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13/03/2002 | FRANCE | N°219485

France | France, Conseil d'État, 3 / 8 ssr, 13 mars 2002, 219485


Vu la requête, enregistrée le 29 mars 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le COMITE ECONOMIQUE AGRICOLE FRUITS ET LEGUMES DU VAL-DE-LOIRE, dont le siège est situé à la chambre d'agriculture d'Indre-et-Loire ..., représenté par son président en exercice, agissant en exécution du jugement du tribunal de grande instance de Nantes en date du 27 avril 1999 ; le COMITE ECONOMIQUE AGRICOLE FRUITS ET LEGUMES DU VAL-DE-LOIRE demande que le Conseil d'Etat :
1°) apprécie la légalité des arrêtés du 10 juillet 1995 pris conjointement par le ministre de

l'économie et des finances et le ministre de l'agriculture, de la p...

Vu la requête, enregistrée le 29 mars 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le COMITE ECONOMIQUE AGRICOLE FRUITS ET LEGUMES DU VAL-DE-LOIRE, dont le siège est situé à la chambre d'agriculture d'Indre-et-Loire ..., représenté par son président en exercice, agissant en exécution du jugement du tribunal de grande instance de Nantes en date du 27 avril 1999 ; le COMITE ECONOMIQUE AGRICOLE FRUITS ET LEGUMES DU VAL-DE-LOIRE demande que le Conseil d'Etat :
1°) apprécie la légalité des arrêtés du 10 juillet 1995 pris conjointement par le ministre de l'économie et des finances et le ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation portant extension des règles édictées par le COMITE ECONOMIQUE AGRICOLE FRUITS ET LEGUMES DU VAL-DE-LOIRE et déclare que ces arrêtés ne sont pas entachés d'illégalité ;
2°) condamne la société civile d'exploitation agricole Serres des trois moulins, la société civile agricole SEMAC et la société civile d'exploitation agricole Choimet Waleez à lui verser ensemble la somme de 30 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le règlement (CEE) n° 1035/72 du 18 mai 1972 modifié notamment par le règlement (CEE) du Conseil n° 3284-83 du 14 novembre 1983 ;
Vu le code rural ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Hédary, Auditeur,
- les observations de Me Copper-Royer, avocat du COMITE ECONOMIQUE AGRICOLE FRUITS ET LEGUMES DU VAL-DE-LOIRE et de Me Delvolvé, avocat de la Société civile d'exploitation agricole (S.C.E.A.) Serres des trois moulins,
- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que par un jugement du 27 avril 1999 le tribunal de grande instance de Nantes, saisi par le COMITE ECONOMIQUE AGRICOLE FRUITS ET LEGUMES DU VAL-DE-LOIRE (CEAFL-VL) en vue de faire condamner la société civile d'exploitation agricole Serres des trois moulins, la société civile agricole SEMAC et la société civile d'exploitation agricole Choimet Waleez à lui verser les cotisations, pour les années 1995 et 1996, dues par ces sociétés en vertu de l'article R. 553-7 du code rural à raison des règles édictées par ce comité et étendues à tous les producteurs de la région par trois arrêtés du ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation et du ministre de l'économie et des finances du 10 juillet 1995, a sursis à statuer jusqu'à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur la validité de ces arrêtés qui étendent les règles relatives, pour le premier à la pomme de terre primeur, pour le deuxième à la pomme de table et à la poire de table, pour le troisième à la salade d'hiver, à la tomate, au concombre, à la mâche, au poireau primeur et à l'oignon ;
Considérant que conformément au règlement (CEE) 1035/72 du 18 mai 1972 portant organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et légumes, modifié notamment par le règlement (CEE) du Conseil 3284/83 du 14 novembre 1983, les articles L. 554-1 et R. 554-2 du code rural permettent à un comité économique agricole justifiant d'une expérience suffisante de certaines disciplines de demander à l'autorité administrative que les règles, adoptées à la majorité des organismes adhérents à ce comité depuis au moins une année englobant une campagne agricole et préalablement appliquées par eux, soient rendues obligatoires pour les producteurs établis au sein de la même circonscription économique agricole ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la condition, fixée par le paragraphe 3 de l'article 15 ter du règlement du Conseil susmentionné, que l'Etat membre communique à la Commission les règles qu'il envisage de rendre obligatoires pour l'ensemble des producteurs d'une circonscription économique déterminée a été satisfaite en l'espèce, les autorités françaises ayant transmis le 22 mai 1995 à la Commission le dossier correspondant à la demande d'extension des règles édictées par le CEAFL-VL et la Commission ayant approuvé ces règles par une décision du 29 juin 1995 ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier du bilan d'application joint par les autorités françaises au dossier d'agrément des demandes d'extension transmis à la Commission européenne, que les règles étendues par les arrêtés du 10 juillet 1995 avaient été adoptées à la majorité des membres statutaires du CEAFL-VL et avaient été appliquées par eux durant au moins une campagne agricole avant que l'extension soit demandée ;
Considérant que le texte des règles étendues par les arrêtés du 10 juillet 1995, régulièrement publiés au Journal Officiel de la République française le 21 juillet 1995 en application de l'article R. 554-5 du code rural, est en tout état de cause suffisamment précis ;

