Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 2 février 2001, présentée par le PREFET DE LA MOSELLE ; le PREFET DE LA MOSELLE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 5 janvier 2001 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il annule son arrêté du 21 décembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Hadj X... et la décision distincte fixant l'Algérie comme pays de destination ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Aladjidi, Auditeur-;
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant que M. X..., de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire plus d'un mois à compter de la notification, le 28 janvier 2000, de la décision du 25 janvier 2000 par laquelle le PREFET DE LA MOSELLE, à la suite du rejet de sa demande tendant à se voir reconnaître la qualité de réfugié, a abrogé son autorisation provisoire de séjour et l'a invité à quitter le territoire français ; que l'intéressé se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 27 bis ajouté à l'ordonnance du 2 novembre 1945 par la loi du 24 août 1993 "un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ( ...)" ; que ce dernier texte énonce que : "Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants" ;
Considérant que, si le PREFET DE LA MOSELLE soutient que l'intéressé n'a pas été en mesure de prouver qu'il serait exposé à des menaces en cas de retour dans son pays d'origine, il ressort toutefois des pièces du dossier soumis au tribunal administratif de Strasbourg et des documents produits devant le Conseil d'Etat que M. X..., qui exerçait la profession d'ébéniste, a dû fuir l'Algérie à la suite de menaces dont il a fait personnellement l'objet de la part de groupes islamistes armés en raison de son refus de se laisser rançonner ; que plusieurs membres de sa proche famille ont été assassinés pour avoir refusé de tels chantages ; que des documents dont l'authenticité n'est pas sérieusement contestée, font état de menaces personnelles graves ; que, dans ces circonstances, il est établi que l'intéressé encourrait, en cas de retour dans son pays d'origine, de graves risques pour sa vie ou sa sécurité ; que, dans ces conditions, le PREFET DE LA MOSELLE ne pouvait légalement ordonner la reconduite de M. X... à destination de l'Algérie ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Article 1er : La requête du PREFET DE LA MOSELLE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Hadj X..., au PREFET DE LA MOSELLE et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.