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03/07/2002 | FRANCE | N°245236

France | France, Conseil d'État, 5 / 7 ssr, 03 juillet 2002, 245236


Vu 1°, sous le n° 245236, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 et 29 avril 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON (Dordogne), représentée par son maire en exercice, demeurant en cette qualité à l'Hôtel de Ville, rue de la République ; la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance en date du 28 mars 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la suspension, en appl

ication de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de l'e...

Vu 1°, sous le n° 245236, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 et 29 avril 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON (Dordogne), représentée par son maire en exercice, demeurant en cette qualité à l'Hôtel de Ville, rue de la République ; la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance en date du 28 mars 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la suspension, en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de l'exécution de la décision par laquelle le ministre de l'équipement, du logement et des transports a autorisé la société Autoroutes du Sud de la France à exécuter les travaux nécessaires à la réalisation, dans la traversée de l'Elle et des collines de Beauregard et de Burg, sur le territoire de la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON, de la partie comprise entre La Bachellerie et Brignac-la-Plaine de la section reliant Arveyres à Saint-Julien - Puy-Lavèze de l'autoroute A89 Bordeaux-Clermont-Ferrand ;
2°) statuant au fond, d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision susmentionnée ;
3°) d'enjoindre à la société Autoroutes du Sud de la France de cesser tous travaux sur la partie d'autoroute litigieuse ou de s'abstenir d'y entreprendre des travaux ;
4°) de condamner l'Etat et la société Autouroutes du Sud de la France à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 2°, sous le n° 245237, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 avril 2002 et 29 avril 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION ALERTE A89, dont le siège est Les Cottes à Villac (24120), M. X..., M. Lionel Y..., M. Z..., M. Georges A..., M. B..., M. C..., M. André D..., M. LA E..., Mme Paulette F..., M. G..., M. H..., L'AMICALE DES CHASSEURS DE BEAUREGARD, dont le siège est mairie de Beauregard à Beauregard (24120), M. André I..., ; l'ASSOCIATION ALERTE A89 et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance en date du 28 mars 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à la suspension, en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de l'exécution de la décision par laquelle le ministre de l'équipement, du logement et des transports a autorisé la société Autoroutes du Sud de la France à exécuter les travaux nécessaires à la réalisation, dans la traversée de l'Elle et des collines de Beauregard et de Burg, sur le territoire de la commune de Beauregard-de-Terrasson, de la partie comprise entre La Bachellerie et Brignac-la-Plaine de la section reliant Arveyres à Saint-Julien - Puy-Lavèze de l'autoroute A89 Bordeaux-Clermont-Ferrand ;
2°) statuant au fond, d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision susmentionnée ;
3°) d'enjoindre à la société Autoroutes du Sud de la France de cesser tous travaux sur la partie d'autoroute litigieuse ou de s'abstenir d'y entreprendre des travaux ;
4°) de condamner l'Etat et la société Autouroutes du Sud de la France à leur verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la note en délibéré présentée pour la Société des Autoroutes du Sud de la France ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu le décret du 10 janvier 1996 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction de la section Arveyres - Saint-Julien - Puy-Lavèze de l'autoroute A89 et portant modification des plans d'occupation des sols des communes intéressées ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Aladjidi, Auditeur,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON et de l'ASSOCIATION ALERTE A89 et autres, et de la SCP Parmentier, Didier, avocat de la Société Autoroutes du Sud de la France,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON et l'ASSOCIATION ALERTE A89 et autres demandent, par la voie de la cassation, l'annulation de l'ordonnance en date du 28 mars 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leurs demandes tendant à la suspension de la décision par laquelle le ministre de l'équipement, du logement et des transports a autorisé la société des autoroutes du sud de la France à exécuter les travaux nécessaires à la réalisation de la partie comprise entre La Bachellerie et Brignac-la-Plaine de la section reliant Arveyres à Saint-Julien - Puy-Lavèze de l'autoroute A89 Bordeaux-Clermont-Ferrand ; qu'il y a lieu de joindre les deux pourvois pour qu'ils fassent l'objet d'une seule décision ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : "Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés, et notamment du dossier soumis à enquête publique de l'autoroute A89, que les ouvrages nécessaires au franchissement de la colline de Beauregard et du vallon de l'Elle devaient être, dans le projet tel qu'il a été déclaré d'utilité publique par décret en date du 10 janvier 1996, un tunnel d'une longueur de 2 200 mètres et un viaduc de 