La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/10/2002 | FRANCE | N°237528

France | France, Conseil d'État, 16 octobre 2002, 237528


Vu la requête enregistrée sous le numéro 237528 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 22 août 2001, présentée par Mme Véra X... ; Mme X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1) d'annuler le jugement du 30 mai 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 10 janvier 2001 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3) d'enjoindre au préfet de police de lui dé

livrer un titre de séjour en qualité d'étudiant ou, à titre subsidiaire, portant...

Vu la requête enregistrée sous le numéro 237528 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 22 août 2001, présentée par Mme Véra X... ; Mme X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1) d'annuler le jugement du 30 mai 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 10 janvier 2001 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant ou, à titre subsidiaire, portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision du Conseil d'Etat, sous astreinte de 1 000 F ( 152 euros ) par jour de retard ;
4) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 12 000 F (1 829 euros), au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 22 août 2001, sous le numéro 237529, présentée par M. Aleksandar X... ; M. X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1) d'annuler le jugement du 30 mai 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 10 janvier 2001 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant ou, à titre subsidiaire, portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision du Conseil d'Etat, sous astreinte de 1 000 F par jour de retard ;
4) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 12 000 F (1 829 euros), au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes présentées par M. X... et par Mme X... présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu d'y statuer par une seule décision ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens des requêtes ;
Considérant que M. et Mme X..., de nationalité yougoslave, sont entrés respectivement en France en 1991 et en 1993, et ont résidé régulièrement en France jusqu'en juin 2000, sous couvert de titres de séjour en qualité d'étudiant ; qu'ils ont eu deux enfants nés en 1997 et en 1998 ; qu'en outre les parents de M. X... résident régulièrement en France depuis 1987 ; qu'ainsi M. et Mme X... sont fondés à soutenir, eu égard à la durée et aux conditions de leur séjour en France, qu'en prenant les arrêtés attaqués ordonnant leur reconduite à la frontière, le préfet de police a, dans les circonstances de l'espèce, porté une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X... sont fondés à soutenir que c'est à tort que par les jugements attaqués, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de police ordonnant leur reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une nouvelle décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé" ; que le III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dispose que : " Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, ( ...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas " ;

Considérant que la présente décision prononce l'annulation pour excès de pouvoir d'arrêtés ordonnant la reconduite à la frontière de M. et Mme X... et non pas de décisions refusant de délivrer à ceux-ci une carte de séjour temporaire ; que, dès lors, M. et Mme X... ne sont pas fondés à invoquer l'autorité de la chose jugée qui s'attacherait aux motifs de la présente décision pour soutenir que celle-ci implique nécessairement, au sens des dispositions précitées de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, la délivrance d'une carte de séjour temporaire ;
Mais considérant qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées du III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été saisi ou non d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prescrire au préfet de police de se prononcer sur la situation de M. et Mme X... dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu de condamner l'Etat à verser à chacun des requérants la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens
Article 1er : Les jugements du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris , ensemble les arrêtés des 10 janvier 2001 du préfet de police ordonnant la reconduite à la frontière de M. et Mme X... sont annulés.
Article 2 : Le préfet de police réexaminera la situation de M. et Mme X... au regard du droit au séjour dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. et Mme X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Aleksandar X..., à Mme Véra X..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 237528
Date de la décision : 16/10/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Code de justice administrative L911-1, L761-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 16 oct. 2002, n° 237528
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:237528.20021016
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award