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28/12/2001 | FRANCE | N°232815

France | France, Conseil d'État, 3 ss, 28 décembre 2001, 232815


Vu la requête, enregistrée le 20 avril 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 19 février 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 30 août 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Rachel Y...
X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Rachel Y...
X... devant ledit tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convent

ion européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu...

Vu la requête, enregistrée le 20 avril 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 19 février 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 30 août 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Rachel Y...
X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Rachel Y...
X... devant ledit tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laville, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Rachel Y...
X... s'est maintenue sur le territoire plus d'un mois après la notification, le 14 avril 2000, de la décision par laquelle le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a refusé de lui délivrer un titre de séjour ; qu'elle entrait ainsi dans le cas prévu au 3° du I de l'article 22 précité où le préfet peut légalement ordonner la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant toutefois que selon l'article 12 bis de la même ordonnance : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit ( ...) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant" ;
Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle a été pris l'arrêté prononçant sa reconduite à la frontière, Mme Tsiahou X... justifiait résider habituellement en France depuis plus de dix ans, ne s'étant brièvement absentée de France que pour assister aux obsèques de son mari ; qu'elle pouvait donc prétendre de plein droit à la délivrance d'une carte de séjour en application des dispositions précitées du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, par suite, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ne pouvait, sans méconnaître ces dispositions, prendre à son encontre l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Tsiahou X... ;
Sur les conclusions à fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public ( ...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution" ; qu'aux termes des dispositions du III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, ( ...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas" ; que le motif de l'annulation de l'arrêté attaqué, rapproché des dispositions de l'article 12 bis 3° précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945, implique que soit délivrée à Mme Tsiahou X... une carte de séjour temporaire ;
Sur les conclusions de Mme Tsiahou X... tendant au remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à Mme Tsiahou X... la somme de 8 000 F ( 1 219,59 euros) au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est rejetée.
Article 2 : Il est enjoint au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE de délivrer à Mme Tsiahou X... une carte de séjour temporaire.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à Mme Tsiahou X... la somme de 8 000 F (1 219,59 euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE, à Mme Rachel Y...
X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 ss
Numéro d'arrêt : 232815
Date de la décision : 28/12/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03-02-01 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE - LEGALITE INTERNE - ETRANGERS NE POUVANT FAIRE L'OBJET D'UNE MESURE DE RECONDUITE A LA FRONTIERE


Références :

Arrêté du 30 août 2000
Code de justice administrative L911-1, L761-1
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 25, art. 12 bis, art. 22 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 2001, n° 232815
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Laville
Rapporteur public ?: M. Austry

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:232815.20011228
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