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23/10/2002 | FRANCE | N°232213

France | France, Conseil d'État, 23 octobre 2002, 232213


Vu la requête, enregistrée le 5 avril 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 mars 2001 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 mars 2001 décidant le placement en rétention administrative de M. Hedi X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du

2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée...

Vu la requête, enregistrée le 5 avril 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 mars 2001 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 mars 2001 décidant le placement en rétention administrative de M. Hedi X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;
Vu la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 modifiée ;
Vu le décret n° 72-374 du 5 mai 1972, modifié par le décret n° 2001-194 du 28 février 2001 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du PREFET POLICE,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 9 mars 2001 décidant le placement en rétention administrative de M. Hedi X... , ressortissant de la République tunisienne, a été signé par M. Jean-Etienne Y... , chef de bureau à la direction générale de la police ;
Considérant que, par décret du Président de la République en date du 11 janvier 2001, M. Philippe Z... , préfet, qui exerçait alors les fonctions de PREFET DE POLICE, a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 14 janvier 2001, date à laquelle il a atteint la limite d'âge applicable aux fonctionnaires titulaires du grade de préfet ; que, par deux décisions du ministre de l'intérieur en date du 12 janvier et du 1er mars 2001, il a été chargé, "dans l'intérêt du service ( ...), d'assurer l'intérim des fonctions de PREFET DE POLICE jusqu'à la nomination du titulaire de ce poste" ; que, par un arrêté du 1er mars 2001, M. Z... a donné délégation à M. Y... pour signer les arrêtés de reconduite à la frontière pris en application des dispositions de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée et les actes pris pour leur exécution ;
Considérant qu'aux termes de l'article 68 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : "Les fonctionnaires ne peuvent être maintenus en fonction au-delà de la limite d'âge de leur emploi sous réserve des exceptions prévues par les textes en vigueur" ;
Considérant que la survenance de la limite d'âge d'un fonctionnaire ou, le cas échéant, l'expiration du délai de prorogation d'activité au-delà de cette limite, telle qu'elle est déterminée par les textes en vigueur, entraîne de plein droit la rupture du lien de cet agent avec le service ; que, par suite, en l'absence de disposition législative permettant de déroger à la limite d'âge, ce fonctionnaire ne peut être légalement maintenu en fonction jusqu'à la nomination de son successeur que si ce maintien est rendu nécessaire par des circonstances particulières liées aux responsabilités qui lui sont confiées ou à l'impossibilité de désigner immédiatement une autre personne susceptible d'exercer celles-ci de manière effective ;
Considérant que, sauf dans le cas prévu à l'article 1er de la loi du 31 décembre 1987 pour la période précédant la date d'achèvement du mandat du Président de la République, aucune disposition législative ne permet de déroger à la limite d'âge applicable aux fonctionnaires occupant un emploi de préfet ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que des circonstances particulières au premier trimestre 2001 aient pu justifier légalement que M. Z... fût maintenu dans ces fonctions de PREFET DE POLICE jusqu'à la nomination de son successeur ;

Considérant cependant qu'un fonctionnaire irrégulièrement nommé aux fonctions qu'il occupe doit être regardé comme légalement investi de ces fonctions tant que sa nomination n'a pas été annulée ; que c'est, dès lors, à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce que l'arrêté du 1er mars 2001 par lequel M. Z... a délégué sa signature à M. Y... aurait été entaché d'incompétence pour annuler l'arrêté attaqué, signé sur le fondement de cette délégation ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant que M. X... demande l'annulation de la décision de reconduite à la frontière prise à son encontre par le PREFET DE POLICE le 9 mars 2001 ; que lorsqu'un arrêté de reconduite à la frontière a été dépourvu de mesures d'exécution pendant une durée anormalement longue, caractérisée par un changement de circonstances de fait ou de droit, et que ce retard est exclusivement imputable à l'administration, l'exécution d'office d'une décision de reconduite à la frontière doit être regardée comme fondée non sur l'arrêté initial, même si celui-ci est devenu définitif faute d'avoir été contesté dans les délais, mais sur un nouvel arrêté de reconduite dont l'existence est révélée par la mise en oeuvre de l'exécution d'office elle-même et qui doit être regardée comme s'étant substitué à l'arrêté initial ; que ce nouvel arrêté est réputé émaner de l'autorité ayant pris les mesures d'exécution d'office ;
Considérant que M. X... a fait l'objet, le 17 juillet 1998, d'un arrêté de reconduite à la frontière pris par le préfet de la Seine-Saint-Denis et dont il a reçu notification le 1er août suivant ; que cet arrêté n'avait reçu aucune exécution avant la décision du 9 mars 2001 par laquelle le PREFET DE POLICE a ordonné le placement de M. X... dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire en vue d'en assurer l'exécution d'office ;
Considérant, toutefois, que ce délai n'est pas exclusivement imputable à l'administration, laquelle n'était pas informée de tous les changements d'adresse de l'intéressé, hébergé par des tiers ; que, par suite, aucun nouvel arrêté de reconduite à la frontière ne peut être considéré comme étant intervenu à la date du 9 mars 2001 ; que M. X... n'est, dès lors, pas fondé à demander l'annulation de la décision de reconduite à la frontière prise à son encontre le 9 mars 2001 ;
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France : L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification lorsque l'arrêté est notifié par voie administrative ou dans les sept jours lorsqu'il est notifiée par voie postale, demander l'annulation de cet arrêté au président du tribunal administratif ..." ;

Considérant que l'arrêté du 17 juillet 1998 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé la reconduite à la frontière de M. X... a été notifié à l'intéressé par voie postale le 1er août 1998 ; qu'ainsi, à supposer que M. X... en demande l'annulation, sa requête est tardive et, par suite, irrecevable ;
Considérant que, si M. X... fait valoir qu'il est en mesure d'apporter la preuve qu'il réside en France depuis plus de dix ans et ne peut, à ce titre, faire l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière, ce moyen est inopérant à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision du 9 mars 2001 par laquelle le PREFET DE POLICE a ordonné son placement dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 9 mars 2001 ordonnant son placement en rétention administrative ;
Article 1er : Le jugement du 20 mars 2001 du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il a annulé la décision du 9 mars 2001 ordonnant le placement en rétention administrative de M. X... .
Article 2 : Les conclusions présentées par M. X... devant le tribunal administratif de Paris, à l'encontre de la décision du 9 mars 2001 ordonnant son placement en rétention administrative, sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Hedi X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 232213
Date de la décision : 23/10/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 17 juillet 1998
Arrêté du 01 mars 2001
Arrêté du 09 mars 2001
Décret du 11 janvier 2001
Loi 84-16 du 11 janvier 1984 art. 68
Loi 87-1060 du 31 décembre 1987 art. 1
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 22 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 23 oct. 2002, n° 232213
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: Mme de Silva

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:232213.20021023
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