Vu la requête, enregistrée le 3 août 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES YVELINES ; le PREFET DES YVELINES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 23 juin 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 6 juin 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Djamila X... épouse Y... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Versailles et tendant à l'annulation de cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Albanel, Conseiller d'Etat-;
- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., épouse Y..., de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 21 mars 2000, de la décision du PREFET DES YVELINES du 20 mars 2000 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que Mme X... est née en France en 1962 ; qu'elle y a résidé et y a effectué ses études jusqu'à l'âge de dix-sept ans ; qu'apès avoir été mariée en Algérie en 1979, elle a décidé de regagner la France en 1998 à la suite des menaces et des mauvais traitements qu'elle a subis de la part de son mari resté en Algérie ; que son père et sa mère, ainsi que cinq frères et soeurs de nationalité française, vivent en France depuis longtemps ; qu'ainsi et eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, en prenant l'arrêté en date du 6 juin 2000 par lequel il a décidé la reconduite à la frontière de Mme X..., le PREFET DES YVELINES a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences dudit arrêté sur la situation personnelle de l'intéressée ; que, par suite, le PREFET DES YVELINES n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement en date du 23 juin 2000, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté ;
Sur les conclusions de Mme X... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à Mme X... la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du PREFET DES YVELINES est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Mme X... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES YVELINES, à Mme Djamila X..., épouse Y... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.