180 mètres de long et 45 mètres de haut ; que, dans la décision contestée, autorisant l'exécution des travaux nécessaires à la réalisation de la partie de l'autoroute en cause, ces ouvrages ont été remplacés, sans recours préalable à une déclaration d'utilité publique partielle, par un tunnel de 790 mètres complété par une tranchée à ciel ouvert et par un viaduc de 420 mètres de long et 90 mètres de haut ; qu'ainsi, le juge des référés n'a pu, sans dénaturer les pièces du dossier, juger que le moyen tiré de ce que les modifications susmentionnées affectaient substantiellement les caractéristiques essentielles de l'opération et méconnaîssaient ainsi la portée de la déclaration d'utilité publique, n'était pas propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; que la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON et l'ASSOCIATION ALERTE A89 et autres sont, par suite, fondées à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie"; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, que l'exécution de la décision litigieuse porterait atteinte, de manière grave et immédiate, aux intérêts défendus par les requérants ; qu'est ainsi remplie la condition d'urgence posée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative ;
Considérant, d'autre part, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus le moyen tiré de ce que les modifications autorisées par la décision contestée affectent de manière substantielle, eu égard à leur ampleur et aux types d'ouvrage concernés, les caractéristiques essentielles de la partie d'autoroute en cause, et entachent ainsi cette décision, en l'absence de déclaration d'utilité publique partielle, d'une violation du décret du 10 janvier 1996 par lequel la construction de cette autoroute avait été déclarée d'utilité publique, est propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de ladite décision ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prononcer la suspension de la décision par laquelle le ministre de l'équipement, du logement et des transports a autorisé les travaux nécessaires à la réalisation de la partie comprise entre les points kilomètriques 144 et 147 de la section reliant Arveyres à Saint-Julien - Puy-Lavèze de l'autoroute A89 Bordeaux-Clermont-Ferrand jusqu'à ce qu'il ait été statué sur les demandes de la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON et de l'ASSOCIATION ALERTE A89 et autres, enregistrées le 13 mars 2002 au greffe du tribunal administratif de Bordeaux et tendant à l'annulation de ladite décision ;
Considérant qu'il y a lieu d'assortir le prononcé de la suspension d'une injonction à la société des autoroutes du Sud de la France de s'abstenir d'entreprendre les travaux relatifs à ladite partie de l'autoroute A89 ou de cesser ces travaux s'ils ont déjà commencé ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat et la société des autoroutes du Sud de la France à verser chacun, d'une part une somme de 2 000 euros à la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON et d'autre part une somme de 2 000 euros à l'ASSOCIATION ALERTE A89 et autres, au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens, tant en première instance qu'en cassation ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, en revanche, obstacle à ce que la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON et l'ASSOCIATION ALERTE A89 et autres, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, soient condamnées à payer à la société des autoroutes du Sud de la France les sommes qu'elle a demandées, au titre des frais exposés par elle devant le tribunal administratif et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'ordonnance du 28 mars 2002 du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux est annulée.
Article 2 : L'exécution de la décision du ministre de l'équipement, des transports et du logement autorisant la société des autoroutes du sud de la France à exécuter les travaux nécessaires à la réalisation de la partie située entre les points kilomètriques 144 et 147 de la section reliant Arveyres à Saint-Julien - Puy-Lavèze de l'autoroute A89 Bordeaux-Clermont-Ferrand est suspendue jusqu'à ce qu'il ait été statué sur les demandes en annulation de la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON et de l'ASSOCIATION ALERTE A89 et autres, enregistrées le 13 mars 2002 au greffe du tribunal administratif de Bordeaux.
Article 3 : Il est enjoint à la société des autoroutes du Sud de la France de s'abstenir d'entreprendre les travaux sur la partie susmentionnée de l'autoroute A89 ou de cesser ces travaux s'ils ont commencé.
Article 4 : L'Etat et la société des autoroutes du Sud de la France verseront chacun, d'une part une somme de 2 000 euros à la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON et d'autre part une somme de 2 000 euros à l'ASSOCIATION ALERTE A89 et autres au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.
Article 5 : Les conclusions de première instance de la société des autoroutes du Sud de la France tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE BEAUREGARD-DE-TERRASSON, à l'ASSOCIATION ALERTE A89, à M. X..., à M. Lionel Y..., à M. Z..., à M. Georges A..., à M. B..., à M. C..., à M. André D..., à M. LA E..., à Mme Paulette F..., à M. G..., à M. H..., à l'AMICALE DES CHASSEURS DE BEAUREGARD, à M. André I..., à la société Autoroutes du Sud de la France et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.


