Vu la requête, enregistrée le 27 décembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE-MARNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 juillet 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé pour excès de pouvoir son arrêté du 6 juillet 2000 par lequel il a décidé la reconduite à la frontière de M. X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Melun ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et notamment son article 8 ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Le Bihan-Graf, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département, et à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité tunisienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 23 décembre 1997, de la décision du même jour par laquelle le PREFET DU VAL-DE-MARNE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que M. X..., entré en France en 1988 et en situation irrégulière depuis l'expiration de son visa, a fait valoir qu'il vivait en concubinage avec une ressortissante française et que son état de santé l'obligeait à suivre un traitement médical prolongé ; que l'intéressé ne soutient cependant pas que ce traitement médical ne pourrait lui être dispensé en Tunisie ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions de séjour de M. X... en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, le PREFET DU VAL-DE-MARNE n'a pas commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé et n'a pas porté au droit de celui-ci au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels l'arrêté attaqué a été pris ; qu'ainsi, le PREFET DU VAL-DE-MARNE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun s'est fondé sur ces motifs pour annuler son arrêté décidant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif à l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X... tant devant le tribunal administratif que devant le Conseil d'Etat à l'encontre de l'arrêté attaqué ;
Considérant qu'aux termes de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 dans sa rédaction issue de l'avenant du 19 décembre 1991 : "Un titre de séjour d'une durée de dix ans est délivré de plein droit : a) Au conjoint tunisien d'un ressortissant français ... , f) Au ressortissant tunisien qui justifie par tous moyens avoir sa résidence habituelle en France depuis plus de quinze ans ou depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans ou qui est en situation régulière depuis plus de dix ans" ;
Considérant que M. X... fait valoir qu'il a épousé, postérieurement à la date de l'arrêté attaqué, une ressortissante française ; que cette circonstance, si elle est de nature, eu égard aux dispositions de l'article 10 de l'accord franco-tunisien précité, à faire obstacle à l'exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre, est cependant sans influence sur la légalité de cet acte ; Considérant qu'entré en France en 1988, l'intéressé y a séjourné en situation irrégulière depuis l'expiration de son visa touristique ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'il pouvait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en application des stipulations précitées, du fait de la durée de sa résidence ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-DE-MARNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté décidant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun en date du 20 juillet 2000 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Melun et tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 juillet 2000 ordonnant sa reconduite à la frontière est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-DE-MARNE, à M. X... et au ministre de l'intérieur.