriser, dès ce mois, la mise en oeuvre d'un mécanisme tendant à la rationalisation de l'accès aux soins et donc à un meilleur respect de l'objectif de dépenses.


Références :

Arrêté du 16 février 2000
Code de justice administrative L761-1
Code de la sécurité sociale L162-15-2, L162-15-3, L227-1
Loi 99-1140 du 29 décembre 1999 art. 24

1.

Cf. CE Sect. 1981-10-09, Syndicat des médecins de Haute-Loire et autres, p. 360 et Ass. 1996-07-10, X..., p. 274.


Publications
Proposition de citation : CE, 03 déc. 2001, n° 229539
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: Melle Landais
Rapporteur public ?: Mme Fombeur

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:229539.20011203
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