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30/10/2002 | FRANCE | N°232660

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 30 octobre 2002, 232660


Vu la requête, enregistrée le 17 avril 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA GIRONDE ; le PREFET DE LA GIRONDE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 23 mars 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé son arrêté du 26 février 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Besiki X... et la décision distincte du même jour fixant le pays de renvoi de l'intéressé ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. X... devant le tribunal

administratif de Bordeaux ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la conv...

Vu la requête, enregistrée le 17 avril 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA GIRONDE ; le PREFET DE LA GIRONDE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 23 mars 2001 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé son arrêté du 26 février 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Besiki X... et la décision distincte du même jour fixant le pays de renvoi de l'intéressé ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. X... devant le tribunal administratif de Bordeaux ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 91-467 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Lafouge, Conseiller d'Etat ;
- les observations de la SCP Parmentier, Didier, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : " Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (.) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (.) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité géorgienne, à qui la qualité de réfugié a été refusée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 7 juin 1999 confirmée par une décision de la commission des recours des réfugiés du 14 mars 2000, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 11 janvier 2001, de l'arrêté du 28 décembre 2000 par lequel le PREFET DE LA GIRONDE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sur la légalité de l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes de l'article 27 ter de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée : " La décision fixant le pays de renvoi constitue une décision distincte de la mesure d'éloignement elle-même " ; que, par suite, le moyen tiré des risques que M. X... encourrait en cas de retour en Géorgie est inopérant ; que, dès lors, le PREFET DE LA GIRONDE est fondé à soutenir que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux s'est fondé sur ce motif pour annuler son arrêté en date du 26 février 2001 en tant qu'il ordonne la reconduite à la frontière de l'intéressé ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif et le Conseil d'Etat ;

Considérant qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X... excipe de l'illégalité de la décision du 6 novembre 2000 du ministre de l'intérieur lui refusant le bénéfice de l'asile territorial et de la décision du 28 décembre 2000 du PREFET DE LA GIRONDE lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que, cependant, il ne ressort pas des pièces du dossier, en l'absence, à la date de la décision lui refusant le bénéfice de l'asile territorial, de tout élément probant de nature à corroborer ses affirmations relatives aux risques qu'il encourait alors personnellement dans son pays d'origine, que le ministre de l'intérieur ait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, dès lors, M. X... n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé serait illégal en raison de l'illégalité de la décision du ministre de l'intérieur refusant de lui accorder l'asile territorial ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA GIRONDE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté en date du 26 février 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion ou de reconduite à la frontière de s'assurer, sous le contrôle du juge, en application du deuxième alinéa de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, d'une part, que M. X... n'établissait pas, aux dates auxquelles ont été rejetées ses demandes tendant à se voir reconnaître la qualité de réfugié et à bénéficier de l'asile territorial, qu'il risquait de faire l'objet de persécutions en cas de retour dans son pays d'origine ; que, d'autre part, si l'intéressé a fait état, au moyen de pièces produites devant le juge administratif de faits nouveaux, antérieurs à la décision fixant son pays de renvoi, relatifs à des procédures judiciaires engagées contre lui, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces pièces seraient en rapport avec ses liens avec un groupement politique d'opposition ; que, par suite, le PREFET DE LA GIRONDE est fondé à soutenir que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux, accueillant l'unique moyen développé par M. X..., a annulé sa décision en date du 26 février 2001 fixant la Géorgie comme pays de destination de M. X... ;
Sur les conclusions de l'avocat de M. X... tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à l'avocat de M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non exposés dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Bordeaux est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA GIRONDE, à M. Besiki X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 232660
Date de la décision : 30/10/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 06 novembre 2000
Arrêté du 28 décembre 2000
Arrêté du 26 février 2001
Code de justice administrative L761-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3
Loi 91-467 du 10 juillet 1991
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 27 ter, art. 27 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 30 oct. 2002, n° 232660
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lafouge
Rapporteur public ?: Mlle Fombeur

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:232660.20021030
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