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22/05/2002 | FRANCE | N°219374

France | France, Conseil d'État, 8 / 3 ssr, 22 mai 2002, 219374


Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 27 mars et 27 juillet 2000, présentés pour la SA SOLLAC, dont le siège est ... ; la SA SOLLAC, venant aux droits de la société Usinor Aciers, demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 20 janvier 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 5 novembre 1996 du tribunal administratif de Lille rejetant sa demande tendant à ce que la taxe foncière sur les propriétés bâties pour l'établ

issement industriel de Grande Synthe, au titre de l'année 1986, soit ...

Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 27 mars et 27 juillet 2000, présentés pour la SA SOLLAC, dont le siège est ... ; la SA SOLLAC, venant aux droits de la société Usinor Aciers, demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 20 janvier 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 5 novembre 1996 du tribunal administratif de Lille rejetant sa demande tendant à ce que la taxe foncière sur les propriétés bâties pour l'établissement industriel de Grande Synthe, au titre de l'année 1986, soit établie au nom de la société Usinor Aciers sur une base réduite ;
2°) de décharger la société Usinor de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1986 à raison de l'établissement industriel de Grande Synthe ;
3°) de mettre lesdites impositions à la charge de la société Usinor Aciers aux droits de laquelle elle vient en réduisant leurs bases en application des dispositions de l'article 1518 B du code général des impôts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code du commerce ;
Vu la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ;
Vu la loi n° 93-1352 du 30 décembre 1993 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Vallée, Maître des Requêtes-,
- les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de la SA SOLLAC,
- les conclusions de Mme Mignon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par traité sous seing privé en date du 4 novembre 1985 ratifié par l'assemblée générale extraordinaire des sociétés concernées le 20 décembre 1985, la société Usinor a cédé sa branche d'activité "Produits plats" à la société Agena, devenue à l'issue de cet apport partiel d'actifs la société Usinor Aciers ; que la société Usinor a été assujettie au titre de l'année 1986 à la taxe foncière sur les propriétés bâties à raison des installations industrielles de Grande Synthe qui étaient au nombre des actifs ainsi cédés ; que la SA SOLLAC, venant aux droits de la société Usinor Aciers qu'elle a ultérieurement absorbée, se pourvoit contre l'arrêt en date du 20 janvier 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant à ce que l'impôt soit mis à la charge de la société Usinor Aciers sur des bases réduites ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1402 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 1993 : "Les mutations cadastrales consécutives aux mutations de propriété sont faites à la diligence des propriétaires intéressés. Aucune modification à la situation juridique d'un immeuble ne peut faire l'objet d'une mutation si l'acte ou la décision judiciaire constatant cette modification n'a pas été préalablement publié au fichier immobilier" ; qu'aux termes de l'article 1403 du même code : "Tant que la mutation cadastrale n'a pas été faite, l'ancien propriétaire continue à être imposé au rôle, et lui ou ses héritiers naturels peuvent être contraints au paiement de la taxe foncière, sauf leur recours contre le nouveau propriétaire" ; qu'aux termes de l'article 1404 du même code, dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 1993 : "I. Lorsque au titre d'une année une cotisation de taxe foncière a été établie au nom d'une personne autre que le redevable légal, le dégrèvement de cette cotisation est prononcé à condition que les obligations prévues à l'article 1402 aient été respectées. L'imposition du redevable légal au titre de la même année est établie au profit de l'Etat dans la limite de ce dégrèvement" ;
Considérant que, pour l'application de ces dispositions, lorsque au titre d'une année une cotisation de taxe foncière a été établie au nom d'une personne autre que le redevable légal, le dégrèvement de cette cotisation, subordonné à la publication au fichier immobilier de l'acte ou de la décision constatant le transfert de propriété, est prononcé par le juge de l'impôt si, à la date où il statue, il constate que cette formalité a été accomplie, alors même qu'elle ne l'aurait été qu'après l'établissement de l'impôt ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Douai a commis une erreur de droit en jugeant que la taxe foncière due au titre de l'année 1986 à raison des installations industrielles de Grande Synthe avait été à bon droit établie au nom de la société Usinor au motif que l'acte authentique translatif de propriété n'avait été publié que le 3 février 1987, soit postérieurement à l'établissement de la taxe en litige ; que l'arrêt attaqué doit, dès lors, être annulé pour ce motif ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient la société requérante, le tribunal administratif de Lille n'a pas relevé d'office le moyen tiré de l'inopposabilité des actes d'apport à la date d'établissement de l'impôt, sur lequel il s'est fondé pour rejeter la requête ;
Considérant, toutefois, qu'en vertu des dispositions de l'article 372-2 de la loi du 24 juillet 1966, repris à l'article L. 236-4 du code de commerce, la transmission universelle du patrimoine cédé par une société anonyme à une autre société anonyme, par voie d'apport partiel d'actif, soumis par les parties, en vertu de l'article 387 de la même loi, repris à l'article L. 236-22 du code de commerce, au régime des scissions prévu par cette loi, est réalisée en principe à la date à laquelle cet apport a été approuvé par les assemblées générales extraordinaires d'actionnaires des deux sociétés concernées ; qu'il résulte de l'instruction que les délibérations des assemblées générales extraordinaires des sociétés Usinor et Agena, devenue Usinor Aciers, en date du 20 décembre 1985, ont approuvé l'apport partiel d'actif, placé sous le régime des scissions, effectué par la première au bénéfice de la seconde ; que ces délibérations avaient ainsi rendu juridiquement parfait leur accord du 4 novembre précédent, alors même que les procès-verbaux de ces assemblées n'ont été enregistrés que le 10 janvier 1986 ; qu'ainsi, la société Usinor Aciers, aux droits de laquelle vient la SA SOLLAC, était propriétaire, au 1er janvier 1986, des installations industrielles du site de Grande Synthe ; que, par suite, la SA SOLLAC est fondée à soutenir que c'est à tort que, pour rejeter sa demande, les premiers juges se sont fondés sur le motif que la société Usinor Aciers n'était pas, à cette date, propriétaire desdites installations ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société ;
Considérant qu'il est constant que le transfert de propriété des installations industrielles du site de Grande Synthe a fait l'objet d'une publication au fichier immobilier le 3 février 1987 ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la formalité prévue à l'article 1402 du code général des impôts, à laquelle renvoie l'article 1404 du même code, ayant été accomplie, il y a lieu, dans ces conditions, par application de ces mêmes dispositions, de décharger la société Usinor des impositions contestées et de mettre celles-ci à la charge de la société Usinor Aciers, aux droits de laquelle vient la SA SOLLAC ;

