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02/10/2002 | FRANCE | N°240792

France | France, Conseil d'État, 02 octobre 2002, 240792


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 6 décembre 2001, présentée par M. Abdelkarim X..., ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°)° d'annuler le jugement du 12 novembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 25 octobre 2001 du préfet de la Meuse ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision même jour fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit ;
2°) d'annuler

pour excès de pouvoir ces deux décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 6 décembre 2001, présentée par M. Abdelkarim X..., ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°)° d'annuler le jugement du 12 novembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 25 octobre 2001 du préfet de la Meuse ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision même jour fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces deux décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ....) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ....)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 28 juillet 2001, de la décision du 24 juillet 2001 du préfet de la Meuse lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sur la légalité externe de l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué :
Considérant que l'arrêté attaqué énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;
Sur la légalité interne de l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué :
Sur l'exception d'illégalité :
Considérant qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X... excipe de l'illégalité de la décision du 16 mai 2001 du ministre de l'intérieur lui refusant l'asile territorial ; qu'aux termes de l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952 modifiée relative au droit d'asile : "Dans les conditions compatibles avec les intérêts du pays, l'asile territorial peut être accordé par le ministre de l'intérieur après consultation du ministre des affaires étrangères à un étranger si celui-ci établit que sa vie ou sa liberté est menacée dans son pays ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (.) " ; que si M. X... soutient qu'il est personnellement menacé par un groupement islamiste depuis qu'il a décidé de rompre tout lien avec cette organisation et qu'il a été contraint de quitter son pays d'origine, où il menait une vie confortable, du fait des menaces pesant sur lui et son entourage, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant le bénéfice de l'asile territorial à l'intéressé le ministre de l'intérieur ait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à soutenir que la décision du 16 mai 2001 refusant de lui accorder le bénéfice de l'asile territorial serait entachée d'illégalité ; qu'ainsi l'exception d'illégalité invoquée doit, en tout état de cause, être écartée ;
Sur les autres moyens :

Considérant que M. X... ne saurait utilement se prévaloir de l'avenant, signé le 11 juillet 2001, portant modification de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, cet avenant n'étant pas entré en vigueur à la date de l'arrêté attaqué ;
Considérant qu'aux termes de l'article 25 : "Ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion, en application de l'article 23 : (.) 8° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi." ; que si M. X... fait valoir qu'il souffre d'un diabète de type 2 pour lequel il suit actuellement un traitement, il ne ressort pas des pièces du dossier que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni, en tout état de cause, qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué serait contraire aux dispositions précitées ;
Considérant que si, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X... fait valoir qu'il vit en France auprès de son épouse et de son enfant et qu'une partie de sa famille réside également en France, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment du fait que l'épouse de M. X... est également en situation irrégulière sur le territoire français, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;
Considérant que M. X... fait valoir également que son épouse souffre de troubles psychiatriques aigus et qu'elle a fait l'objet d'une intervention chirurgicale importante, que ses enfants sont scolarisés en France et sont bien intégrés à la société française ; que ces circonstances ne suffisent pas à faire regarder l'arrêté attaqué comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant signée le 26 janvier 1990 : "Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale" ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la mesure litigieuse ait, dans les circonstances de l'espèce, méconnu les stipulations précitées ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
Considérant que par une décision du 25 octobre 2001 le préfet de la Meuse a décidé que M. X... serait reconduit à destination de l'Algérie ; que M. X... n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité des risques auxquels, selon lui, il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Abdelkarim X..., au préfet de la Meuse et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 16 mai 2001
Arrêté du 25 octobre 2001
Convention du 26 janvier 1990 New-York droits de l'enfant art. 3
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3
Loi 52-893 du 25 juillet 1952 art. 13, art. 25
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation: CE, 02 oct. 2002, n° 240792
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: M. Le Chatelier

Origine de la décision
Date de la décision : 02/10/2002
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 240792
Numéro NOR : CETATEXT000008146492 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2002-10-02;240792 ?
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