La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/12/2001 | FRANCE | N°225172

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 14 décembre 2001, 225172


Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 juin 2000 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en tant qu'il annule la décision du 10 novembre 1998 fixant l'Angola comme pays de destination de la mesure de reconduite prise le même jour à l'encontre de M. Augusto X... ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la co

nvention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fond...

Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 juin 2000 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en tant qu'il annule la décision du 10 novembre 1998 fixant l'Angola comme pays de destination de la mesure de reconduite prise le même jour à l'encontre de M. Augusto X... ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Lafouge, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Parmentier, Didier, avocat de M. Augusto X...,
- les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le PREFET DE POLICE fait appel devant le Conseil d'Etat du jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris du 28 juin 2000 en tant que ce jugement annule la décision du 10 novembre 1998 fixant l'Angola comme pays de destination de la reconduite de M. Augusto X... ; que ce dernier défère au Conseil d'Etat, par la voie de l'appel incident, le même jugement en tant qu'il rejette ses conclusions dirigées contre la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre le 10 novembre 1998 ;
Sur la légalité de la mesure de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. Augusto X..., de nationalité angolaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 25 juin 1998, de la décision du 12 juin 1998 par laquelle le PREFET DE POLICE a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a invité à quitter le territoire ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider de la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant que si M. Augusto X..., veuf et sans enfant, fait valoir qu'il est dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, cette seule circonstance, à la supposer établie, et en l'absence de précision sur sa vie privée et familiale en France, ne suffit pas à établir que la mesure de reconduite prise à son encontre porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et serait ainsi contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme ; que, par suite, M. Augusto X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions dirigées contre la mesure de reconduite à la frontière du 10 novembre 1998 ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête du PREFET DE POLICE ;

Considérant que le préfet soutient, dans son mémoire en duplique, que M. Augusto X... n'a jamais établi la réalité des risques qu'il courrait personnellement en cas de retour en Angola ; que si l'intéressé soutient qu'il a été enrôlé de force dans l'armée, en 1978, emprisonné pendant trois mois en 1992 par ses supérieurs hiérarchiques partisans d'une formation politique opposée à celle qu'il soutenait et qu'il a dû démissionner de l'armée où il avait acquis le grade de sergent, il n'apporte au soutien de ses allégations aucun élément probant démontrant la réalité des menaces personnelles qui pèseraient sur lui en cas de retour en Angola ; que la circonstance qu'il milite en France au sein d'une association hostile au gouvernement actuel ne suffit pas à établir qu'il risquerait d'être soumis à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne précitée en cas de retour en Angola ; que, dès lors, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris, accueillant l'unique moyen de la requête dirigé contre la décision fixant l'Angola comme pays de destination, a annulé cette décision distincte ;
Sur les conclusions présentées par la SCP Parmentier Didier tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la SCP Parmentier Didier, avocat de M. Augusto X..., la somme qu'elle demande sur ce fondement ;
Article 1er : Le jugement du 28 juin 2000 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il annule la décision préfectorale du 10 novembre 1998 fixant l'Angola comme pays de destination de la reconduite de M. Augusto X....
Article 2 : Les conclusions de M. Augusto X... présentées devant le tribunal administratif de Paris ainsi que celles de son appel incident sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Augusto X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 225172
Date de la décision : 14/12/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3, art. 8
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 37
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 14 déc. 2001, n° 225172
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lafouge
Rapporteur public ?: Mlle Fombeur

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:225172.20011214
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award