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16/10/2002 | FRANCE | N°242375

France | France, Conseil d'État, 6 ss, 16 octobre 2002, 242375


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 janvier 2002 et 27 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Gérard X..., ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 18 décembre 2001 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre l'a déclaré démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal et inéligible pendant un an à ces fonctions et a proclamé Mme Tania Y... élue en qualité de conseiller municipal de Petit-Bourg ;
2°) °annule la décision de la Commission n

ationale des comptes de campagne et des financements politiques du 8 novemb...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 janvier 2002 et 27 février 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Gérard X..., ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 18 décembre 2001 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre l'a déclaré démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal et inéligible pendant un an à ces fonctions et a proclamé Mme Tania Y... élue en qualité de conseiller municipal de Petit-Bourg ;
2°) °annule la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques du 8 novembre 2001 rejetant son compte de campagne ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Keller, Maître des Requêtes ;
- les observations de la SCP Thouin-Palat, Urtin-Petit, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que le tribunal administratif de Basse-Terre, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments du requérant, n'a, en s'abstenant de comparer le montant des dépenses payées directement par le candidat avec le plafond des dépenses autorisées, mais en comparant le montant en question à celui des dépenses réellement effectuées, ni omis de répondre à un moyen opérant, ni entaché son jugement d'insuffisance de motivation ;
Sur la régularité de la saisine du tribunal administratif par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques :
Considérant qu'aux termes des deuxième et quatrième alinéas de l'article L. 52-12 du code électoral : "Dans les deux mois qui suivent le tour de scrutin où l'élection a été acquise, chaque candidat ( ...) dépose à la préfecture son compte de campagne et ses annexes, présentés par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés et accompagné des justificatifs de ses recettes ainsi que des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte. ( ...) Le compte de campagne et ses annexes sont transmis à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques." ; qu'aux termes de l'article L. 52-15 du même code : "la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne. Hors le cas prévu à l'article L. 118-2, elle se prononce dans les six mois du dépôt des comptes. Passé ce délai, les comptes sont réputés approuvés. Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant, après réformation, il fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales, la commission saisit le juge de l'élection ( ...)" ; qu'aux termes de l'article L. 118-3 du même code : "Saisi par la commission instituée par l'article L. 52-14, le juge de l'élection peut déclarer inéligible pendant un an le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales. Dans les autres cas, le juge de l'élection peut ne pas prononcer l'inéligibilité du candidat dont la bonne foi est établie, ou relever le candidat de cette inéligibilité" ; et qu'aux termes de l'article L. 118-3 du code électoral applicable aux élections des conseillers municipaux : "Peut être déclaré inéligible pendant un an celui ( ...) dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit" ;

Considérant que, par décision en date du 8 novembre 2001, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, après avoir examiné le compte de campagne de M. X..., a constaté que 72 % des dépenses de campagne engagées par ce dernier avaient été réglées directement par le candidat sans qu'il ait recours au compte ouvert au nom du mandataire prévu à cet effet, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 52-4 du code électoral selon lesquelles : "Lorsque le candidat a décidé de recourir à une association de financement électorale ou à un mandataire financier, il ne peut régler les dépenses occasionnées par sa campagne électorale que par leur intermédiaire, à l'exception du montant du cautionnement éventuel et des dépenses prises en charge par un parti ou un groupement politique" ;
Considérant qu'après avoir invité M. X..., par lettres reçues le 28 septembre 2001 et le 22 octobre 2001, à produire des éléments complémentaires et l'avoir informé de ce que son compte de campagne était susceptible d'être rejeté en raison de la part importante de dépenses qu'il avait réglées directement, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, lors de sa séance du 8 novembre 2001, a décidé de rejeter pour ce motif le compte de campagne de M. X... et de saisir le tribunal administratif en application des dispositions précitées de l'article L. 52-15 du code électoral ; qu'aucune disposition n'imposait à la commission d'aviser le candidat de la date de la séance au cours de laquelle son compte de campagne serait examiné ; que si la commission a adressé un courrier le 26 octobre à M. X..., qui en a accusé réception le 5 novembre, comme en fait foi l'accusé de réception, et non le 9 comme il le soutient, et si elle a statué sans attendre la réponse à ce dernier courrier, il n'est pas contesté que celui-ci portait exclusivement sur des dons postérieurs au scrutin, étrangers au motif de rejet retenu par la commission ; qu'eu égard au délai dont M. X... a ainsi disposé pour présenter sa défense sur le motif du règlement direct de la majorité des dépenses par le candidat, sans intervention du mandataire financier, seul motif sur lequel la commission a fondé sa décision, le moyen tiré du défaut de respect du caractère contradictoire de la procédure doit être écarté ; que le requérant n'est dès lors pas fondé à soutenir que le tribunal administratif de Basse-Terre n'aurait pas été régulièrement saisi ;
Sur le bien-fondé du rejet du compte de campagne :
Considérant qu'en raison de la finalité poursuivie par les dispositions précitées de l'article L. 52-4 du code électoral, l'obligation de recourir à une association de financement électorale ou à un mandataire pour toute dépense effectuée en vue de la campagne constitue une formalité substantielle à laquelle il ne peut être dérogé ; que le législateur a entendu frapper d'inéligibilité le candidat qui méconnaîtrait cette obligation ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. X... a réglé directement 72 % des dépenses de sa campagne, sans le recours au compte ouvert au nom du mandataire prévu à cet effet ; que si M. X... invoque la date tardive de délivrance d'un chéquier à sa mandataire, l'inexpérience de celle-ci et son état de santé, et l'obligation de régler en espèces certaines dépenses de faible montant ou urgentes, ces circonstances ne sont pas de nature à faire obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 52-4 du code électoral qui ont été méconnues en l'espèce ;
Considérant que M. X... ne peut prétendre, dans les circonstances de l'espèce, au bénéfice des dispositions précitées de l'article L. 118-3 du code électoral qui permettent au juge de l'élection, dans certaines circonstances, de ne pas prononcer l'inéligibilité d'un candidat ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Basse-Terre qui l'a déclaré inéligible pour un an en qualité de conseiller municipal ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : M. X... est déclaré inéligible en qualité de conseiller général pendant un an à compter de la date de la présente décision.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Gérard X..., à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales et au ministre de l'outre-mer.


Synthèse
Formation : 6 ss
Numéro d'arrêt : 242375
Date de la décision : 16/10/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ELECTIONS - DISPOSITIONS GENERALES APPLICABLES AUX ELECTIONS POLITIQUES - FINANCEMENT ET PLAFONNEMENT DES DEPENSES ELECTORALES - PORTEE DE L'INELIGIBILITE.

ELECTIONS - ELECTIONS MUNICIPALES.


Références :

Code électoral L52-12, L52-15, L118-3, L52-4


Publications
Proposition de citation : CE, 16 oct. 2002, n° 242375
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Keller
Rapporteur public ?: M. Lamy

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:242375.20021016
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