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10/07/2002 | FRANCE | N°237089

France | France, Conseil d'État, 9 ss, 10 juillet 2002, 237089


Vu la requête, enregistrée le 8 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 mai 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 23 octobre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Alassane X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauv

egarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n°...

Vu la requête, enregistrée le 8 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 mai 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 23 octobre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Alassane X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Hourdin, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lesourd, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3°) Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité sénégalaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 13 octobre 1999, de la décision du 6 octobre 1999 par laquelle le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite à la frontière ; qu'il a ainsi fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière en date du 23 octobre 2000 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de la même ordonnance : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (.) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant" ;
Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris en dehors des cas d'urgence absolue ou de nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne peut légalement prendre une mesure de reconduite à la frontière à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant que s'il soutient être entré en France le 5 décembre 1988 et y vivre depuis, M. X... n'établit pas, par les pièces qu'il produit, la continuité de son séjour sur le territoire national depuis plus de dix ans ; que, par suite, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a retenu le moyen tiré de la méconnaissance du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée pour annuler l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 23 octobre 2000 ;

Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... tant devant le tribunal administratif que devant le Conseil d'Etat ;
Sur l'exception d'illégalité de la décision du 6 octobre 1999 :
Considérant que si l'article 12 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée impose au préfet de consulter la commission du titre de séjour lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour à un étranger relevant des catégories mentionnées aux articles 12 bis et 15 de cette ordonnance, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. X... appartienne à l'une de ces catégories ; qu'il en résulte que le moyen tiré de ce que la décision du 6 octobre 1999 serait irrégulière faute d'avoir été précédée de la consultation de la commission du titre de séjour, doit, en tout état de cause, être écarté ;
Sur les autres moyens :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... est célibataire et sans enfant, qu'il ne justifie pas d'une vie familiale effective avec les membres de sa famille résidant régulièrement en France et ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que la circonstance qu'il serait bien intégré dans la société française n'est pas de nature à établir que la mesure d'éloignement aurait, sur sa situation personnelle, des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, dans les circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté n'a pas porté au droit de M. X... au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise et n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant que le moyen tiré de la violation des dispositions des articles 22 et suivants de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée n'est pas assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement en date du 10 mai 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 23 octobre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Article 1er : Le jugement en date du 10 mai 2001 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Alassane X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 9 ss
Numéro d'arrêt : 237089
Date de la décision : 10/07/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 23 octobre 2000
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 25, art. 12 bis, art. 12 quater, art. 15


Publications
Proposition de citation : CE, 10 jui. 2002, n° 237089
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Hourdin
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:237089.20020710
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