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12/12/2001 | FRANCE | N°234495

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 12 décembre 2001, 234495


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 6 juin et 11 juillet 2001, présentés par M. Madioulé X..., demeurant ... ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 30 mars 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 18 octobre 2000 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu

les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des d...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 6 juin et 11 juillet 2001, présentés par M. Madioulé X..., demeurant ... ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 30 mars 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 18 octobre 2000 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dans sa rédaction issue de la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 : "L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification lorsque l'arrêté est notifié par voie administrative ou dans les sept jours lorsqu'il est notifié par voie postale, demander l'annulation de cet arrêté au président du tribunal administratif" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les débats parlementaires qui ont précédé leur adoption, que le délai de sept jours qu'elles instituent, bien qu'il s'agisse d'un délai de procédure, ne constitue pas un délai franc ; que, toutefois, lorsque ce délai expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il y a lieu, par application de l'article 642 du nouveau code de procédure civile, d'admettre la recevabilité d'un pourvoi présenté le premier jour ouvrable suivant ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté par lequel le préfet de police a ordonné la reconduite à la frontière de M. X... a été notifié par voie postale à l'intéressé le 25 octobre 2000 ; que le délai de sept jours prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 expirait ainsi le 1er novembre, jour de la Toussaint ; qu'ainsi, la demande de l'intéressé tendant à l'annulation de cet arrêté, qui a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Paris le 2 novembre 2000, était encore recevable ; que, par suite, M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 30 mars 2001, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté comme tardive sa demande d'annulation de la mesure d'éloignement prise à son encontre le 18 octobre 2000 ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (.) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (.) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité guinéenne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 4 mars 2000, de la décision du 29 février 2000 du préfet de police lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant que, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X... fait valoir qu'il doit pouvoir rester en France afin d'assister son épouse, qui y demeure pour recevoir un traitement médical prolongé à la suite d'une importante opération cardiaque et s'est vue délivrer à cet effet une carte de séjour temporaire ; que ses dires sont étayés par les pièces du dossier ; qu'ainsi l'arrêté attaqué a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris et a par suite, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 18 octobre 2000 par lequel le préfet de police a ordonné sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : Le jugement en date du 30 mars 2001 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : L'arrêté du préfet de police du 18 octobre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... est annulé.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Madioulé X..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 234495
Date de la décision : 12/12/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - DROITS GARANTIS PAR LA CONVENTION - DROIT AU RESPECT DE LA VIE FAMILIALE (ART - 8) - VIOLATION - RECONDUITE A LA FRONTIERE.

ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 18 octobre 2000
Loi 98-349 du 11 mai 1998
Nouveau code de procédure civile 642
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22 bis, art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 12 déc. 2001, n° 234495
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: M. Séners

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:234495.20011212
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