Synthèse
Formation : 5 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 245236
Date de la décision : 03/07/2002
Sens de l'arrêt : Annulation suspension injonction
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Référé

Analyses

54-035-02-03-01,RJ1 PROCEDURE - PROCEDURES INSTITUEES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000 - REFERE SUSPENSION (ARTICLE L.521-1 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE) - CONDITIONS D'OCTROI DE LA SUSPENSION DEMANDEE - MOYEN PROPRE A CREER UN DOUTE SERIEUX SUR LA LEGALITE DE LA DECISION - Existence - a) Moyen tiré de ce que les modifications apportées à une section d'autoroute affectent substantiellement les caractéristiques essentielles de l'opération et méconnaissent ainsi la portée de la déclaration d'utilité publique relative à l'ensemble de l'ouvrage (1) - b) Contrôle du juge de cassation - Appréciation souveraine du juge des référés, sauf dénaturation.

54-035-02-03-01 a) Dans l'hypothèse où, dans la décision autorisant l'exécution des travaux nécessaires à la réalisation d'une section d'autoroute, un tunnel de 2200 mètres et un viaduc de 180 mètres de long et 45 mètres de haut ont été remplacés, sans recours préalable à une déclaration d'utilité publique partielle, par d'une part, un tunnel de 790 mètres complété par une tranchée à ciel ouvert et, d'autre part, un viaduc de 420 mètres de long et 90 mètres de haut, le moyen tiré de ce que ces modifications à la section d'autoroute affectent substantiellement les caractéristiques essentielles de l'opération et méconnaissent ainsi la portée de la déclaration d'utilité publique relative à l'ensemble de l'ouvrage est propre à créer un doute sérieux sur la légalité la décision d'autorisation de travaux. b) Le juge des référés apprécie souverainement, sauf dénaturation, si les modifications apportées ont affecté substantiellement les caractéristiques essentielles de l'opération d'une façon telle qu'elles conduisent à méconnaître la portée de la déclaration d'utilité publique relative à l'ensemble de l'ouvrage.


Références :

Code de justice administrative L521-1, L821-2, L761-1
Décret du 10 janvier 1996

1.

Cf. 2001-07-02 Commune de la Courneuve, n° 211231, à publier ;

Rappr. 1998-02-18 Association pour la sauvegarde de la région de Langeais et autres, T. p. 1237.


Publications
Proposition de citation : CE, 03 jui. 2002, n° 245236
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Robineau
Rapporteur ?: M. Aladjidi
Rapporteur public ?: M. Chauvaux
Avocat(s) : SCP Vier, Barthélémy. SCP Parmentier, Didier, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:245236.20020703
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