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29/05/2002 | FRANCE | N°202630

France | France, Conseil d'État, 10 ss, 29 mai 2002, 202630


Vu la requête enregistrée le 14 décembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Y...
Z..., élisant domicile chez Me Paul-Laurent X...
... ; M. Z... demande que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement en date du 12 novembre 1998 par lequel le président du tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 4 novembre 1998 du préfet de la Haute-Corse ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision de même date fixant le pays de destination ;
2° annule ces décisions ;
Vu

les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des dro...

Vu la requête enregistrée le 14 décembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Y...
Z..., élisant domicile chez Me Paul-Laurent X...
... ; M. Z... demande que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement en date du 12 novembre 1998 par lequel le président du tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 4 novembre 1998 du préfet de la Haute-Corse ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision de même date fixant le pays de destination ;
2° annule ces décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Mochon, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 1°) Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Z..., de nationalité tunisienne, est entré et s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français ; qu'il était ainsi dans le cas où, en application des dispositions susrappelées, le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant que le secrétaire général de la préfecture de la Haute-Corse était compétent pour signer, comme il l'a fait, un arrêté de reconduite à la frontière en vertu d'une délégation de signature accordée par un arrêté préfectoral du 8 juillet 1998, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de juillet 1998 ; que le préfet avait, en vertu des dispositions de l'article 17 du décret du 10 mai 1982, compétence pour déléguer sa signature pour de tels arrêtés ; que la circonstance que l'ampliation de l'arrêté a été signée par le chef du bureau des libertés est sans incidence sur sa légalité ;
Considérant que l'arrêté attaqué, qui comporte un énoncé suffisant de l'ensemble des éléments de droit et de fait qui le fondent, est suffisamment motivé ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relatives à la reconduite à la frontière, et notamment de ses articles 22 et 22 bis, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse, auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite à la frontière et que les dispositions de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 alors en vigueur ne sont, dès lors, pas applicables à la procédure administrative préalable à l'intervention d'un tel arrêté ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Corse a procédé à un examen effectif de la situation particulière de M. Z... avant de prendre les décisions critiquées ;
Considérant que si à la date de la décision attaquée M. Z... vivait depuis trois ans avec une femme de nationalité italienne en situation régulière de séjour, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu notamment des conditions et de la durée du séjour en France de l'intéressé, que cette circonstance soit de nature à faire regarder l'arrêté attaqué comme ayant porté une atteinte disproportionnée au droit du requérant au respect de sa vie familiale et privée, au regard des buts en vue desquels cette mesure est intervenue ;

Considérant que si M. Z... se prévaut d'une bonne insertion sociale, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Corse ait entaché son arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Considérant qu'en faisant état, dans l'arrêté attaqué de ce que M. Z... n'a pas sollicité le bénéfice des mesures de régularisation prévues par la circulaire du 24 juin 1997, le préfet ne s'est en tout état de cause pas référé à un fait matériellement inexact ; que la seule circonstance que M. Z... a, après son interpellation par la gendarmerie, présenté le 29 septembre 1998 une demande d'autorisation de séjour n'établit pas qu'en ordonnant sa reconduite à la frontière le 4 novembre 1998 au motif qu'il était entré irrégulièrement en France et ne justifiait, à la date de la décision, d'aucun titre de séjour, le préfet aurait fait une fausse application de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant que le moyen tiré de ce que le préfet n'aurait pas examiné les risques encourus par M. Z... en cas de retour en Tunisie est inopérant au soutien des conclusions dirigées contre l'arrêté de reconduite à la frontière et, manquant en fait, n'est pas fondé en ce qu'il est invoqué au soutien des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination ;
Considérant que la reconduite à la frontière procède de la situation irrégulière de séjour d'un étranger et ne saurait être regardée comme une expulsion au sens de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 ; que par suite les moyens tirés de ce que les conditions d'une expulsion ne seraient pas réunies, sont inopérants ;
Considérant que l'absence de condamnation par l'autorité judiciaire à l'interdiction de territoire est sans incidence sur la légalité de l'arrêté préfectoral ordonnant la reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Z... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le président du tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Haute-Corse du 4 novembre 1998 ordonnant sa reconduite à la frontière et désignant le pays de destination ;
Article 1er : La requête de M. Z... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Y...
Z..., au préfet de la Haute-Corse et ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 10 ss
Numéro d'arrêt : 202630
Date de la décision : 29/05/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 08 juillet 1998
Arrêté du 04 novembre 1998
Circulaire du 24 juin 1997
Décret du 10 mai 1982 art. 17
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 8
Ordonnance du 02 novembre 1945 art. 22, art. 22 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 29 mai. 2002, n° 202630
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Mochon
Rapporteur public ?: Mme Mitjavile

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:202630.20020529
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