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08/02/2002 | FRANCE | N°225538

France | France, Conseil d'État, 7 ss, 08 février 2002, 225538


Vu la requête, enregistrée le 29 septembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 juillet 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 2 décembre 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Nabil X... et fixant l'Algérie comme pays de destination ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
V

u les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde...

Vu la requête, enregistrée le 29 septembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 juillet 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 2 décembre 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Nabil X... et fixant l'Algérie comme pays de destination ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Rapone, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 6 octobre 1999, de la décision du 26 août 1999 par laquelle le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que si M. X..., né en 1973 et entré en France en 1999, fait valoir qu'il n'a plus d'attaches familiales en Algérie et qu'il est venu en France rejoindre sa mère et une de ses soeurs, toutes deux titulaires d'une carte de résident, et un autre de ses frères, de nationalité française, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de M. X..., le préfet ait, par son arrêté du 2 décembre 1999, commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement attaquée sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé ; que, par suite, c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce que l'arrêté de reconduite était entaché d'une telle erreur pour en prononcer l'annulation ;
Considérant toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X... a fait valoir que la plus grande partie des membres de sa famille vivent en France ; que, toutefois, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la brièveté du séjour en France de l'intéressé qui n'est pas dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, cet arrêté n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement attaquée aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être rejeté ;

Considérant, en revanche, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du fait que son frère, militaire, et son beau-frère ont été assassinés en Algérie, que M. X... courrait des risques pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi, l'intéressé est fondé à soutenir que la mesure d'éloignement attaqué méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à demander l'annulation du jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 10 juillet 2000 en tant que ce jugement a annulé son arrêté du 2 décembre 1999 en tant qu'il ordonnait la reconduite à la frontière de M. X... ; qu'il n'est en revanche pas fondé à se plaindre de l'annulation de cet arrêté en tant qu'il fixait l'Algérie comme pays de destination ;
Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 10 juillet 2000 est annulé en tant qu'il a annulé l'arrêté du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE en date du 2 décembre 1999 en tant que cet arrêté ordonne la reconduite à la frontière de M. X....
Article 2 : La demande de M. X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée en tant qu'elle tendait à l'annulation de l'arrêté du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE en date du 2 décembre 1999 en tant que cet arrêté ordonne sa reconduite à la frontière.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE, à M. Nabil X... et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 02 décembre 1999
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3, art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation: CE, 08 fév. 2002, n° 225538
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Rapone
Rapporteur public ?: M. Piveteau

Origine de la décision
Formation : 7 ss
Date de la décision : 08/02/2002
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 225538
Numéro NOR : CETATEXT000008111876 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2002-02-08;225538 ?
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