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29/07/2002 | FRANCE | N°229981

France | France, Conseil d'État, 1 / 2 ssr, 29 juillet 2002, 229981


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 février et 6 juin 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. et Mme Gauthier X..., ; M. et Mme X... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 décembre 2000 portant agrément de la convention du 1er janvier 2001 relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage et du règlement annexé à cette convention ;
2°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 3 000 F (457,35 euros) au titre des frais exposés par eu

x et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 février et 6 juin 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. et Mme Gauthier X..., ; M. et Mme X... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 décembre 2000 portant agrément de la convention du 1er janvier 2001 relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage et du règlement annexé à cette convention ;
2°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 3 000 F (457,35 euros) au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le décret n° 2000-601 du 30 juin 2000 relatif au régime d'assurance chômage des travailleurs privés d'emploi ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Landais, Auditeur ;
- les observations de la SCP Gatineau, avocat du Mouvement des entreprises de France, de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de la Confédération française démocratique du travail et de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du Conseil de l'union professionnelle artisanale,
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté attaqué en tant qu'il agrée des clauses incompatibles avec les dispositions législatives ou réglementaires alors en vigueur :
Considérant que, par une décision du 11 juillet 2001, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a annulé l'arrêté attaqué en tant qu'il agrée les stipulations des articles 1er-2,-3,-4, et 6, deuxième alinéa de la convention, ainsi que celles des articles 4 a), deuxième tiret, 17,-3, second alinéa, 43, 44 et 45 du règlement annexé ; que, par suite, les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué en tant qu'il agrée ces stipulations sont devenues sans objet ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté attaqué en tant qu'il agrée les autres stipulations :
Sur la fin de non-recevoir opposée en défense :
Considérant que M. et Mme X... font valoir qu'ils sont demandeurs d'emploi indemnisés par le régime d'assurance chômage organisé par la convention du 1er janvier 2001 et les textes pris pour son application ; qu'ainsi, ils justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir contre l'arrêté du 4 décembre 2000 portant agrément de cette convention et du règlement qui lui est annexé ;
En ce qui concerne les moyens tirés de vices propres à l'arrêté d'agrément :

Considérant que l'article L. 352-2-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 10 juillet 1989, dispose que : "Lorsque l'accord mentionné à l'article L. 352-1 n'a pas été signé par la totalité des organisations les plus représentatives d'employeurs et de travailleurs, le ministre chargé de l'emploi peut cependant procéder à son agrément si l'avis motivé favorable du comité supérieur de l'emploi a été émis sans l'opposition écrite et motivée, soit de deux organisations d'employeurs, soit de deux organisations de travailleurs représentées à ce comité./ En cas d'opposition dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, le ministre peut consulter à nouveau le comité supérieur de l'emploi sur la base d'un rapport qui précise la portée des dispositions en cause, ainsi que les conséquences de l'agrément./ Le ministre chargé de l'emploi peut décider l'agrément au vu du nouvel avis émis par le comité ; cette décision doit être motivée" ; que s'il est soutenu que le ministre chargé du travail ne pouvait accorder son agrément à la convention dite du 1er janvier 2001 au motif que celle-ci n'avait pas été signée par toutes les organisations syndicales les plus représentatives de travailleurs, il ressort des pièces du dossier que, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 352-2-1 du code du travail, la commission permanente du comité supérieur de l'emploi a été saisie une seconde fois, à la suite de l'opposition écrite et motivée de deux organisations de travailleurs, sur la base d'un rapport qui précisait la portée des dispositions en cause ; que le ministre chargé de l'emploi a décidé de l'agrément au vu du nouvel avis émis par le comité ; que le moyen tiré du défaut de signature de la convention agréée par l'arrêté attaqué par l'ensemble des organisations représentatives de travailleurs doit, par suite, être écarté ;
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait au ministre de prendre un arrêté distinct pour agréer les mesures transitoires prévues à l'article 10 de la convention du 1er janvier 2001 ;
En ce qui concerne les moyens relatifs à la légalité de certaines stipulations de la convention agréée :

