Vu la requête, enregistrée le 3 janvier 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Halima X..., ; Mme X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 novembre 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 mai 2000 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a décidé de la reconduire à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de lui délivrer un titre de séjour ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mlle Vialettes, Auditeur ;
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ....) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ....)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 7 février 2000, de la décision du 3 février 2000 du préfet des Hauts-de-Seine lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., mal voyante et âgée de 75 ans à la date de la décision de reconduite à la frontière, vit auprès de trois de ses enfants qui résident régulièrement en France et subviennent à ses besoins ; que ses petits-enfants et ses arrière-petits-enfants, de nationalité française, résident également en France ; que, dans les circonstances très particulières de l'espèce et nonobstant le fait que Mme X... ne justifie pas être dépourvue de toute attache en Algérie, l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière porte à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et méconnaît, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 mai 2000 du préfet des Hauts-de-Seine décidant sa reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions tendant à la délivrance d'un titre de séjour :
Considérant que s'il incombe à l'administration de ne pas méconnaître l'autorité de la chose jugée qui s'attache à la présente décision, qui annule l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X..., l'exécution de cette décision n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour ; que les conclusions de Mme X... tendant à ce que l'administration lui délivre un titre de séjour ne peuvent, dès lors, être accueillies ;
Article 1er : Le jugement du 6 novembre 2000 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 24 mai 2000 du préfet des Hauts-de-Seine ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de Mme X... est rejeté.
Article 3 : la présente décision sera notifiée à Mme Halima X..., au préfet des Hauts-de-Seine et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.