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03/05/2002 | FRANCE | N°238247

France | France, Conseil d'État, 03 mai 2002, 238247


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 septembre et 19 novembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Mohand X...
Y..., demeurant chez M. Guana Y..., ... ; M. Y... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 16 août 2001 pour lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 8 juin 2000 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa reconduite à la frontière

;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'annuler par voie...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 septembre et 19 novembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Mohand X...
Y..., demeurant chez M. Guana Y..., ... ; M. Y... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 16 août 2001 pour lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 8 juin 2000 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'annuler par voie d'exception la décision du 28 janvier 2000 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a refusé l'asile territorial ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les conditions de notification d'un jugement sont en tout état de cause sans incidence sur la régularité de celui-ci ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y... s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification de la décision du préfet de l'Essonne du 7 février 2000, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas visé au 3° de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. Y... fait valoir qu'il a entrepris des études à l'université de Paris VIII ; que ces circonstances ne permettent pas de faire regarder l'arrêté attaqué comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant que si M. Y..., de nationalité algérienne, né en 1974 et entré en France en mai 1999, fait valoir qu'il y a des attaches familiales, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de M. Y... en France du fait qu'une grande partie de sa famille réside toujours en Algérie et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet de l'Essonne en date du 8 juin 2000 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que le moyen tiré de ce que M. Y... courrait des risques importants s'il devait retourner en Algérie ne saurait être utilement invoqué à l'appui d'un recours contre l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressé ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision distincte fixant le pays de destination de la reconduite :

Considérant qu'à l'appui des conclusions dirigées contre la décision distincte fixant le pays de destination de la reconduite, M. Y... fait valoir qu'en raison des risques que lui ferait courir son retour dans son pays d'origine, cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966 et l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile ;
Considérant que dans les termes où il est rédigé l'arrêté attaqué doit être regardé comme comportant une décision distincte fixant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite ;
Considérant qu'il ressort des documents produits devant le juge administratif qui ne sont pas sérieusement contestés par le préfet de l'Essonne que la sécurité personnelle de M. Y... pourrait être gravement menacée en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi le préfet de l'Essonne n'a pu légalement désigner l'Algérie comme pays de destination ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision du ministre de l'intérieur du 28 janvier 2000 rejetant sa demande d'asile territorial :
Considérant que ces conclusions sont présentées pour la première fois en appel ; qu'elles sont, dès lors, et en tout état de cause, irrecevables ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2000 du préfet de l'Essonne en tant qu'il fixe l'Algérie comme pays de destination de la reconduite ;
Article 1er : Le jugement en date du 16 août 2001 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la demande de M. Y... tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Essonne fixant le pays à destination duquel il sera reconduit.
Article 2 : L'arrêté du 8 juin 2000 du préfet de l'Essonne ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y... est annulé en tant qu'il fixe l'Algérie comme pays de destination.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Y... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Mohand X...
Y..., au préfet de l'Essonne et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 238247
Date de la décision : 03/05/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 08 juin 2000
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3, art. 8
Loi 52-893 du 25 juillet 1952 art. 13
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22
Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966


Publications
Proposition de citation : CE, 03 mai. 2002, n° 238247
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: M. Olson

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:238247.20020503
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