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14/12/2001 | FRANCE | N°227889

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 14 décembre 2001, 227889


Vu la requête, enregistrée le 6 décembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 septembre 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 22 mars 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ali X...
Y... ainsi que la décision du même jour fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Y... devant le tribuna

l administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention...

Vu la requête, enregistrée le 6 décembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 septembre 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 22 mars 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ali X...
Y... ainsi que la décision du même jour fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien signé le 17 mars 1988 et entré en vigueur le 1er février 1989 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative et notamment son article L. 761-1 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Picard, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que si M. Ali X...
Y..., né en 1970, célibataire sans enfant, fait valoir qu'étant entré sur le territoire en 1992, il vit en concubinage depuis 1993 avec un ressortissant français, il ressort des pièces du dossier, d'une part, que tant la continuité du séjour en France de l'intéressé que l'existence depuis 1993 du concubinage allégué ne sont pas établis, eu égard aux indications contradictoires de l'intéressé et de son concubin ; que, d'autre part, toute la proche famille de M. Y... réside en Tunisie, en particulier ses parents et ses cinq frères et que l'intéressé ne justifie d'aucune activité professionnelle et d'aucune ressource ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la durée et des conditions de son séjour en France, la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre n'a pas porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que cette mesure n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, c'est, par suite, à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté en date du 22 mars 1999 décidant la reconduite à la frontière de M. Y... ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y..., de nationalité tunisienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 6 mai 1998, de l'arrêté du 28 avril 1998 par lequel le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 11 de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail signé à Paris le 17 mars 1988 et entré en vigueur le 1er février 1989 : "Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord" ; qu'ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les stipulations dudit accord, qui ne concernent pas les mesures de reconduite à la frontière, feraient obstacle à l'application aux ressortissants tunisiens des dispositions précitées de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en décidant la reconduite à la frontière de M. Y... le PREFET DE POLICE aurait entaché d'une erreur manifeste son appréciation des conséquences de cette mesure sur sa vie personnelle ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 11 septembre 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 22 mars 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y... ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. Y..., la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 11 septembre 2000 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par M. Y... est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. Y... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Ali X...
Y... et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 28 avril 1998
Arrêté du 22 mars 1999
Code de justice administrative L761-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation: CE, 14 déc. 2001, n° 227889
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Picard
Rapporteur public ?: M. Schwartz

Origine de la décision
Formation : 4 ss
Date de la décision : 14/12/2001
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 227889
Numéro NOR : CETATEXT000008110945 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2001-12-14;227889 ?
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