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15/11/2002 | FRANCE | N°243876

France | France, Conseil d'État, 3 ss, 15 novembre 2002, 243876


Vu la requête, enregistrée le 7 mars 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 décembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 27 août 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Leïla X... épouse Y... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... épouse Y... devant ce tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de

sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n...

Vu la requête, enregistrée le 7 mars 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 décembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 27 août 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Leïla X... épouse Y... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... épouse Y... devant ce tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laville, Conseiller d'Etat ;
- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la requête :
Considérant qu'aux termes du IV de l'article 22 bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 : "Le jugement du président du tribunal administratif ou de son délégué est susceptible d'appel dans un délai d'un mois devant le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat ou le conseiller d'Etat délégué par lui" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement du tribunal administratif de Paris du 14 décembre 2001 a été notifié au PREFET DE PARIS le 8 février 2002 ; que la requête du préfet a été enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 8 mars 2002 ; que Mme X... épouse Y... n'est donc pas fondée à soutenir qu'elle a été présentée après l'expiration du délai d'appel ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris du 14 décembre 2001 :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Leïla X... épouse Y..., de nationalité algérienne, s'est maintenue en France au-delà du délai d'un mois à compter de la notification, le 25 août 2001 de la décision du même jour du PREFET DE POLICE rejetant sa demande de renouvellement de titre de séjour ; que l'intéressée se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;

Considérant que si Mme X... épouse Y... entrée en France comme étudiante en 1995 fait valoir qu'elle a deux enfants nés en France respectivement le 31 janvier 1998 et le 14 juillet 1999, il ne ressort pas des pièces du dossier que son mari, également de nationalité algérienne et lui-même en situation irrégulière, depuis son entrée en France en 1999, soit dans l'impossibilité de l'accompagner hors du territoire national ainsi que leurs enfants qui ne se trouvent pas, en raison même de leur jeune âge, dans l'incapacité de s'adapter à un nouvel environnement ; que la circonstance que Mme X... épouse Y... ait été enceinte environ de huit mois à la date de l'arrêté attaqué est sans incidence sur la légalité de cet arrêté ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de Mme X... épouse Y... en France qui n'est pas, par ailleurs, dépourvue de tout lien familial avec son pays d'origine, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, le PREFET DE POLICE, en prenant l'arrêté en date du 27 août 2001, n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle de l'intéressée ; que cet arrêté n'a pas non plus porté au droit de celle-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que par suite, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté de reconduite attaqué ;
Considérant toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X... épouse Y... devant le tribunal administratif et devant le Conseil d'Etat ;
Considérant que la décision du refus de titre de séjour, qui a été opposée à Mme X... épouse Y... le 25 avril 2001 et notifiée le même jour, n'a pas été contestée par l'intéressée dans les délais requis à compter du rejet le 31 mai 2001 de son recours gracieux formé auprès du PREFET DE POLICE ; que cette décision était, dès lors, devenue définitive le 12 septembre 2001, date à laquelle l'intéressée a présenté sa demande au tribunal administratif ; que par suite, l'exception tirée de son illégalité n'est pas recevable ;
Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;
Considérant que pour les raisons rappelées ci-dessus, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté décidant la reconduite à la frontière de Mme X... épouse Y... n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 14 décembre 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 27 août 2001 décidant la reconduite à la frontière de Mme X... épouse Y... ;
Article 1er : Le jugement du 14 décembre 2001 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par Mme X... épouse Y... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mme Leïla X... épouse Y... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 3 ss
Numéro d'arrêt : 243876
Date de la décision : 15/11/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 27 août 2001
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22 bis, art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 15 nov. 2002, n° 243876
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Laville
Rapporteur public ?: M. Séners

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2002:243876.20021115
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