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10/12/2001 | FRANCE | N°216091

France | France, Conseil d'État, 5 / 7 ssr, 10 décembre 2001, 216091


Vu la requête, enregistrée le 7 janvier 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS (AP-HP), représentée par son directeur général en exercice, dont les bureaux sont situés ... ; l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt du 12 novembre 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Paris l'a, à la demande des consorts Y..., et après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Paris du 4 juillet 1997, condamnée à verser les sommes de 692 750 F à M.

Stéphane Y..., 90 000 F à Mme Véronique Y... et 30 000 F à Mme Marc...

Vu la requête, enregistrée le 7 janvier 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS (AP-HP), représentée par son directeur général en exercice, dont les bureaux sont situés ... ; l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt du 12 novembre 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Paris l'a, à la demande des consorts Y..., et après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Paris du 4 juillet 1997, condamnée à verser les sommes de 692 750 F à M. Stéphane Y..., 90 000 F à Mme Véronique Y... et 30 000 F à Mme Marcelle Y..., assorties des intérêts et de la capitalisation de ceux-ci, en réparation du préjudice qu'ils ont subi du fait de la contamination de M. Stéphane Y... par le virus de l'immunodéficience humaine ;
2°) rejette les demandes des consorts Y... ;
3°) condamne ceux-ci à lui verser solidairement la somme de 15 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de déontologie médicale ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Sanson, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Foussard, avocat de l'ASSISTANCE PUBLIQUE DES HOPITAUX DE PARIS et de Me Blanc, avocat de M. X... et autres,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par les consorts Y... :
Sur la régularité de l'arrêt attaqué :
Considérant que l'arrêt attaqué énonce les motifs de droit et de fait pour lesquels la responsabilité pour faute de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS est engagée à raison de la prescription à M. X..., qui souffrait d'hémophilie modérée, de produits sanguins concentrés non chauffés par les médecins de l'hôpital Antoine Béclère à Clamart, à l'occasion de son hospitalisation pour un hématome ; que, par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation doit être écarté ;
Sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'en jugeant que M. X... avait été contaminé par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) lors de plusieurs transfusions de produits sanguins concentrés pratiqués entre le 18 et le 20 septembre 1984 à l'hôpital Béclère, la Cour s'est livrée, sans les dénaturer, à une appréciation souveraine des faits et n'a pas entaché son arrêt d'une erreur de droit ;
Considérant qu'en jugeant que les centres de traitement des hémophiles de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS connaissaient, à la date à laquelle des produits sanguins ont été administrés à M. X..., l'existence d'un risque de contamination, pour les personnes atteintes d'hémophilie, par le virus du VIH par voie de transfusion sanguine, la Cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits qui, en l'absence de dénaturation, ne peut être discutée devant le juge de cassation ; qu'elle a également estimé, par une appréciation souveraine des faits, que les transfusions dont M. X... a fait l'objet à l'hôpital Béclère avaient un caractère occasionnel, qu'elles ne présentaient pas d'urgence et qu'eu égard, en outre, à l'hémophilie modérée dont le patient souffrait, des traitements de substitution à la prescription de produits sanguins concentrés étaient possibles ; qu'elle a pu déduire de ces constatations de fait, et sans qu'il y ait lieu de rechercher la responsabilité personnelle des médecins prescripteurs sur le fondement de manquements aux dispositions du code de déontologie médicale, qu'alors même que les risques liés aux transfusions de produits fractionnés et concentrés n'étaient pas encore connus dans toute leur ampleur et que la date des transfusions prescrites à M. X... entre le 18 et le 20 septembre 1984 est légèrement antérieure à la date du 22 novembre 1984 à partir de laquelle la responsabilité de l'Etat est engagée faute d'avoir interdit la délivrance de ces produits, le service médical hospitalier a fait courir à M. X... un risque injustifié engageant la responsabilité pour faute de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS ;
Considérant que la Cour n'a pas entaché son arrêt d'une insuffisance de motivation ni d'une erreur de droit en allouant à M. X... et aux consorts X... une indemnité globale d'un montant de deux millions de francs en réparation des troubles de toute nature subis par M. X... et en déduisant de cette somme le montant des indemnités reçues par ailleurs en réparation du même préjudice ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 12 novembre 1999 ;
Sur les conclusions de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS et des consorts X... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les consorts X..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, soient condamnés à payer à l'ASSISTANCE PUBLIQUEûHOPITAUX DE PARIS la somme que cet établissement public demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS à payer aux consorts X... la somme de 15 000 F que ceux-ci demandent au titre des frais de même nature qu'ils ont exposés ;
Article 1er : La requête de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS est rejetée.
Article 2 : L'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS versera conjointement à M. Stéphane X..., à Mme Véronique X... et à Mme Marcelle X... une somme de 15 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS, à M. Stéphane X..., à Mme Véronique X... et à Mme Marcelle X..., à la Caisse primaire d'assurance maladie de Paris et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 5 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 216091
Date de la décision : 10/12/2001
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITE POUR FAUTE SIMPLE : ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT DU SERVICE HOSPITALIER - EXISTENCE D'UNE FAUTE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE.


Références :

Code de justice administrative L761-1


Publications
Proposition de citation : CE, 10 déc. 2001, n° 216091
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sanson
Rapporteur public ?: M. Chauvaux

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:216091.20011210
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