Considérant que le moyen tiré de ce que la convention et son règlement annexé seraient, dans leur ensemble, contraires au code du travail, aux articles 3, 34 et 37 de la Constitution, aux articles 3, 4, 6 et 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et aux articles 1 et 2 du code civil en ce qu'ils auraient pour objet de "pallier les carences de la loi" n'est pas assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ;
S'agissant du principe même du plan d'aide au retour à l'emploi :
Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles L. 351-1, L. 351-2, L. 351-3 et L. 351-19 du code du travail, les travailleurs involontairement privés d'emploi, aptes au travail et cherchant un emploi, ont droit à un revenu de remplacement prenant la forme notamment d'allocations d'assurance qui sont accordées pour une durée limitée, compte tenu de l'âge des intéressés et de leurs références de travail ; que l'article L. 351-16 du même code dispose que "la condition de recherche d'emploi prévue à l'article L. 351-1 est satisfaite dès lors que les intéressés sont inscrits comme demandeurs d'emploi et accomplissent des actes positifs de recherche d'emploi" ; que l'article R. 351-27 précise que "sont considérés comme étant à la recherche d'un emploi, pour l'application de l'article L. 351-16, les personnes inscrites à l'agence nationale pour l'emploi qui accomplissent de manière permanente ( ...) toutes les démarches en leur pouvoir en vue de leur reclassement ou de leur insertion professionnelle" ; que les dispositions du 2 de l'article R. 351-28 sanctionnent par l'exclusion du revenu de remplacement les personnes qui "ne peuvent justifier de l'accomplissement d'actes positifs de recherche d'emploi" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'absence ou l'insuffisance notoire d'actes positifs de recherche d'emploi peut donner lieu à tout moment à une exclusion temporaire ou définitive du revenu de remplacement ; que les stipulations de la convention du 1er janvier 2001 relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage et de son règlement annexé, en faisant de l'engagement formel du demandeur d'emploi à respecter un "plan d'aide au retour à l'emploi", signé par lui et contenant notamment les démarches qu'il doit réaliser dans le cadre de sa recherche d'emploi, une condition au versement de l'allocation, se bornent à rappeler les exigences légales du régime d'assurance chômage, qui font de l'accomplissement d'actes positifs de recherche d'emploi l'une des conditions du versement de l'allocation, sans ajouter à celles-ci ni porter atteinte à la nature même de ce régime ; que les stipulations de la convention du 1er janvier 2001 et de son règlement annexé relatives au "plan d'aide au retour à l'emploi" définissent ainsi, conformément aux dispositions de l'article L. 351-8 du code du travail, les mesures d'application de l'une des conditions posées par le législateur au versement de l'allocation d'assurance chômage ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué porterait agrément d'un accord empiétant sur le domaine de la loi doit être écarté ;
S'agissant des stipulations prévoyant la signature d'une convention entre l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) et l'agence nationale pour l'emploi (ANPE) :

Considérant que l'article L. 311-8 du code du travail prévoit que l'agence nationale pour l'emploi (ANPE) peut conclure des conventions avec, notamment, les institutions gestionnaires du régime d'assurance chômage ; que, par suite, les partenaires conventionnels n'ont pas empiété sur les compétences du législateur en prévoyant que l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) pourrait conclure une convention avec l'agence nationale pour l'emploi ;
S'agissant des stipulations de l'article 51 du règlement annexé en tant qu'elles réservent aux seules parties à la convention la possibilité de siéger dans les commissions paritaires locales :
Considérant qu'aucune disposition du code du travail ni aucun principe général du droit n'imposait, contrairement à ce qui est soutenu, aux signataires de la convention du 1er janvier 2001 de faire siéger dans les commissions paritaires locales, compétentes pour examiner certains cas particuliers ou statuer sur les réclamations formées contre les décisions suspendant le versement des allocations, des représentants des organisations syndicales n'ayant pas signé cette convention ; que le moyen doit, par suite, être écarté ;
S'agissant des stipulations de la convention et de son règlement annexé confiant un pouvoir normatif à la commission paritaire nationale composée des seuls représentants des organisations signataires et au conseil d'administration et au bureau de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce :
Considérant que, par une décision du 6 octobre 2000, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a sursis à statuer jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la question de savoir si les parties à la convention du 1er janvier 1997 pouvaient, sans méconnaître l'article L. 351-8 du code du travail, comme elles l'ont prévu à l'article 27 du règlement annexé à cette convention, confier à la commission paritaire nationale instituée par les stipulations de l'article 2 de la convention le pouvoir de définir les "périodes de suspension du contrat de travail" ; que le moyen soulevé dans la présente requête soulève la même question ; qu'il y a lieu, dès lors, pour le Conseil d'Etat, dans les circonstances de l'espèce, de surseoir à statuer sur la requête jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la question préjudicielle dont s'agit et dont dépend la légalité de l'ensemble des stipulations de la convention du 1er janvier 2001 qui confient un pouvoir normatif, d'une part, à la commission paritaire nationale, composée exclusivement de représentants des seules parties signataires de la convention et, d'autre part, au conseil d'administration et au bureau de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce ; S'agissant des stipulations de l'article 10-2 de la convention :

