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21/06/2002 | FRANCE | N°221714

France | France, Conseil d'État, 10 / 9 ssr, 21 juin 2002, 221714


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juin 2000 et 5 octobre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude X..., ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt du 8 mars 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 14 février 1996 du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1986, 1987

et 1988 ;
2°) condamne l'Etat à lui payer une somme de 15 000 F au t...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juin 2000 et 5 octobre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude X..., ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt du 8 mars 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 14 février 1996 du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1986, 1987 et 1988 ;
2°) condamne l'Etat à lui payer une somme de 15 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Salesse, Maître des Requêtes-;
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. X... a créé le 5 septembre 1986 une entreprise individuelle dénommée SCERMAT pour assurer la fabrication et la commercialisation de chenillettes destinées à des engins d'entretien des pistes de ski ou à des engins militaires ; que l'administration lui a refusé le bénéfice des dispositions prévues par les articles 44 bis et 44 quater du code général des impôts en faveur des entreprises nouvelles ;
Considérant qu'aux termes de l'article 44 quater du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux impositions contestées : "Les entreprises créées du 1er janvier 1983 au 31 décembre 1986 ( ...) et répondant aux conditions prévues aux 2° et 3° du II et au III de l'article 44 bis, sont exonérées d'impôt sur le revenu ( ...) à raison des bénéfices industriels et commerciaux qu'elles réalisent à compter de la date de leur création jusqu'au terme du trente-cinquième mois suivant celui au cours duquel cette création est intervenue ( ...)" ; que le III de l'article 44 bis du même code dispose que : "Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration ou d'une restructuration d'activités préexistantes ou pour la reprise de telles activités ne peuvent bénéficier de l'abattement ci-dessus. Toutefois, cette disposition ne s'applique pas aux entreprises créées pour la reprise d'établissements en difficulté" ;
Considérant que, pour refuser la qualification d'entreprise créée pour la reprise d'un établissement en difficulté au sens des dispositions de l'article 44 bis précité, à la société de M. X... qui avait repris l'entreprise SIGAL, la cour administrative d'appel a notamment relevé que celle-ci avait déclaré au titre de l'exercice clos en 1986 un résultat positif de 1 056 000 F, alors qu'elle avait en réalité déclaré une perte de 903 056 F ; qu'ainsi M. X... est fondé à soutenir que la cour administrative d'appel a fondé son arrêt sur des faits matériellement inexacts et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, si l'entreprise SIGAL, reprise par la société SCERMAT, était détentrice de droits de fabrication, elle n'avait pas de capacité de production, et avait dû pour cette raison passer des accords de coopération industrielle avec plusieurs sociétés qui s'étaient successivement retirées ; qu'en avril 1983 elle a passé un tel accord avec la société YUMBO qui a acquis 40% de son capital ; que la société YUMBO a déposé son bilan le 27 novembre 1985 et a été placée en liquidation judiciaire le 26 février 1986 ; qu'ayant échoué, malgré l'aide du ministère de l'industrie, à trouver un nouveau partenaire, la société SIGAL s'est trouvée dépourvue de produits à commercialiser ; qu'à la clôture de l'exercice 1986, elle a dû constater un résultat négatif de 903 056 F alors que son capital social s'élevait seulement à 300 000 F ; qu'ainsi, l'entreprise SIGAL devait être regardée comme un établissement en difficulté au sens de l'article 44 bis du code général des impôts, nonobstant la circonstance qu'elle restait titulaire de droits de fabrication et de trois marchés en cours ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que l'administration a refusé à la société SCERMAT le bénéfice des dispositions de l'article 44 quater du code général des impôts ; que M. X... est, dès lors, fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande en décharge ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 2 286 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt du 8 mars 2000 de la cour administrative d'appel de Lyon et le jugement du 14 février 1996 du tribunal administratif de Grenoble sont annulés.
Article 2 : M. X... est déchargé des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1986, 1987 et 1988.
Article 3 : L'Etat versera à M. X... une somme de 2 286 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Claude X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 10 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 221714
Date de la décision : 21/06/2002
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

19-04-02-01-01-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - PERSONNES ET ACTIVITES IMPOSABLES - EXONERATION DE CERTAINES ENTREPRISES NOUVELLES (ART. 44 BIS ET SUIVANTS DU CGI)


Références :

CGI 44 bis, 44 quater
Code de justice administrative L821-2, L761-1


Publications
Proposition de citation : CE, 21 jui. 2002, n° 221714
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Salesse
Rapporteur public ?: Mme Maugüé

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:221714.20020621
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