Vu la requête, enregistrée le 9 février 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ESSONNE ; le PREFET DE L'ESSONNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 janvier 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 18 janvier 2001 décidant la reconduite à la frontière de M. Mohamed X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Derepas, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation de visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Mohamed X..., ressortissant tunisien, s'est maintenu sur le territoire national à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 2° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que si M. X... qui est célibataire et sans enfant fait valoir que sa famille proche vit en France, qu'il lui apporte un soutien financier, qu'il n'a plus d'attache dans son pays d'origine et qu'il justifie disposer d'un emploi salarié depuis juillet 1999, ces circonstances ne suffisent pas à établir que le PREFET DE L'ESSONNE aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation qu'il a faite des conséquences de la mesure contestée sur sa situation personnelle ; que, par suite, c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté contesté pour ce motif ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le Conseil d'Etat et le tribunal administratif de Versailles ;
Sur la régularité de l'arrêté attaqué :
Considérant que l'arrêté attaqué a été signé par M. Yann Y..., secrétaire général de la préfecture de l'Essonne, qui a reçu délégation à cet effet en vertu de l'arrêté du PREFET DE L'ESSONNE du 5 décembre 2000 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de l'Etat ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 18 janvier 2001 serait entaché d'incompétence n'est pas fondé ;
Considérant que l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision de reconduite à la frontière ; qu'ainsi, il répond aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 susvisée relative à la motivation des actes administratifs ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
Considérant qu'à la date à laquelle a été prise la mesure d'éloignement contestée, M. X..., entré en France en 1998, était majeur, célibataire et sans enfant ; que ses parents et ses frères et soeurs résidaient régulièrement en France où ils disposaient de ressources suffisantes ; qu'il ne ressort pas du dossier que l'intéressé n'a plus d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et eu égard tant à la durée et aux conditions du séjour en France de M. X... qu'aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté litigieux n'a pas porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que M. X... n'établit pas qu'il résidait habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à se prévaloir des dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant que si M. X... demande l'annulation de la décision distincte contenue dans l'article 1er de l'arrêté et désignant le pays à destination duquel il sera reconduit, il n'assortit cette demande d'aucun élément de droit ou de fait susceptible de permettre au juge d'en apprécier le bien fondé ; que le moyen ne peut, dès lors, qu'être rejeté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'ESSONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 18 janvier 2001 décidant la reconduite de M. X... à la frontière ;
Sur les conclusions tendant à la délivrance d'un titre de séjour sous peine d'astreinte :
Considérant que la présente décision rejette les conclusions à fin d'annulation de M. X... ; que les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par l'intéressé ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles du 22 janvier 2001 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Mohamed X... devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... devant le Conseil d'Etat est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ESSONNE, à M. Mohamed X... et au ministre de l'intérieur.