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13/11/2002 | FRANCE | N°189991

France | France, Conseil d'État, 2 / 1 ssr, 13 novembre 2002, 189991


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 3 septembre et le 22 décembre 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la S.A. FONCIERE PARIS NEUILLY, dont le siège social est ... ; la S.A. FONCIERE PARIS NEUILLY demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 26 juin 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 20 octobre 1992 par lequel le maire de Paris l

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Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 3 septembre et le 22 décembre 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la S.A. FONCIERE PARIS NEUILLY, dont le siège social est ... ; la S.A. FONCIERE PARIS NEUILLY demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 26 juin 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 20 octobre 1992 par lequel le maire de Paris lui a refusé un permis de construire pour la restructuration d'un ensemble immobilier sur un terrain sis ... (9ème) ensemble ledit arrêté ;
2°) de condamner la ville de Paris à lui verser la somme de 5 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme de Margerie, Maître des Requêtes ;
- les observations de Me Cossa, avocat de la S.A. FONCIERE PARIS NEUILLY et de Me Foussard, avocat de la ville de Paris,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision en date du 20 octobre 1992, le maire de Paris a refusé de délivrer à la S.A. FONCIERE PARIS NEUILLY le permis de construire qu'elle demandait en vue de la restructuration d'un ensemble immobilier à usage de bureaux et d'habitation sur un terrain sis ... (9ème), au motif que le projet entraînerait un dépassement du coefficient d'occupation des sols prévu à l'article UH 14-1-1 du règlement annexé au plan d'occupation des sols révisé de la ville de Paris, approuvé par la délibération du Conseil de Paris en date du 20 novembre 1989, que la largeur cumulée des lucarnes en façade sur cour et sur rue dépasserait la norme de 40 % de la longueur de la toiture prévue à l'article UH 11-3 du règlement et que l'adossement sur le pignon du n° 14 de la rue Henner n'était pas complet ;
Considérant que la S.A. FONCIERE PARIS NEUILLY a soutenu en première instance et devant le juge d'appel que le refus opposé sur le fondement de l'article UH 11-3 du règlement du plan d'occupation des sols de la ville de Paris à sa demande de permis de construire était dépourvu de fondement légal en raison de diverses irrégularités qui avaient affecté l'ensemble de la procédure de révision du plan d'occupation des sols de Paris approuvé le 20 octobre 1989 ; qu'en se bornant à écarter ce moyen au motif que la requérante ne démontrait pas que les irrégularités alléguées avaient eu une influence sur la légalité de l'article UH 11-3, sans examiner si les irrégularités alléguées avaient, compte tenu des explications fournies par la ville de Paris, eu ou non une influence sur la légalité de cette disposition, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit ; qu'ainsi, la S.A. FONCIERE PARIS NEUILLY est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Sur la légalité des dispositions du plan d'occupation des sols fondant le refus contesté :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme, issu de la loi du 9 février 1994, entrée en vigueur le 12 février de la même année : "L'illégalité pour vice de forme ou de procédure d'un schéma directeur, d'un plan d'occupation des sols ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu ne peut être invoquée par voie d'exception, après l'expiration d'un délai de six mois à compter de la prise d'effet du document en cause" ; que, dans le silence de la loi, le point de départ du délai de six mois institué par l'article L. 600-1 doit, en ce qui concerne les documents d'urbanisme ayant pris effet avant l'entrée en vigueur des dispositions de cet article, être fixé à la date de son entrée en vigueur, soit le 12 février 1994 ; que la recevabilité des moyens de forme et de procédure invoqués par voie d'exception à l'encontre d'un document d'urbanisme s'apprécie moyen par moyen, en sorte que le requérant ne peut se prévaloir, à l'encontre d'un plan d'occupation des sols approuvé avant l'entrée en vigueur de la loi du 9 février 1994, d'un vice de forme ou de procédure qu'il n'aurait pas invoqué, devant le juge ou devant l'administration, avant le 13 août 1994 ; qu'il y a lieu, par suite, d'écarter comme irrecevables les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure d'adoption du plan d'occupation des sols présentés pour la première fois en appel par la société requérante ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce et issue du décret du 9 septembre 1983 pris pour l'application de la loi susvisée du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat : "L'établissement du plan d'occupation des sols est prescrit par délibération du conseil municipal" ; qu'il résulte de l'instruction que le Conseil de Paris a, par une délibération du 25 novembre 1985, décidé de poursuivre la révision du plan d'occupation des sols, initialement prescrite par un arrêté du 2 novembre 1981 du préfet de Paris, en vertu des dispositions applicables avant l'entrée en vigueur de la loi du 7 janvier 1983 ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, c'est à bon droit que le tribunal administratif a jugé que la procédure ayant conduit à l'approbation le 20 novembre 1989 d'un nouveau plan d'occupation des sols de Paris n'avait pas été engagée de manière irrégulière ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : "Le plan d'occupation des sols est élaboré à l'initiative et sous la responsabilité de la commune ( ...) Sont associés à cette élaboration l'Etat et, à leur demande et dans les formes que la commune ( ...) détermine, la région, le département ( ...)" ; qu'aux termes de l'article R. 123-3 du même code, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : "L'établissement d'un plan d'occupation des sols est prescrit par délibération du conseil municipal. Cette délibération fixe les modalités de l'association des personnes publiques autres que l'Etat à l'élaboration du plan d'occupation des sols" et qu'aux termes de l'article R. 123-6 du même code, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : "La délibération prescrivant l'établissement du plan d'occupation des sols est notifiée par le maire aux présidents du conseil régional et du conseil général des régions et départements concernés ( ...) / Dans un délai de deux mois à compter de la transmission de cette délibération, les présidents du conseil régional, du conseil général ( ...) font connaître au maire s'ils veulent être associés à l'élaboration du plan d'occupation des sols selon les modalités prévues à l'article R. 123-3 et, dans l'affirmative, désignent à cet effet leurs représentants ( ...)" ; qu'il résulte de l'instruction qu'en application de l'article R. 123-3 précité, le Conseil de Paris, siégeant en formation de conseil municipal, a adopté le 25 novembre 1985 une délibération prescrivant la poursuite de la révision du plan d'occupation des sols de la ville et institué à cet effet, une commission de travail composée notamment de "cinq représentants du Conseil de Paris, siégeant en formation de conseil général" ; qu'ayant décidé, en sa qualité de président du Conseil de Paris siégeant en formation de conseil général, d'associer le département à l'élaboration du plan d'occupation des sols conformément aux dispositions précitées de l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme, le maire de Paris a recueilli, le 24 mars 1986, sous la forme d'un vote à main levée, l'approbation du Conseil de Paris siégeant en formation de conseil général sur le nom des cinq élus par lesquels il avait choisi de se faire représenter dans la commission créée par la délibération du 25 novembre 1985 ; qu'en procédant de la sorte, il n'a pas entaché la procédure d'une irrégularité substantielle de nature à entacher d'illégalité les délibérations et les propositions de modification adoptées au règlement du plan d'occupation des sols révisé de la ville de Paris, approuvé le 20 novembre 1989 ; qu'ainsi, c'est à bon droit que le tribunal administratif a écarté le moyen tiré de ce que le mode de désignation des représentants du département de Paris à la commission de travail créée par la délibération du 25 novembre 1985 aurait entaché la procédure suivie d'une irrégularité substantielle ;

Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 123-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : "Le conseil municipal ( ...) arrête le projet de plan d'occupation des sols. Celui-ci est alors soumis pour avis aux personnes publiques associées à son élaboration ainsi que, à leur demande, aux communes limitrophes. Ces personnes donnent un avis dans les limites de leurs compétences propres, au plus tard trois mois après la transmission du projet de plan ; à défaut ces avis sont réputés favorables" ; que si, dans certaines communes limitrophes, le conseil municipal n'a pas délibéré dans ce délai de trois mois et si son avis est, par suite, réputé favorable, cette circonstance n'était pas de nature, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, à entacher la régularité de la procédure de révision du plan d'occupation des sols ;
Considérant que si l'article UH 5 du règlement du plan d'occupation des sols de Paris relatif aux caractéristiques des terrains ne comporte aucune disposition, cette circonstance est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité des dispositions du plan d'occupation des sols qui servent de fondement au refus contesté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que c'est à bon droit que le tribunal administratif a rejeté l'exception d'illégalité du règlement du plan d'occupation des sols révisé de la ville de Paris, approuvé le 20 novembre 1989 ;
En ce qui concerne le refus de permis de construire :
Considérant qu'il n'est pas contesté que le projet comportait un dépassement du coefficient d'occupation des sols fixé par l'article UH 14-1-1 du règlement du plan d'occupation des sols de Paris ; qu'il ressort des pièces du dossier que le projet ne respectait pas non plus le coefficient d'occupation des sols "de fait" prévu pour les reconstructions totales ou partielles par l'article UH 14-1-3 du même règlement ; que, dès lors, le maire de Paris a pu légalement se fonder sur l'article UH 14-1-1 pour refuser le permis de construire sollicité ; que les moyens contestant la légalité des autres motifs du refus litigieux sont, par suite, inopérants ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 octobre 1992 par lequel le maire de Paris lui a refusé un permis de construire sur un terrain situé ... ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la ville de Paris, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à la S.A. FONCIERE PARIS NEUILLY la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 26 juin 1997 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la S.A. FONCIERE PARIS NEUILLY devant la cour administrative d'appel de Paris ainsi que le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la S.A. FONCIERE PARIS NEUILLY, à la ville de Paris et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

68-03-03-01-04 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - LEGALITE INTERNE DU PERMIS DE CONSTRUIRE - LEGALITE AU REGARD DE LA REGLEMENTATION NATIONALE - PRESCRIPTIONS POSEES PAR LES LOIS D'AMENAGEMENT ET D'URBANISME


Références :

Arrêté du 02 novembre 1981
Arrêté du 20 octobre 1992
Code de justice administrative L821-2, L761-1
Code de l'urbanisme L600-1, R123-3, L123-3, R123-6
Décret du 09 septembre 1983
Instruction du 25 novembre 1985
Loi 83-8 du 07 janvier 1983
Loi 94-112 du 09 février 1994


Publications
Proposition de citation: CE, 13 nov. 2002, n° 189991
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme de Margerie
Rapporteur public ?: Mme de Silva

Origine de la décision
Formation : 2 / 1 ssr
Date de la décision : 13/11/2002
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 189991
Numéro NOR : CETATEXT000008144836 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2002-11-13;189991 ?
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