Considérant qu'en vertu de l'article 1499 du code général des impôts, la valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, affecté, le cas échéant, des correctifs prévus aux articles 310 J bis et 310 K de l'Annexe II au même code les taux fixés à l'article 310 L de la même annexe ; qu'aux termes de l'article 1518 B du même code : "A compter du 1er janvier 1980, la valeur locative des immobilisations corporelles acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements réalisés à partir du 1er janvier 1976 ne peut être inférieure aux deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'apport, la scission, la fusion ou la cession. / Les dispositions de l'alinéa précédent s'appliquent aux seules immobilisations corporelles directement concernées par l'opération d'apport, de scission, de fusion ou de cession, dont la valeur locative a été retenue au titre de l'année précédant l'opération." ;
Considérant que la SA SOLLAC demande que la base de son imposition à la taxe foncière soit réduite en application des dispositions précitées selon lesquelles, en cas d'acquisition d'immobilisations à la suite d'apports, la valeur locative imposable est soit la valeur locative d'apport, soit les deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'apport ; qu'elle fait valoir, en appliquant les règles de calcul posées par ces mêmes dispositions, que cette opération de comparaison conduit à une réduction de la base imposable de 43 387 057 F ; que, sans contredire la méthode ni les calculs de la société requérante, le ministre se borne à indiquer qu'il ne dispose d'aucun élément pour déterminer la base d'imposition du nouveau redevable ; que, dans ces conditions, la base d'imposition de la SA SOLLAC pour la taxe foncière afférente aux installations industrielles du site de Dunkerque au titre de 1986 doit être fixée, ainsi qu'elle le demande, à 9 651 956,30 euros (63 312 683 F) ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai en date du 20 janvier 2000 et le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 5 novembre 1996 sont annulés.
Article 2 : La société Usinor est déchargée de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie, au titre de l'année 1986, à raison des installations industrielles de Dunkerque.
Article 3 : Cette imposition est mise à la charge de la société Usinor Aciers, aux droits de laquelle vient la SA SOLLAC, à concurrence du montant calculé sur une base d'imposition s'élevant à 9 651 956,30 euros (63 312 683 F).
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SA SOLLAC et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

19-03-03-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXES FONCIERES - TAXE FONCIERE SUR LES PROPRIETES BATIES


Références :

CGI 1402, 1403, 1404, 1499, 1518
CGIAN2 310 J bis, 310 K, 310 L
Code de commerce L236-4, L236-22
Code de justice administrative L821-2
Instruction du 20 décembre 1985
Loi 66-537 du 24 juillet 1966 art. 372-2, art. 387
Loi 93-1352 du 30 décembre 1993


Publications
Proposition de citation: CE, 22 mai. 2002, n° 219374
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Vallée
Rapporteur public ?: Mme Mignon

Origine de la décision
Formation : 8 / 3 ssr
Date de la décision : 22/05/2002
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 219374
Numéro NOR : CETATEXT000008114764 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2002-05-22;219374 ?
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