Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 7 avril 2000, présentée par le PREFET DU CHER ; le PREFET DU CHER demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 8 mars 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 6 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Z...
Y... née X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Y... devant le tribunal administratif d'Orléans ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Mahé, Auditeur,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme Y...,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Z...
Y... née X..., de nationalité turque, déclare être entrée sur le territoire français à la fin du mois d'août 1997, que son passeport n'a été établi qu'au mois de septembre 1997 et qu'elle n'a présenté aucun titre de séjour en cours de validité ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 1° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, Mme Y... a fait valoir qu'elle s'est mariée en Turquie le 13 août 1997, que son époux, M. Kérim Y..., vit et travaille en France depuis 1992, date à laquelle il a obtenu une carte de résident valable 10 ans, qu'une enfant est née de cette union le 22 septembre 1999 et que sa vie familiale est désormais en France ; qu'il résulte toutefois de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de Mme Y..., et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, que cet arrêté n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que c'est, dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans, retenant l'unique moyen de la demande, s'est fondé sur ce qu'il méconnaissait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU CHER est fondé à demander l'annulation du jugement du 8 mars 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 6 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Y... ;
Sur les conclusions à fins d'injonction présentées par Mme Y... :
Considérant que la présente décision qui rejette la requête de Mme Y... n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour ne sont, dès lors, pas recevables ;
Article 1er : Le jugement du 8 mars 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif d'Orléans par Mme Y... et les conclusions présentées par celle-ci devant le Conseil d'Etat sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU CHER, à Mme Z...
Y... née X... et au ministre de l'intérieur.