Vu la requête, enregistrée le 6 décembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Mohamed X..., ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1° d'annuler le jugement du 10 octobre 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juin 2001 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2° d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3° de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 988 F (760,42 euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'égard d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des documents précis et concordants produits par le requérant, que, à la date à laquelle l'arrêté a été pris, M. X..., dont il n'est pas allégué que la présence en France constituait une menace pour l'ordre public, résidait habituellement sur le territoire français depuis plus de dix ans et pouvait ainsi bénéficier d'une carte de séjour temporaire en application des dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, par suite, le préfet de police ne pouvait, sans méconnaître ces dispositions, prendre l'arrêté attaqué ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'applications des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X... la somme de 760 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 10 octobre 2001 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 5 juin 2001 du préfet de police ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... sont annulés.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. X... la somme de 760 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Mohamed X..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.