Considérant toutefois que les articles R. 554-2 et R. 554-3 du code rural imposent également que la décision de présenter la demande d'extension ait été prise par l'assemblée générale du comité se prononçant à la majorité des deux tiers des membres composant statutairement l'assemblée et que le procès-verbal de cette délibération de l'assemblée générale soit joint à la demande d'extension adressée au ministre de l'agriculture par l'intermédiaire du préfet du département du siège du comité avec un rapport d'activité ; qu'il appartient au juge administratif de contrôler le respect de ces conditions, lesquelles ne sont contraires à aucune disposition du règlement communautaire susmentionné du 18 mai 1972 ni des règlements qui le modifient et s'appliquent tant aux nouvelles extensions qu'à leur renouvellement ; qu'il ressort des procès-verbaux des assemblées générales du CEAFL-VL que la décision de demander l'extension des règles relatives aux poireaux primeurs et aux oignons a été prise à l'unanimité des membres présents, représentant plus de deux tiers des membres statutaires du comité, au cours de l'assemblée générale du 30 mars 1994 ; qu'ainsi l'extension des règles relatives à ces deux produits a été régulière ; qu'en revanche, si l'assemblée générale du comité a voté le 30 mars 1994 et le 28 mars 1995 "le montant des cotisations à prélever auprès des producteurs hors groupement sous extension des règles" pour la campagne agricole en cours, comme elle le fait chaque année, elle n'a pas été invitée à voter sur la décision de demander le renouvellement pour une période triennale de l'extension des règles relatives à la pomme de terre primeur, à la pomme et à la poire de table, à la tomate, à la mâche, à la salade d'hiver et au concombre ; que d'ailleurs, la demande d'extension adressée par le comité au ministre de l'agriculture par l'intermédiaire du préfet de la région Centre comportait un rapport d'activité mais n'était pas accompagnée du procès-verbal de la délibération de l'assemblée générale ; que si le CEAFL-VL soutient que le vote sur le montant des cotisations suppose implicitement un accord sur le principe de l'extension, les dispositions sus-rappelées du code rural imposent que la décision de demander une extension ou son renouvellement soit prise par un vote exprès de l'assemblée générale pleinement éclairée sur la portée de celui-ci ; que faute d'un tel vote, la formalité substantielle fixée par l'article R. 554-2 du code rural a été méconnue ; que cette irrégularité entache d'illégalité les arrêtés du 10 juillet 1995 relatifs à la pomme de terre primeur et à la pomme et la poire de table, ainsi que l'arrêté du même jour en tant qu'il étend les règles relatives à la salade d'hiver, à la tomate, au concombre et à la mâche ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la société civile d'exploitation agricole Serres des trois moulins, la société civile agricole SEMAC et la société civile d'exploitation agricole Choimet Waleez, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes au principal, soient condamnées à verser au CEAFL-VL la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le CEAFL-VL à verser à la société civile d'exploitation agricole Serres des trois moulins, la société civile agricole SEMAC et la société civile d'exploitation agricole Choimet Waleez, la somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Il est déclaré que l'arrêté du 10 juillet 1995 du ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation et du ministre de l'économie et des finances portant extension des règles édictées par le CEAFL-VL pour la salade d'hiver, la tomate, le concombre, la mâche, le poireau primeur et l'oignon, est légal en tant qu'il étend les règles relatives au poireau primeur et à l'oignon.
Article 2 : Il est déclaré que l'arrêté du 10 juillet 1995 du ministre de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation et du ministre de l'économie et des finances portant extension des règles édictées par le CEAFL-VL relatives à la pomme de terre primeur, l'arrêté du même jour relatif à la pomme et à la poire de table, et l'arrêté du même jour en tant qu'il étend les règles relatives à la salade d'hiver, à la tomate, au concombre et à la mâche, sont entachés d'illégalité.
Article 3 : Le COMITE ECONOMIQUE AGRICOLE FRUITS ET LEGUMES DU VAL-DE-LOIRE versera à la société civile d'exploitation agricole Serres des trois moulins, la société civile agricole SEMAC et la société civile d'exploitation agricole Choimet Waleez, la somme globale de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions du COMITE ECONOMIQUE AGRICOLE FRUITS ET LEGUMES DU VAL-DE-LOIRE tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au COMITE ECONOMIQUE AGRICOLE FRUITS ET LEGUMES DU VAL-DE-LOIRE, à la société civile d'exploitation agricole Serres des trois moulins, la société civile agricole SEMAC et la société civile d'exploitation agricole Choimet Waleez, au ministre de l'agriculture et de la pêche et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 3 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 219485
Date de la décision : 13/03/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

AGRICULTURE - CHASSE ET PECHE - PRODUITS AGRICOLES.

COMMUNAUTES EUROPEENNES - APPLICATION DU DROIT COMMUNAUTAIRE PAR LE JUGE ADMINISTRATIF FRANCAIS - ACTES CLAIRS - REGLEMENTS COMMUNAUTAIRES.

COMPETENCE - COMPETENCES CONCURRENTES DES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - CONTENTIEUX DE L'APPRECIATION DE LA LEGALITE.


Références :

Arrêté du 10 juillet 1995
CEE Règlement 1035-72 du 18 mai 1972 Conseil art. 15
CEE Règlement 3284-83 du 14 novembre 1983 Conseil
Code de justice administrative L761-1
Code rural R553-7, L554-1, R554-2, R554-5, R554-3


Publications
Proposition de citation : CE, 13 mar. 2002, n° 219485
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mlle Hédary
Rapporteur public ?: M. Séners

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:219485.20020313
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