Vu la requête, enregistrée le 3 mai 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Ahmet X..., demeurant chez Mme Glzar Z..., ... à La Tour du Pin (38110) ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 5 avril 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 14 mars 2001 du préfet de l'Isère décidant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant la Turquie comme pays de renvoi ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté et cette décision ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 11 960 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié, réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Sauron, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Mignon, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... :
Considérant qu'en réponse au moyen tiré de ce que l'arrêté en date du 14 mars 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... et la décision distincte fixant la Turquie comme pays de destination étaient signés par une autorité incompétente, le préfet de l'Isère a produit une copie de l'arrêté du 16 février 2000 par lequel il a donné délégation de signature à Mme Danièle Y..., secrétaire général adjoint de la préfecture ; qu'il ressort des mentions de cet arrêté que Mme Y... a reçu délégation à l'effet de signer "tous actes, arrêtés, décisions, documents et correspondances administratives diverses concernant l'administration du département de l'Isère, à l'exception : 1°) Des mesures concernant la défense nationale et celles concernant le maintien de l'ordre ; 2°) Des mesures de réquisition prises en application de la loi du 11 juillet 1938 ; 3°) Des déclinatoires de compétence et arrêtés de conflit" ; que cet arrêté ne donne pas délégation à Mme Y... pour signer les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière et ceux fixant le pays de destination ; que les actes attaqués ayant été signés par une autorité incompétente, M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à leur annulation ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 1 800 euros qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 5 avril 2001 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble, l'arrêté en date du 14 mars 2001 de reconduite à la frontière et la décision distincte fixant le pays de destination du préfet de l'Isère sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. X... la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Ahmet X..., au préfet de l'Isère et au ministre de l'intérieur.