Considérant qu'au titre des mesures transitoires, la convention a prévu, à son article 10-2, que les salariés privés d'emploi indemnisés au 31 décembre 2000 et ceux admis entre le 1er janvier 2001 et le 30 juin 2001 seraient couverts par les dispositions de la convention du 1er janvier 1997 relative à l'assurance-chômage ainsi que ses textes d'application dans leur rédaction au 31 décembre 2000, sous certaines réserves parmi lesquelles figure la possibilité pour ces salariés d'opter à compter du 1er juillet 2001 pour l'application de la nouvelle convention du 1er janvier 2001 ;
Considérant, en premier lieu, que la convention du 1er janvier 1997 relative à l'assurance-chômage et le règlement qui lui est annexé ont fait l'objet d'un agrément par l'arrêté ministériel du 18 février 1997 publié au Journal officiel de la République française le 20 mars 1997 ; qu'en l'absence de changements dans les circonstances de droit ou de fait, qui ne sont d'ailleurs même pas allégués par les requérants, M. et Mme X... ne sont pas recevables à invoquer, à l'occasion de leur contestation des stipulations de l'article 10-2, dont le seul objet est de proroger à titre transitoire, pour certains salariés, les effets de ces convention et règlement, l'illégalité dont seraient entachées les stipulations prorogées ;
Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que les stipulations de l'article 10-2 n'énumèrent pas de manière précise les textes pris en application de la convention du 1er janvier 1997 dont les effets sont prorogés, à titre transitoire, pour certains salariés n'est pas de nature à entacher ces stipulations d'illégalité ;

Considérant, en troisième lieu, que les requérants soutiennent que si, en application de l'article L. 351-8 du code du travail, il appartient aux accords conclus entre employeurs et travailleurs à l'effet de servir des allocations aux travailleurs sans emploi de définir les modalités d'application des dispositions législatives relatives à l'assurance chômage, les parties à la convention d'assurance chômage du 1er janvier 1997 n'ont pu légalement subdéléguer le pouvoir que la loi leur a attribué en donnant à la commission paritaire nationale ou au conseil d'administration et au bureau de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce compétence pour définir certaines de ces modalités d'application sans que l'autorité ministérielle soit appelée à donner l'agrément prévu à l'article L. 352-2 du code du travail ; qu'ils en concluent que les stipulations de l'article 10-2 de la convention du 1er janvier 2001 sont illégales en tant qu'elles prorogent, à titre transitoire pour certains salariés, les effets de délibérations de la commission paritaire nationale et de décisions de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce prises en application de la convention du 1er janvier 1997 et entachées d'incompétence ; que, toutefois, l'arrêté attaqué du 4 décembre 2000 a pour effet, en tant qu'il a agréé les stipulations de l'article 10 2, d'agréer, pour la période et dans la limite des champs couverts par ces stipulations, l'ensemble des délibérations de la commission paritaire nationale et des décisions de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce prises pour l'application des dispositions législatives relatives à l'assurance-chômage sous l'empire de la convention du 1er janvier 1997, qui doivent, de ce fait, être regardées comme des avenants à la convention nationale relative à l'assurance chômage du 1er janvier 1997 ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
Considérant que la circonstance que ces délibérations ou décisions n'auraient pas été publiées au Journal officiel est sans influence sur la légalité de l'arrêté attaqué ;
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué en tant qu'il agrée les stipulations des articles 1er-2,-3,-4, et 6, deuxième alinéa de la convention, ainsi que celles des articles 4 a), deuxième tiret, 17,-3, second alinéa, 43, 44 et 45 du règlement annexé.
Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de M. et Mme X... dirigée contre l'arrêté du 4 décembre 2000 portant agrément de la convention du 1er janvier 2001 jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la question de savoir si les parties à la convention pouvaient confier à la commission paritaire nationale, composée exclusivement des représentants des organisations signataires, et au conseil d'administration et bureau de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce le soin d'interpréter, préciser ou compléter les règles de fonctionnement du régime d'assurance chômage sans méconnaître l'article R. 351-8 du code du travail.
Article 3 : M. et Mme X... devront justifier, dans le délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, de leur diligence à saisir de cette question la juridiction compétente.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X... est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Gauthier X..., à l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 1 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 229981
Date de la décision : 29/07/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-10-02 TRAVAIL ET EMPLOI - POLITIQUES DE L'EMPLOI - INDEMNISATION DES TRAVAILLEURS PRIVES D'EMPLOI


Références :

Arrêté du 18 février 1997
Arrêté du 04 décembre 2000 annexe, art. 10
Arrêté du 01 janvier 2001
Code civil 1, 2
Code du travail L352-2-1, L351-1, L351-2, L351-3, L351-19, L351-16, L351-8, L311-8, L352-2
Constitution du 04 octobre 1958 art. 3, art. 34, art. 37, art. 84
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 art. 3, art. 4, art. 6, art. 16
Loi 89-488 du 10 juillet 1989


Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2002, n° 229981
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mlle Landais
Rapporteur public ?: Mme Boissard

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:229981.20020729
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