Vu la requête, enregistrée le 13 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 17 mai 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 20 novembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... épouse Y... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... épouse Y... devant le tribunal administratif de Paris tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Albanel, Conseiller d'Etat-;
- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X... épouse Y... , de nationalité chinoise, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 19 juin 1998, de la décision du PREFET DE POLICE du 28 mai 1998 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet de police peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant qu'aux termes de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion ( ...) 8° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ( ...) les étrangers mentionnés aux 1° à 6° et 8° ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ( ...)"
Considérant que si Mme X... épouse Y... fait valoir qu'elle doit faire l'objet d'un suivi médical régulier pour une maladie lithiasique vésiculaire qui peut nécessiter une intervention chirurgicale, il ne ressort des pièces du dossier ni que son état de santé fasse obstacle à son éloignement du territoire français, ni qu'elle ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement approprié et d'un suivi spécialisé dans son pays d'origine ; qu'ainsi, l'arrêté préfectoral du 20 novembre 2000 n'a pas été pris en méconnaissance des dispositions du 8° de l'article 25 précité de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, par suite, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce motif pour l'annuler ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens de la requête de Mme X... , épouse Y... devant le tribunal administratif ;
Considérant que Mme X... épouse Y... est l'épouse d'un ressortissant Chinois, lui même en situation irrégulière ; que si Mme X... épouse Y... soutient qu'elle habite chez sa soeur, titulaire d'une carte de séjour, qu'elle est bien intégrée ainsi que son mari dans la société française et que sa vie familiale est en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de l'intéressée en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté préfectoral du 20 novembre 2000 ait porté à la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise ; qu'ainsi, cette décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que si Mme X... épouse Y... ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne susmentionnée, cet arrêté comporte, dans les termes où il est rédigé, une décision distincte fixant la République populaire de Chine comme pays de destination ; que si Mme X... épouse Y... invoque les risques qu'elle encourrait en cas de retour dans son pays d'origine, cette allégation n'est pas assortie de précisions suffisantes de nature à établir la réalité de ces risques ; qu'ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas fondé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par jugement en date du 17 mai 2001, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 20 novembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... épouse Y... ;
Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 17 mai 2001 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X... épouse Y... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mme X... épouse Y... et au ministre de l'intérieur de la sécurité intérieure et des libertés locales .