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29/07/2002 | FRANCE | N°237247

France | France, Conseil d'État, 9 ss, 29 juillet 2002, 237247


Vu la requête, enregistrée le 13 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 18 mai 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 20 novembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Sekou X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauveg

arde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 4...

Vu la requête, enregistrée le 13 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 18 mai 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 20 novembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Sekou X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Wauquiez-Motte, Auditeur,
- les observations de Me Delvolvé, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête du PREFET DE POLICE :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le PREFET DE POLICE a reçu notification du jugement attaqué le 13 juillet 2001 ; que sa requête contre ce jugement a été enregistrée le 13 août 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, dans le délai d'un mois fixé par l'article 22 bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 ; que, par suite, cette requête n'est pas tardive ;
Sur la requête du préfet de police :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (.) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (.)" ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité malienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 10 janvier 2000, de la décision du 28 décembre 1999 par laquelle le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite à la frontière ;
Considérant qu'aux termes du 3° de l'article 12 bis de la même ordonnance : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (.) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant" ;
Considérant que pour faire droit aux conclusions de la demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2000 du PREFET DE POLICE ordonnant la reconduite à la frontière de M. X..., le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a accueilli le moyen tiré, par la voie de l'exception de l'illégalité de la décision dudit préfet en date du 28 décembre 1999 refusant l'admission au séjour de M. X..., de ce que cet arrêté méconnaissait les dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance précitée ;
Considérant toutefois que, s'il soutient être entré en France en avril 1988 et y vivre depuis lors, M. X... n'établit pas, par les pièces qu'il produit, la continuité de son séjour sur le territoire national depuis plus de dix ans ; qu'ainsi, la décision du 28 décembre 1999 refusant l'admission au séjour de M. X... n'a pas méconnu les dispositions précitées ; que, par suite, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur le moyen susanalysé pour annuler ledit arrêté ;

Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Paris et devant le Conseil d'Etat ;
Sur l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour :
Considérant que M. X... soutient que le préfet ne pouvait lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sans avoir saisi, au préalable, la commission du titre de séjour ; qu'aux termes de l'article 12 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, la commission du titre de séjour "est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15" ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... n'appartenait à aucune des catégories mentionnées aux articles 12 bis et 15 susmentionnés au moment du refus de séjour contesté ; que, dès lors, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour prévue par l'article 12 quater précité ; qu'ainsi, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur les autres moyens :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2°- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé et de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant que M. X... est célibataire, sans enfant et n'allègue pas ne plus avoir d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué aurait porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il est intervenu ;
Considérant, par ailleurs, que M. X... n'apporte aucune précision permettant d'apprécier le bien-fondé du moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué serait contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 18 mai 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser au conseil de M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 18 mai 2001 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par M. X... est rejetée, ainsi que ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Sekou X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 9 ss
Numéro d'arrêt : 237247
Date de la décision : 29/07/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 20 novembre 2000
Code de justice administrative L761-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3, art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22 bis, art. 22, art. 12 bis, art. 12 quater, art. 15


Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2002, n° 237247
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Wauquiez-Motte
Rapporteur public ?: M. Courtial

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:237247.20020729
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